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Exigence des savoirs : la contre-enquête du SNALC (partie III : lycée professionnel)

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Partie  III : lycée professionnel

Sommaire

Le Ministère de l’Éducation nationale a décidé de mener une réflexion sur les moyens d’améliorer les résultats – et donc les acquis – des élèves. Une mission a été instaurée et a été nommée « Exigence des savoirs ». Dans ce cadre, le Ministère a auditionné les organisations syndicales et le SNALC a bien entendu participé pleinement à ces auditions. Mais l’Institution a aussi décidé de proposer un questionnaire aux professionnels qui la composent afin d’étayer sa réflexion. Malheureusement, l’enquête du Ministère est clairement biaisée en ce sens qu’elle permet, grosso modo, aux professeurs de dire que s’ils ne parviennent pas à faire progresser les élèves, c’est parce qu’ils ne sont pas formés ou qu’ils ne travaillent pas de la bonne manière. Le SNALC a trouvé ce questionnaire honteux et l’a fait savoir. Mais notre syndicat ne saurait rester dans des oppositions de principe, sans avoir une vraie réflexion. Notre syndicat a donc décidé de construire sa propre enquête avec un nombre d’items conséquents et permettant aux professeurs de faire entendre leur voix. Plus de mille réponses apportées à notre questionnaire lui confèrent toute la représentativité nécessaire pour alerter le Ministère sur des points importants.

Avant de savoir comment il faudrait faire évoluer le collège, un préalable est de savoir si des changements sont nécessaires, voire souhaités par les professeurs. 

Notre enquête a notamment concerné les professeurs des lycées professionnels. Et le SNALC ne peut introduire son analyse sans commencer par un constat accablant. Les professeurs des lycées professionnels ne s’estiment pas, dans leur grande majorité, mis en situation de faire réussir leurs élèves. En effet, ils sont 68% à répondre par la négative à cette question qui est la première de notre enquête. 

En quelque sorte la mère de toutes les interrogations qui suivent. Désormais, il convient de s’intéresser aux raisons de cette difficulté, voire de cette impossibilité constatée par les vrais acteurs du terrain.

1. Des professeurs professionnels

Afin de bien présenter les professeurs des lycées professionnels, le SNALC s’est intéressé à leurs habitudes du point de vue pédagogique.

Il y a fort à parier que le Ministère sera déçu car ces enseignants ne sont pas majoritairement dans une approche collaborative pour ce qui concerne leur pédagogie. 55% d’entre eux ne pratique pas ou très peu l’élaboration collective de projets. 59% ne mutualisent pas ou rarement leurs ressources et 56% d’entre eux leurs pratiques pédagogiques. Mais la proportion relativement faible de professeurs étant dans une démarche de collaboration peut aisément s’expliquer par le fait que certains d’entre eux se voient contraints de pratiquer la co-intervention sans que cela fasse parfois sens…

Mais préparer plutôt ses cours seul est loin de témoigner d’un manque de travail. En effet, les professeurs ont une posture proche de celle du chercheur dans ce travail personnel. Ainsi, 83% d’entre eux préparent leurs cours en faisant des recherches sur internet, 37% en utilisant un manuel scolaire, 30% en prenant appui sur des ressources hors internet, principalement livresques et 27% en consultant des ouvrages scientifiques.

Seule une minorité de nos collègues va chercher une aide dans les ressources Eduscol ou dans les ressources académiques. Ils ne souhaitent pas s’appuyer sur du pré-pensé mais construire eux-mêmes leurs séances et leurs séquences.

Concernant leur progression annuelle, les professeurs des lycées professionnels utilisent dans leur grande majorité les programmes. Mais ils se basent aussi, quoique dans une bien moindre mesure sur les attendus de fin d’année puis sur les attendus de fin de cycle et sur les repères de progression. C’est d’ailleurs en ce sens que le SNALC se montre attentif et critique sur la rédaction des programmes qui sont assez fréquemment refondus par notre institution.

