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Jean-Rémi GIRARD

 

Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1462 du 18 février 2022

 

C’est Cédric Villani qui a mis le feu aux poudres : la réforme du lycée aurait des conséquences catastrophiques sur l’enseignement des mathématiques. Souvenons-nous qu’à sa mise en œuvre, le ministre, avec le même Cédric Villani, prétendait qu’il y avait des mathématiques dans le tronc commun de la réforme, grâce à la création de l’ « enseignement scientifique ». Il suffisait pourtant de lire le programme pour se rendre compte que c’était un mensonge. D’ailleurs, d’après les statistiques du ministère lui-même, cet enseignement est assuré à 93 % par des professeurs de physique-chimie et de SVT. Il aura quand même fallu longtemps pour que les concepteurs de la réforme donnent raison au SNALC, qui avait pointé du doigt ce problème dès l’origine. Comme quoi, le dialogue social et l’écoute des personnels, ce n’est pas juste pour faire joli.

Aujourd’hui, si les élèves peuvent trouver un parcours scientifique tout à fait valable (avec toujours l’écueil de l’abandon d’une des spécialités en fin de première, qui est en train de tuer les sciences de l’ingénieur), le vrai problème est sur les autres élèves, qui suivaient auparavant un enseignement de mathématiques pour s’orienter vers les sciences sociales, l’économie… Désormais, la majorité des élèves qui prennent une spécialité SES en Première ne prennent pas d’enseignement de mathématiques avec. Avant, la série ES et une partie de la série L assuraient une formation équilibrée de ces élèves, avec un programme de mathématiques plus « pratique » et qui était très apprécié des collègues. En termes d’orientation, les élèves se ferment beaucoup de portes, et les familles n’en ont souvent pas conscience, car on leur a faussement vendu un système de libre choix, où toutes les combinaisons seraient valables.

Plutôt que de remettre en cause nos grands mathématiciens, nos sociétés savantes et les journalistes qui alertent sur le sujet, le ministre ferait mieux de regarder les chiffres de son propre ministère, qui sont sans appel, et pas uniquement sur les mathématiques. Oui, sa réforme a fait fortement diminuer le nombre d’heures de mathématiques, la proportion d’élèves qui font des mathématiques, et la proportion de filles qui font des mathématiques. Oui, sa politique de soutien aux langues anciennes au lycée a fait diminuer le nombre de latinistes de 15 %, et celui d’hellénistes de près de 30 %. Oui, sa réforme éducative des trois voies du lycée a dissimulé près de 8000 suppressions de postes dans le second degré alors que le nombre d’élèves augmentait. Oui, la charge de travail des personnels, en particulier dans les directions d’école et les vies scolaires, s’est accrue depuis l’arrivée de la pandémie, sans qu’aucune rémunération ne vienne reconnaître l’investissement de l’ensemble des personnels. Oui, les AESH sont toujours très mal payés. Pour augmenter les heures supplémentaires et dégrader les conditions de travail, il y a du monde ; mais pour faire une « revalorisation historique », il n’y a en réalité eu personne.

Si le SNALC a pu constater une évolution dans les modalités de dialogue — la proximité d’élections y étant sans doute pour quelque chose — il n’en oublie pour autant pas les chiffres du bilan du quinquennat. Certes, il y a les chiffres des effectifs des CP-CE1 en éducation prioritaire et celui de la prime REP+, ou bien encore ceux figurant dans l’accord sur les personnels administratifs que nous avons signé… mais il y a aussi le chiffre en bas à droite de votre feuille de paye, le chiffre des démissions et ruptures conventionnelles, le chiffre de votre temps effectif de travail. Le SNALC continuera donc de porter votre parole et vos revendications, et de lutter à tous les niveaux pour que le compte soit enfin bon et que les personnels bénéficient d’un meilleur traitement.

 

 

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La Quinzaine universitaire n°1462 est accompagnée d’un supplément spécial Mutations INTRA-académiques (second degré) : en libre téléchargement sur le site du SNALC