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Jean-Rémi GIRARD

Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1483 du 8 décembre 2023

Alors que la dernière enquête PISA confirme la crise de notre système éducatif et que le ministre vient de faire de nombreuses annonces suite à sa mission « exigence des savoirs », est-on enfin en train de mettre la transmission des savoirs au premier plan ? Notre ministère s’était surtout complu ces dernières années dans le tout compétences, et nettement moins dans le domaine de l’exigence. Pensons à l’abandon quasi définitif du redoublement sans qu’aucune alternative ait été mise en place, par exemple. Non pas que le redoublement soit la panacée, mais le passage automatique de classe en classe sur le grand tapis roulant du système, et ce, quel que soit le niveau de l’élève, l’est encore moins. De ce point de vue, rendre le pouvoir de décision aux professionnels que nous sommes est un signal positif, bien au-delà du débat sur l’utilité ou non du redoublement.

Il faut dire que les alternatives au redoublement coûtent cher : il faut davantage d’enseignants, moins d’élèves par classe, des heures en petits effectifs. La « prépa-lycée » annoncée par Gabriel Attal, qui correspond aux propositions du SNALC, ne se fera pas à moyens constants, et encore moins en supprimant des postes. On ne fera pas une École de qualité en ayant comme principal objectif les économies budgétaires, et nous demandons que la volonté affichée de créer des groupes et des années propédeutiques créent un « choc des salaires » et un « choc des ressources humaines ». Prenez l’école inclusive : le dernier projet en date part du principe que le bon taux d’encadrement est d’un personnel AESH pour 4 à 5 élèves en situation de handicap en moyenne. On ne nous fera pas croire que la priorité est l’accompagnement de l’élève et la compensation de son handicap : la priorité, ici, est d’accueillir pour pas cher.

En effet, notre employeur, qui peut être si exigeant quand il s’agit de nous évaluer et de nous contrôler, a longtemps donné dans le laxisme et dans la poussière-sous-le-tapis pour tout le reste. Alors que Gabriel Attal vise fort justement à renforcer la place du diplôme du brevet, sa consœur Carole Grandjean supprime 4 semaines de cours en terminale professionnelle. L’année scolaire préparant au baccalauréat durerait ainsi… 22 semaines. On est passé du bac pro 4 ans au bac pro 3 ans, et maintenant au bac pro 2,5 ans, avec plus de 200 heures de cours en moins pour un élève de lycée pro sur sa scolarité. L’exigence n’est clairement pas au rendez-vous pour ces élèves-là, d’où l’appel du SNALC à la grève le 12 décembre contre la réforme de la voie professionnelle.

Le SNALC, qui veillera à ce que beaucoup d’annonces intéressantes du ministre ne fassent pas pschitt, tient à rappeler que l’état dégradé de notre École n’est en rien dû aux personnels. Si l’on n’arrive pas à recruter car nous sommes, entre autres, mal payés, ce n’est pas la faute des personnels, mais celle de l’employeur.

C’est pour ces raisons, et pour bien d’autres, que le SNALC est un syndicat exigeant, et un syndicat qui défend l’exigence. Car notre ministère est le premier employeur de France. Car l’accomplissement de nos missions permet à la République d’exister et de perdurer. Car nous sommes des professionnels, et que nous devons être traités comme tels. Plus le SNALC pourra compter sur vous, et plus le tapis sera soulevé et la poussière montrée dans tous les grands médias sur lesquels, plus que jamais, nous portons votre parole. Et plus vos idées, qui sont majoritaires, comme le montre notre grande enquête, auront la chance d’être entendues et pourquoi pas… enfin mises en œuvre. La référence très claire au projet de collège modulaire – inventé par le SNALC – en est la preuve.