Preuve évidente de leur esprit professionnel, nos collègues se forment massivement afin de progresser. En effet, 86% d’entre eux ont participé à au moins une formation lors des deux dernières années. Ils sont même 56% à en avoir connu plusieurs dans ce laps de temps. Sachant que, contrairement à ce qui peut se pratiquer dans le premier degré, les formations obligatoires ne sont pas légions dans la voie professionnelle.

Donc, l’archétype du professeur dans la voie professionnelle est plutôt un collègue qui prépare ses cours en s’appuyant sur des recherches ou sur un manuel et en suivant le programme, et qui se forme volontiers. Il est donc difficile de considérer que les difficultés rencontrées par les élèves proviennent de ces personnes qui leur font face et leur transmettent les connaissances et les compétences. Les problèmes sont à chercher ailleurs.

2. La formation

Nous venons de voir un aspect que l’on peut qualifier de quantitatif. En effet, dans leur grande majorité, les PLP se forment. Mais qu’ont-ils à nous apprendre sur les formations auxquelles ils participent et sur leur qualité ?

En premier lieu, ils ne sont que 40% à être d’accord ou plutôt d’accord lorsque l’idée que la formation ou les formations qu’ils ont subies se sont révélées être des moments épanouissants.

La même proportion considère que ces formations étaient adaptées à leurs besoins. Il faut noter qu’il n’y a pas un rejet franc et massif des formations. Cela est confirmé par le fait que les PLP ne se considèrent pas majoritairement infantilisés lorsqu’ils participent à une formation (sur cette questions les avis positifs comme les avis négatifs représentent environ 45% des réponses).

En définitive, il apparaît que la formation est un axe pouvant être travaillé sans tout remettre en cause. Les taux de satisfaction ne sont pas catastrophiques – en tout cas pas comme pour ce qui concerne nos collègues du premier degré. Un moyen de parvenir à une formation mieux vécue et, de ce fait, plus porteuse de progression professionnelle consisterait sans doute à se conformer aux objectifs de l’actuel schéma directeur de la formation qui avaient, entre autres, pour objectif de tenir compte des besoins des personnels.

Si l’on prend en compte le nombre de premières places obtenues par chaque réponse possible, il apparaît que les PLP souhaitent parfaire leur maîtrise des contenus et de la didactique de leur discipline. Il serait donc intéressant pour le Ministère de permettre à ces personnels d’exprimer encore plus clairement leurs besoins dans ces deux champs et de faire leur nécessaire pour leur permettre de progresser.

Mais si la formation, quoique perfectible, n’est pas LA pierre d’achoppement dans la quête de l’amélioration du niveau de maîtrise des connaissances pour les élèves de la voie professionnelle, quels sont les obstacles réels ?

3. Les contenus

Nous l’avons vu précédemment, les professeurs des lycées professionnels sont soucieux d’appliquer les programmes – ce qui est purement normal. Il convient donc de s’intéresser aux dits programmes, de manière large, tout en précisant que, parmi les participants à notre enquête, les professeurs des disciplines générales et les professeurs des disciplines professionnel sont représentés en nombres sensiblement similaires à leur distribution dans les lycées.

De manière analytique, il s’agit d’adopter une approche quantitative, en passant par ce que l’on appelle communément la « lourdeur des programmes ». 

Sur ce point, les avis de nos collègues sont relativement tranchés.

En effet, ils sont 60% à être tout à fait d’accord ou plutôt d’accord avec cette expression. Seuls 7% d’entre eux ne considèrent pas du tout que les programmes sont trop chargés.

Il y aurait donc une réflexion à mener sur la somme d’éléments à enseigner.

Mais cette réflexion se doit de ne pas se cantonner au quantitatif. Car faire des coupes pour éviter ce sentiment de lourdeur de manière inconsidérée rendrait les programmes inopérants. C‘est tout d’abord vrai lorsque l’on s’intéresse à la question de l’ambition dans la définition des contenus à enseigner. Si les professeurs estiment que les programmes sont trop chargés, ils sont près de 50% à considérer qu’ils manquent d’ambition et seuls 13% d’entre eux ne sont pas du tout d’accord avec cette assertion. Il y a donc un paradoxe à intégrer de la part de notre institution : des contenus quantitativement importants mais qualitativement médiocre.

