Qui voudrait la mort des lettres classiques ne s’y prendrait pas mieux. En 2024, le projet du nouveau CAPES était prometteur. Il entérinait trois épreuves écrites. Le SNALC espérait : le bon sens allait l’emporter avec un CAPES à base de français, latin et grec. Que nenni !
Par arrêté du 17 avril 2025, les sciences de l’éducation ont repris le pouvoir au ministère puisque la ministre d’État n’y connaît rien, de son propre aveu. Les savoirs disciplinaires évaluables sur des critères objectifs sont évacués pour être et remplacés par des critères issus de la « recherche pédagogique », c’est-à-dire par la conformité à une doxa pseudo-scientifique. Les ayatollas de la rue de la Grenelle peuvent respirer.
Le bal commence par une dissertation sur œuvres littéraires et œuvres d’art… En Lettres, c’est connu, nous avons une âme d’artiste. La deuxième épreuve en 4 h consiste en deux traductions, une de latin puis une de grec, le tout coefficienté 1, sur un total de 14 coefficients pour l’ensemble du concours ! La capacité de traduction, le cœur de notre métier, mais surtout la spécificité des professeurs de lettres classiques, est évaluée 0,5 pour le latin, 0,5 pour le grec : 1/28e du concours pour chaque langue ancienne ! Quelle honte !
Les plus indulgents – ou compromis – s’exclameront : « Mais il y a la 3e épreuve ! » Annoncée comme une épreuve de langue et de stylistique sur textes français ou traduits, cette invention fleure bon la didactique dès les écrits, avec « une note globale égale ou inférieure à 5 » éliminatoire. Un corpus et, au fond, un retour à la séquence didactique. Ceux qui ne s’y plient pas sont mis à la porte, sans accéder aux oraux.
Aux oraux, c’est pire : aucune traduction. Encore un oral de soumission aux dogmes, teinté d’un brushing culturel. Puis une dernière épreuve d’entretien d’embauche ! La coupe est pleine.
Gabriel Attal avait prévu de faire disparaître la didactique aux écrits et aux oraux. Elle est à présent partout avec un total de coefficients de 10,5 sur 14. Le plus triste c’est que ce type de concours fait fuir les meilleurs et ne pallie en rien la pénurie de candidats déjà alarmante. À défaut de fermer le ministère de l’Éducation, renvoyons devant les classes tous les inspecteurs qui ont fomenté un tel hold-up. Mais il y aura sans doute des dépressions… chez les élèves.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1502 du 6 juin 2025