40 ANS D’EPS À L’EN : les transformations disciplinaires, un bilan inquiétant !
Détachée du Ministère des sports en 1981, l’EPS s’est éloignée d’une logique sportive. La révolution de l’évaluation au bac en 1983 est à l’origine des profondes transformations de la discipline depuis 40 ans.
En intégrant les conduites motrices, les connaissances, la participation et le progrès, l’EPS a rompu avec la performance exclusive, les activités barèmées (athlétisme, natation, gymnastique) et les tables Letessier. La discipline a pu s’intéresser à d’autres objets d’enseignement, à tous les élèves par des approches différenciées, et à d’autres activités, nouveaux moyens de formation. Moins performative, moins élitiste, la discipline est devenue moins discriminante. La mixité s’est généralisée. Plus ouverte culturellement, notamment aux pratiques artistiques, et intégrative scolairement elle s’est vue dotée d’une 4ème heure d’enseignement en 6è. Elle devient aujourd’hui inclusive.
Mais l’introduction des connaissances en EPS a ouvert une boite de pandore. Il ne s’agissait plus simplement de s’intéresser au corps, à l’éducation du physique, mais aussi au cortex et à son éducation par le physique. Tout en EPS est devenu savoir, savoir-faire, savoir être. La théorie de l’information et le cognitivisme ont centré la didactique et la pédagogie sur les processus décisionnels et conceptuels, les projets. Il s’agissait de faire apprendre des principes opérationnels, de gestion, de méthode, des rôles moteurs, transférables (IGEPS) ou d’étudier les APS (SNEP). Aujourd’hui l’EPS est focalisée sur le «savoir s’entraîner» et l’acquisition de «rôles sociaux». Si l’intellectualisation a contribué à sa conformité scolaire, ce mimétisme stupide a détourné l’EPS des besoins élémentaires des élèves, de sa grande spécificité, de son objet essentiel : le corps.
Pendant ce temps, en 20 ans, la jeunesse a perdu le quart de ses capacités cardio-pulmonaires. Cela questionne l’évolution de la société mais aussi l’utilité même de la matière et ce qu’elle a su proposer depuis 40 ans. Aussi la Cour des comptes en 2019, dans son rapport « L’école et le sport, une ambition à concrétiser », interrogeait la discipline sur le fait qu’elle «ne donne aucune assurance sur la capacité de tous les élèves à maîtriser un niveau général d’aptitudes physique et sportive ».
Quand on sait qu’aujourd’hui un jeune sur deux n’a que deux hebdomadaires d’EPS comme seule source d’activité physique, il serait peut-être temps de repenser les objectifs et la pédagogie de cette vitale discipline.