La solution – mais le SNALC n’en a jamais douté – peut passer par des programmes qui se recentrent sur les savoirs à maîtriser chaque année par les élèves. Et, sur ce point, les professeurs des lycées professionnels sont clairement d’accord avec notre syndicat. 

Dans son enquête, le SNALC a posé la même question en remplaçant le terme « connaissances » par le terme « compétences » : les résultats ont été totalement inversés puisque 62% des professeurs ne considèrent pas que les programmes souffrent d’un manque de compétences à transmettre. Les réponses estimant qu’il n’y a pas assez de compétences dans les contenus sont plus nombreuses chez les professeurs enseignant dans les disciplines professionnelles.

En revanche, concernant ces disciplines, la question des contenus ne se limite pas aux programmes. Les référentiels de formation doivent être interrogés ; et ce, d’autant plus que ces derniers sont en cours de réfection depuis quelques mois. Et il semble que sur ce point des efforts doivent être réalisés car 68% des professeurs estiment que les référentiels ne sont pas opérationnels. Le Ministère doit donc, en plus de s’interroger du point de vue des professionnels qui embaucheront par la suite nos élèves, sur l’aspect « enseignable » de ces référentiels et en faire un objet voué à faciliter la transmission. En effet, pour l’heure, ils ressemblent à des fiches métiers rédigées en blocs de compétences mais pas à des contenus opérationnels pour les professeurs.

Contenus lourds, ambition à repenser et opérationnalisation des contenus à interroger, telles sont les leviers à actionner du point de vue des programmes et des référentiels. Mais ces données ne fonctionnent pas seules dans un univers non contraint. En effet, des contenus ne sont lourds qu’au regard du temps – quantitatif et qualitatif lui aussi – dont on dispose pour les enseigner. Et cela pose évidemment la question des horaires mais aussi celle des conditions de travail.

4. Les conditions d'enseignement

Le temps

Premier item à prendre en compte, comme nous venons de le mettre en exergue : le temps. L’affirmation proposée par le SNALC sur ce point, dans son questionnaire est : « Vous ne disposez pas du nombre d’heures nécessaires ». Et les réponses de participants à notre enquête sont sans appel. 85% sont d’accord, distribués comme suit : 59% tout à fait d’accord et 26% plutôt d’accord. A l’inverse, seuls 4% sont pleinement satisfaits du temps d’enseignement dont ils disposent pour transmettre les contenus.

Il s’agit donc de s’interroger sur les moyens pouvant permettre de dégager des heures d’enseignement. Une piste pourrait être tentante, consistant à privilégier un type d’enseignement plutôt qu’un autre selon deux modèles possibles :

  • Depuis quelques années, les heures de disciplines générales ont été réduites et l’on a besoin de citoyens éclairés
  • Ce que doit former la voie professionnelle, ce sont des professionnels.

Evidemment, agir ainsi serait délétère pour l’ambiance dans les établissements mais aussi néfaste pour les élèves, de l’avis du SNALC. Et ce n’est visiblement pas ce vers quoi tendent les professionnels du terrain qui plaident pour un surcroît d’heures dans les disciplines générales à 79% et à 70% dans les disciplines professionnelles.

La question désormais doit consister à voir comment dégager du temps d’enseignement. Evidemment, le SNALC réclame que les dotations soient revues et que l’horaire élève soit repensé. Mais notre syndicat est conscient que ce type de demande soit prend des années à trouver une réponse satisfaisante soit se voit opposer une fin de non-recevoir. Il faut donc trouver d’autres pistes.

Et dans ce cadre, il est possible d’écarter celle de la réduction de la durée des Périodes de Formation en Milieu Professionnel. Les professeurs ne demandent pas qu’elle soit diminuée.

