Mot du président
Jean-Rémi GIRARD
Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1477 du 12 mai 2023
À voir la politique menée depuis un an à l’Éducation nationale, notre ministère fait l’effet d’un poulet sans tête qui continue de courir dans tous les sens, sans rime ni raison.
Grandes annonces du président de la République qui feraient presque oublier qu’il existe un ministre, réforme du collège absolument délirante, réforme de la réforme de la réforme de la voie professionnelle, bac en mars, nouvelles charges de travail pour des directions d’école épuisées, inclusion scolaire hors de tout contrôle et de toute dimension humaine… rien ne va.
Imaginez un ministre qui aurait déclaré publiquement avoir mis ses enfants dans l’établissement privé le plus huppé qu’on puisse imaginer. Imaginez ensuite ce même ministre partir en croisade contre le manque de mixité sociale entre les établissements publics. À l’Éducation nationale, c’est possible ! On fait le contraire de ce que l’on préconise, et on préconise uniquement des choses dont on sait qu’elles ne changeront rien, voire qu’elles aggraveront l’existant.
De même, voyez-les tous, la main sur le cœur, des trémolos dans la voix, prétendre venir au secours des élèves en situation de handicap. Et admirez-les maltraiter les AESH et les enseignants dans le même temps, et vouloir désormais fusionner les métiers d’AED et d’AESH, car les spécificités professionnelles des uns et des autres n’ont visiblement aucune importance. Ou regardez-les contribuer chaque année à accroître la crise des recrutements tout en assurant que chaque heure de cours perdue sera désormais remplacée. Des élèves manquent 4 mois de français ou 6 mois de mathématiques ? Ils font la chasse aux vilains professeurs qui partent pour une fois en formation afin que l’heure de SVT soit assurée au pied levé par un collègue d’anglais qui traînait par là et qui n’a même pas la classe. Et dans le même temps, on détruit l’année de terminale avec un bac qui occasionne des pertes d’heures de cours et un absentéisme des élèves jamais vus du fait d’un calendrier idiot et anti-pédagogique.
On pourrait multiplier les exemples à l’envi. Mais n’oublions pas que dans ce poulet sans tête, certains réflexes demeurent. Le réflexe budgétaire, pour faire croire qu’on fera mieux avec moins. Mieux de cours avec moins d’enseignants. Mieux d’inclusion avec moins d’AESH et moins de places en instituts spécialisés. Mieux de numérique avec moins d’heures de technologie.
Le SNALC est là pour apporter des neurones en bon état de marche afin que le poulet aille enfin dans la bonne direction. Pour rappeler que le chantage au « travailler plus pour gagner plus » envers un métier paupérisé relève d’une volonté de nuire sciemment à des êtres humains. Pour signaler que même en affichant de belles intentions, on ne peut réformer perpétuellement une voie professionnelle qui a surtout besoin de souffler et de faire le bilan de tous les changements passés pour éradiquer ceux qui ont aggravé les choses. Pour faire preuve d’humanité, car on ne peut avoir ouvert le dossier de la direction d’école suite au suicide d’une collègue surmenée de travail pour aboutir à des charges de travail supplémentaires.
Chaque fois que le ministère délire, le SNALC se bat pour le ramener à la raison, pour montrer la réalité des choses aux médias et aux citoyens, avec de plus en plus d’efficacité et de succès. Que ce soit dans votre travail au quotidien comme dans les grandes orientations nationales, le SNALC indique la bonne direction, et plus nous serons nombreux à la pointer du doigt, plus nous augmenterons nos chances de finir par nous y rendre.