Les crises favorisent d’ordinaire une effervescence intellectuelle et artistique. Il n’en est rien avec celle du COVID qui, en outre, a accentué la déliquescence de l’enseignement. Son redressement exige la mobilisation de tous, dont notamment les agrégés.
Des chefs-d’oeuvre sont souvent nés au coeur des grands cataclysmes. De la peste naquirent les fresques de La Chaise-Dieu, des guerres de religion, les Tragiques. L’Occupation, malgré les pénuries, les arrestations, le couvre-feu, la censure, vit fleurir Huis clos, Les mouches, Antigone, Les Enfants du Paradis. Mais les fleurs du COVID restent encore à écrire.
Pourtant la culture et la pensée disposent aujourd’hui de moyens autrement plus puissants que ceux dont bénéficiaient les intellectuels en 1940. Le numérique devait abolir les barrières du confinement et l’homme cloîtré mais paradoxalement cosmopolite se serait nourri chez lui des créations artistiques et intellectuelles du monde entier. En fait, des plates-formes commerciales ont surtout diffusé des séries. Et, en matière de culture, c’est le bon vieux livre qui l’emporte. Dispensons donc du port du masque les enfants pour qu’ils apprennent à lire correctement !
L’école, pour sa part, devait relever le défi et, via la transition numérique, entrer dans le troisième millénaire. En réalité, la pandémie a accéléré le délitement de notre système d’éducation, commencé par la réforme du collège et poursuivi par celle du lycée. Il n’y a pas si longtemps, on dénonçait le contrôle continu au brevet, le taux exorbitant de succès au bac. Aujourd’hui on a le bac en contrôle continu et des épreuves de spécialité tronquées. Nos futurs bacheliers sont-ils préparés aux études supérieures ?
Au sortir de cette crise, l’enseignement a besoin d’un projet de remise à niveau et de requalification pour lequel il faudra mobiliser les professeurs et en recruter. L’erreur serait de priver des agrégés l’enseignement secondaire au motif que leur niveau universitaire les en éloigne. Au contraire, ils peuvent lui redonner les connaissances et la culture générale, « véritable école du commandement », celle qui a manqué aux gestionnaires de notre crise.
Article extrait de la revue du SNALC, la Quinzaine universitaire n°1462 du 18 février 2022