Notons au passage qu’ils ne souhaitent pas non plus voir celle-ci augmenter. Ils sont 79% à ne pas vouloir une évolution dans le domaine des PFMP. D’une part, ils sont conscients de leur intérêt dans la formation des futurs professionnels qu’ils ont en face d’eux. Mais d’autre part, ils savent qu’une nouvelle diminution du temps d’enseignement serait néfaste pour leurs élèves.

Le SNALC les rejoint et demande donc au Ministère de revoir sa copie concernant la nouvelle réforme des lycées. Il ne faut pas que l’année de Terminale soit tronquée. Mettre les épreuves en mars pour mettre ensuite des PFMP pour les uns et une propédeutique mal fagotée pour les autres ne peut pas avoir d’effets positifs sur le niveau des diplômés. L’équilibre entre enseignement – vrai enseignement – et PFMP est ce qui fait la force ou ce qui peut déstructurer totalement la voie professionnelle. Cet équilibre est précaire et demande une réflexion sérieuse.

Mais gagner du temps peut aussi être fait en se débarrassant de ce qui en coûte sans avoir un intérêt pédagogique fort.

Des dispositifs mal vécus et peu utiles

Un moyen de donner plus de temps, donc d’améliorer les conditions de travail des personnels et d’apprentissage des élèves, serait de se délester de deux dispositifs jugés inopérants par la majorité des collègues : le chef d’œuvre et la co-intervention imposée. A l’instar du Grand Oral dans la voie générale et technologique, le chef d’œuvre nécessite une préparation et un accompagnement très individualisés qui sont particulièrement chronophages. 

Or, le rendu n’est pas toujours très convaincant ; quant à l’apport que ce dispositif constitue dans l’apprentissage de l’élève, il est très limité. C’est pour cela que 81% des professeurs ayant participé à notre questionnaire sont favorables à sa disparition.

Les proportions concernant la co-intervention imposée sont sensiblement les mêmes. Et cela ne doit pas nous étonner. En effet, si le travail en commun peut avoir un intérêt, il nécessite une construction commune qui demande du temps et son efficacité est relative. En effet, dans certains esprits, faire, par exemple, une heure de mécanique en co-intervention avec le français revient à faire à la fois une heure de mécanique et une heure de français. Or, les retours dont nous disposons montrent qu’il n’y a pas adition. Il y aurait même plutôt soustraction. C’est en ce sens que le SNALC préconise de laisser la possibilité de la co-intervention en prévoyant un volant de moyens, mais sans l’imposer. Cela permettrait des projets, pourquoi pas ponctuels lorsque cela correspond à un besoin, tout en évitant de rogner sur des enseignements sans avoir une construction volontaire et acceptée.

L’ambiance de classe

La notion du temps d’enseignement est, du point de vue quantitatif, une donnée centrale dans l’élévation du niveau. Mais si ce temps n’est pas qualitatif, il ne peut être mis à profit. Il convient donc de s’intéresser aux éléments concernant la classe.

Premier élément à prendre en compte, les effectifs. Bien sûr, en regardant les chiffres bruts, le taux d’encadrement dans la voie professionnelle, au regard de celui de la voie générale et technologique, est très satisfaisant. Seulement, le public concerné n’a pas forcément les mêmes habitudes de travail ni les mêmes besoins. 

Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que, relativement aux élèves à qui ils ont la charge de transmettre, les professeurs de lycée professionnels soient majoritairement d’accord lorsque l’on emploie l’expression de « classes trop chargées » (71%). L’expérience et la recherche se rejoignent sur un point : moins les effectifs sont importants plus la qualité de la transmission augmente. C’est un élément qui doit aussi être pris en compte dans la voie professionnelle.

