Entendu le 28 février en audience au Ministère, le SNALC a consulté ses adhérents en lycée afin de pouvoir appuyer ses propositions sur de vraies remontées de terrain. L’enquête de notre syndicat a ainsi permis à plus de mille enseignants de s’exprimer ; ce qui lui donne une représentativité indéniable.
MATHÉMATIQUES : COMMENT SORTIR DE L’ORNIÈRE ?
Très tôt, le SNALC avait annoncé au Ministre que les mathématiques allaient poser problème. Le simple fait que la spécialité « Mathématiques » n’est absolument pas adaptée à des profils non scientifiques, qu’ils soient littéraires ou économiques. Ces élèves ont, eux-aussi, besoin de mathématiques pour atteindre les prérequis du supérieur.
Notre syndicat a donc proposé, dans son enquête, différentes hypothèses visant à ajouter des mathématiques au lycée.
Des retours de certaines associations disciplinaires nous indiquaient que le ministère privilégiait l’idée d’ajouter une heure à l’Enseignement Scientifique (E.S.) et de flécher une heure et demi de cet enseignement à destination des professeurs de mathématiques. L’idée n’intéresse pas les collègues qui ont répondu à l’enquête du SNALC.
Ce résultat est peu surprenant lorsque l’on s’attarde sur la vision qu’ont les professeurs de cet enseignement. En ne conservant que ceux qui enseignent l’E.S., il apparaît qu’ils sont majoritairement insatisfaits des contenus à transmettre, même si le rejet n’est pas massif.
Dans le détail, il apparaît que les professeurs estiment que l’E.S. n’est pas très utile pour des élèves suivant un parcours scientifique. Ils sont moins négatifs sur l’intérêt de cet enseignement pour les profils non-scientifiques. Pour autant, il n’y a pas une adhésion forte.
La « remathématisation » passant par l’Enseignement Scientifique n’est donc clairement pas la solution privilégiée par les acteurs du terrain.
Donc, le SNALC a interrogé ses adhérents sur des hypothèses s’appuyant sur la suppression partielle ou complète de cet enseignement.
La première option proposée était basée sur une idée d’une association de professeurs de mathématiques (l’APMEP). Il s’agirait de supprimer l’E.S. pour intégrer un enseignement de mathématiques dans le tronc commun. L’idée est accueillie positivement par une majorité d’enseignants.
Pour autant, elle n’est pas la solution privilégiée. En effet, le scénario qui recueille la plus grande adhésion consisterait en une suppression de l’E.S. en Terminale afin de dégager des heures pour conserver une troisième spécialité.
La conservation d’une troisième spécialité afin d’assurer des parcours intéressants pour les élèves est clairement pour les professeurs un prérequis pour améliorer la réforme du lycée.
Et, dans un système à trois spécialités, la création d’une nouvelle spécialité « Mathématiques » qui soit destinée à des élèves ne faisant pas un parcours scientifique mais ayant, dans l’optique de leur poursuite d’études, besoin de mathématiques, est une idée qui séduit particulièrement les professeurs.
En réalité, les mathématiques ne sont qu’un élément dans une structure dysfonctionnelle. Très tôt, le SNALC – comme d’autres organisations – avaient pointé du doigt de nombreux problèmes à corriger.
DES REMISES EN QUESTION STRUCTURELLES
En premier lieu, c’est l’organisation du nouveau lycée en trois parties (tronc commun, spécialités et enseignements optionnels) qui est mal vécue par les enseignants.
L’explication apparaît dans le Verbatim de l’enquête du SNALC. C’est la disparition du groupe classe qui est le nœud du problème. En effet, les professeurs ne retrouvent pas une dynamique de classe qui pouvait exister précédemment. En outre, le suivi de l’élève et le travail en équipe pédagogique sont devenus impossibles. Cet ensemble d’éléments engendre un rejet de la réforme. Ainsi, pour le SNALC, les solutions favorisant un retour du groupe classe seraient les bienvenues.
En substance, une évolution possible est particulièrement soutenue par les professeurs qui ont répondu aux questions du SNALC. Il s’agirait de ne pas se contenter de proposer des spécialités de manière totalement libre et – osons le mot – anarchique. En effet, les élèves les plus éloignés du système scolaire peuvent se retrouver à faire des choix bloquants pour leur avenir, en mêlant des spécialités qui ne constituent pas un parcours cohérent et leur fermeront des portes. Donc, la solution consisterait à construire des « menus » mais dans un nombre suffisant pour ne pas reproduire les filières telles qu’elles existaient juste avant la mise en place de la réforme.
Au centre de la réforme se trouve la question des programmes. Sur ce point, les avis des professeurs qui ont répondu à notre enquête confirment ce que le SNALC dit depuis quatre ans dans ces échanges avec le ministère.
Si les programmes sont jugés intéressants dans l’ensemble, ils sont très compliqués à tenir. D’aucuns objecteront sans doute que la crise sanitaire peut avoir eu un effet sur cette vision. Cependant, le problème est réellement structurel. Les programmes ont été alourdis et les élèves n’ont pas des prérequis plus solides qu’auparavant. Par ailleurs, le positionnement des épreuves de spécialités, les heures de cours perdues à cause du tunnel évaluatif qui s’étend de mars à juin sont des facteurs à prendre en compte. Ainsi, si le ministère entend maintenir l’exigence des programmes de lycée, il convient de trouver des solutions qui libèreront du temps d’enseignement et donneront aux professionnels du terrain les moyens d’accomplir leur mission.
Dernier élément structurel de la réforme du lycée, l’introduction de 40% de contrôle continu est très mal perçu par les professeurs. Ils sont 80% à s’exprimer de manière négative à ce sujet.
Il ne s’agit pas nécessairement d’une opposition basée sur un durcissement des conditions d’exercice mais sans aucun doute d’une opposition liée à la disparition des épreuves terminales qui garantissent une plus grande équité. Ainsi une majorité estime que le contrôle continu n’a pas eu d’impact sur leurs relations avec les élèves, les parents ou la hiérarchie. Pourtant, la part qui rencontre des problèmes à cause du contrôle continu est importante et doit nous interroger. En effet, 42% ont vu leur rapport avec les élèves se détériorer. Si l’on s’intéresse aux relations avec les parents, cette proportion monte à 44%. Les difficultés avec la hiérarchie concernent 29% des collègues interrogés. Le SNALC, au niveau académique, a dû intervenir à de trop nombreuses reprises parce que des chefs d’établissement convoquaient des enseignants pour des notes jugées trop basses voire modifiaient ces notes sans autre forme de concertation.
IL FAUT DONC RÉFORMER LA RÉFORME
Les acteurs du terrain, qui travaillent quotidiennement avec les élèves, sont clairement opposés à la structure de la réforme. Le ministère doit entendre leur parole.
C’est pourquoi, le SNALC demande que la réflexion mise en place sur les mathématiques soit étendue et permette d’aboutir à une remise sur la table de questions centrales :
- La création de menus dans un nombre suffisant pour que les élèves fassent des choix mais que ces choix ne puissent pas se révéler bloquants. En outre, cela permettrait de remettre en place un groupe classe.
- Le maintien de trois spécialités en terminale tout en permettant un droit à l’erreur.
- La suppression du contrôle continu afin de permettre un retour à des épreuves nationales, terminales et anonymes.