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Réforme de la sixième : génération désenchantée

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PARTIE I : TOUT EST CHAOS

 

En annonçant l’ajout en sixième, d’une heure de soutien soit en mathématiques, soit en français, le Ministre a précisé que cet ajout se ferait à moyens constants – comme d’habitude – et serait financé par la suppression de l’heure de technologie. Pour le SNALC, il commet là une erreur grave.

Posons un préalable : le pro­gramme de technologie de si­xième n’est pas parfait. Même si l’on comprend l’intention de faire découvrir aux élèves des objets technologiques, l’approche intel­lectualiste et très centrée sur les compétences n’est pas vraiment probante.

Est-ce un motif suffisant pour supprimer une discipline qui gagnerait au contraire à faire peau neuve?

QUELLES AMÉLIORATIONS APPORTER ?

La réponse n’est pas nécessairement au collège, mais au lycée où circulent des anecdotes édifiantes : un élève deman­dant, très sérieusement, comment on change de page dans Word ou sa condis­ciple, tapant sur la barre d’espace jusqu’à ce que le curseur consente à passer à la ligne suivante.

Exemples très bêtes et relatifs à un seul type de logiciel, mais symptomatiques de deux maux.

D’aucuns ont voulu voir dans nos élèves des « digital natives » nés avec un clavier dans les mains alors que l’expertise de la plupart se cantonne aux réseaux sociaux ou aux jeux vidéos.

On voulait aussi un numérique « transver­sal ». Chaque discipline a donc eu droit à une pincée de numérique… tant et si bien que personne ne sait qui fait quoi. Dans ces conditions, il est impossible d’acquérir aucune connaissance solide.

La technologie pourrait apporter tellement si on ne la limitait pas à l’approche théo­rique, à l’étude d’objets et au seul numé­rique ! Articuler les programmes de collège pour qu’ils donnent le goût de ce qui se fait soit en voie professionnelle soit en filières technologiques, voilà qui aurait du sens !

Mais pour atteindre cet objectif, il faudrait une vision ne variant pas au gré des priorités du moment. Et le ministère, au vu du traite­ment infligé de manière répétée aux professeurs des filières tech­nologiques, n’est apparemment pas outillé pour une telle vision à long terme

 

PARTIE II : RIEN NE VA, EN FAIT

 

Les modalités mises en place pour améliorer le niveau des sixièmes en français ou en mathématiques ne sont tout simplement pas bonnes, même si on fait abstraction de la suppression de la technologie. Elles auront sans doute peu d’ef­fets sur le niveau des élèves mais vont nuire aux conditions de travail des professeurs.

APPORT INCERTAIN POUR LES ÉLÈVES

Il s’agit de soutien : le soutien est mis en place pour pallier les carences. Plutôt que d’instituer son propre échec – passé et à venir – il serait bon de prendre le problème en amont et de rendre les heures perdues au fil des années au collège, pour faire de vrais cours, pas du soutien.

Ce sera mathématiques OU français : le problème est que les élèves en difficul­tés avec les mathématiques à l’entrée en sixième ont aussi des difficultés en français. C’est même souvent lié. On aura donc des petits Oliver Twist de la pensée privés du supplément dont ils auraient besoin.

PENSUM POUR LES PROFESSEURS

Une multiplication des réunions : en plus des conseils école-collège, il fau­dra se réunir en début de sixième pour analyser les résultats aux évaluations de début d’année. Ensuite, il faudra infor­mer le collègue du premier degré – voir paragraphe suivant – sur les difficultés ou les points forts. Et à chaque fin de tri­mestre, après une évaluation, on se réu­nira pour modifier les groupes.

Des heures assurées, notam­ment, par des professeurs des écoles : les professeurs des écoles enseignent dans leurs écoles. C’est peut-être un détail pour vous. Mais cela signifie qu’ils sont dans une salle de classe quand les heures de soutien pourraient être dispensées au collège. Bien sûr, il existe deux solutions. On peut placer le soutien le mercredi matin.

Mais cela ne marchera pas sur un grand nombre de bassins où les élèves de pri­maire – et donc les professeurs des écoles – ont cours le mercredi.

On pourrait aussi utiliser certains rempla­çants… s’ils n’étaient déjà pas en nombre insuffisant pour assurer les remplace­ments ou les professeurs de SEGPA… s’ils n’avaient pas déjà un emploi du temps si chargé.

Bref, encore un cautère sur une jambe de bois ou une usine à gaz (ou les deux).


Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1473 du 27 janvier 2023