Elément fort intéressant et très surprenant, les participants à notre enquête dans les lycées professionnels, dans une majorité tellement grande qu’elle frôle l’unanimité, nous signalent une trop grande hétérogénéité des classes. Ils sont en effet 93% à être d’accord avec cette expression, dont 71% tout à fait d’accord. Cela tord le coup à une idée reçue consistant à penser qu’il y a un « profil voie professionnelle ». Nous n’irons pas ici dans le détail, mais un travail sur l’orientation doit avoir lieu pour s’assurer que les élèves qui intègrent une spécialité de la voie professionnelle en ont à la fois l’appétence et les moyens – en termes de bagage et en termes cognitifs – afin d’éviter cette trop grande hétérogénéité. Le collège modulaire tel que proposé par le SNALC pourrait limiter ce type d’écueils.

Il est d’ailleurs à noter que le pourcentage de professeurs mis en difficulté par la gestion de l’inclusion est sensiblement le même. La question d’une inclusion raisonnée s’applique donc dans les lycées professionnels comme dans les autres EPLE et écoles. Elle accroît l’hétérogénéité de manière importante et demande donc une réflexion et des moyens.

Au final, tous ces éléments concourent à rendre le climat au sein des classe peu propice à l’enseignement. Et il n’est pas étonnant que 77% des professeurs considèrent avoir des difficultés dans ce domaine. Pire, seuls 3% d’entre eux ne sont pas du tout d’accord pour dire que le climat est difficile à gérer dans leur classe. Or, et le consensus est grand sur cela, le climat de classe est un facteur nuisant à l’apprentissage. 

En effet, les élèves ayant besoin de concentration n’ont pas les conditions nécessaires à l’acquisition et le professeur perd du temps à tenter de ramener le calme. Du temps pédagogique perdu, donc.

5. Des solutions à mettre en place

Dans l’acte d’enseigner

Nous l’avons vu, la suppression de certains dispositifs inutiles et un travail sur les programmes seraient des pistes à exploiter. D’ailleurs, l’idée de revoir les programmes est clairement vu comme un vecteur d’amélioration. Les professeurs de notre questionnaire sont 70 % à être dans une telle demande. Etant donné les éléments vus en amont, retravailler des programmes dans le sens de contenus plus axés sur les savoirs pourrait être de bon aloi.

Mais tout autant que les contenus, la manière de les dispenser compte. Ainsi, nos collègues seraient favorables à certaines évolutions allant dans le sens d’une meilleure prise en compte des besoins des élèves.

En premier lieu, le fait d’instaurer – ou de maintenir lorsque cela existe déjà – des heures d’accompagnement personnalisé. Les professeurs sont favorables à ce dispositif à 83 %. Mais cela implique des moyens pour que être pratiqué dans de bonnes conditions, c’est-à-dire avec des effectifs adaptés à la pratique pédagogique.

A défaut de pouvoir organiser des temps d’accompagnement personnalisé, 49 % des professeurs sont favorables à l’idée d’une différenciation pédagogique au sein de la classe. La part de professeurs tout à fait convaincus reste largement minoritaire cependant sur cette question avec 14 %. Il en est de même pour ce qui est de la coopération entre élèves.

A noter que le SNALC interrogeait aussi dans son questionnaire sur l’intérêt d’intégrer plus de numérique dans la pédagogie, encore souvent présenté comme un vecteur de meilleure acquisition pour les élèves. Les professeurs sont majoritairement opposés à cette proposition.

Enfin, l’élément qui reçoit le plus de votes favorables concerne un élément qui est pourtant censé diviser : rétablir l’autorité du professeur. 95 % des professeurs sont d’accord avec cette idée, dont 72 % à être tout à fait d’accord. Nous avons vu dans la première partie de cette analyse que les professeurs ont une attitude de professionnels dans leur approche et dans leur préparation.

Il convient donc de leur redonner pleinement l’autorité que l’institution s’est évertuée à leur retirer, à la fois par des doctrines pédagogiques – sans doute mal interprétées parce que mal expliquées, comme l’idée du centrage sur l’apprenant – mais aussi par des comportements sur le terrain les remettant en cause lorsqu’ils punissent, demandent des sanctions ou même notent simplement honnêtement un travail.

Dans l’évaluation

Consubstantiel de l’acte d’enseigner, mais aussi de l’autorité octroyée au professeur, l’acte évaluatif fait partie des leviers pouvant permettre une amélioration du niveau. Dans l’expression « exigence des savoirs », le volant exigence passe aussi par la manière dont on évalue.

A ce titre, l’examen, qui est l’aboutissement de l’enseignement au lycée, doit évoluer. La suppression des CCF – qui ne sont jamais réellement des CCF, mais plutôt des périodes d’examens anticipées et locales – serait une évolution souhaitée par les professeurs. L’idée peut sembler éculée, mais l’examen de fin d’année donne plus de robustesse à l’évaluation et plus de solennité.

Les élèves ont une échéance qui n’est pas locale ni évaluée par leur enseignant, cette personne qui les connaît et auquel ils peuvent prêter une forme d’affect. Cette suppression aurait aussi l’avantage de rendre du temps pédagogique car l’organisation de ces CCF et leur positionnement anticipé rognent sur ce temps pourtant précieux.

L’examen, outil de pilotage pédagogique s’il en est, est perçu comme devant évoluer sur d’autres points. Les professeurs considèrent qu’il faut, d’une part, des sujets d’épreuves plus exigeants et, d’autre part, des grilles et des barèmes moins bienveillants. Les chiffres sont éloquents. Le SNALC considère que ces deux axes auraient plusieurs avantages,.

Ne nous y trompons pas ; si 76 % des professeurs de lycée professionnel sont favorable à plus d’exigence dans les sujets d’examen et si 86 % prônent des grilles et des barèmes moins bienveillants, ce n’est pas parce que ce seraient des monstres ravis de voir échouer leurs élèves par malveillance. Ce qui s’exprime ici, c’est qu’en dévoyant le concept de bienveillance, l’institution a diminué toujours plus les exigences. Or, ce faisant, elle a participé à un déclassement de la voie professionnelle, tout en ayant un discours la présentant comme une voie d’excellence. Or, ce que demandent nos collègues et ce que le SNALC réclame depuis des années, c’est d’avoir des diplômes avec du sens par leur exigence justement calibrée, par respect pour les élèves mais aussi par respect pour les professeurs.

En effet, on peut construire des programmes lourds et mettre en place des aides ; si l’image donnée par l’enseignement et le diplôme est qu’il est possible de réussir sans avoir de l’exigence et sans fournir un travail au long cours, le message n’est pas bon.

Cette exigence, à la fois dans l’enseignement et dans l’évaluation doit aussi passer par la voie de l’orientation. Il faut que les professeurs, par le biais du conseil de classe, puissent être ceux qui, avec professionnalisme et au regard des acquis de l’élève et de son évolution dans chacune des disciplines, lui signifient s’il est en mesure ou non de poursuivre dans le niveau supérieur. Sur ce point, 92 % des professeurs sont en accord et seul 1% n’est pas du tout d’accord.

6. Conclusion

Face aux axes d’amélioration qui transparaissent dans l’enquête du SNALC, il apparaît plus que clairement que la réforme de la voie professionnelle récemment mise en place et la réforme des lycées professionnels en cours, ne répondent en rien aux attentes ni aux diagnostics des professeurs qui sont pourtant ceux qui connaissent le mieux les élèves et leurs besoins.

Il est temps que le Ministère de l’Education nationale tienne compte de la parole des professionnels qui, contrairement à ce que certains pourraient laisser penser, ne sont pas uniquement demandeurs de moyens – même si ceux-ci doivent servir à une meilleure rémunération et à de meilleures conditions d’exercice, cela ne devrait même pas poser question – mais savent parfaitement ce qui peut faire réussir leurs élèves.


Un extrait de cette enquête est paru dans la revue du SNALC Quinzaine Universitaire n°1483 du 8 décembre 2023

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