HARCELEMENT SCOLAIRE
Compte rendu de réunion ministérielle multilatérale entre le ministre et les organisations syndicales représentatives
25 septembre 2023
THÈME
Le ministre évoque trois axes concernant le harcèlement scolaire.
L'ESSENTIEL
1) Prévention
Programme pHAre : plus de 60% des établissements ont intégré le programme. Une mission d’évaluation de ce dispositif, commandée par le ministre, par l’Inspection Générale est en cours d’élaboration. Il faut mieux toucher la communauté éducative, en particulier les parents d’élèves. Il faut donner des clés aux membres de cette communauté.
Il faut davantage de personnels autour de cette problématique, notamment de santé et sociaux. Des initiatives ont été prises pour augmenter la revalorisation (autre piste envisagée : renforcement des liens entre établissements scolaires et libéraux par exemple) et ainsi, attirer plus vers ces métiers. Ces difficultés de recrutement dépassent le cadre de notre Ministère.
2) Détection
Une action forte doit être menée lors de la journée nationale de lutte contre le harcèlement, le 9 novembre, dans une logique de responsabilisation et de sensibilisation. Une information sera destinée aux parents et les modalités d’organisation seront présentées ultérieurement.
Travail avec des pédopsychiatres sur l’élaboration d’une enquête sous la forme d’une grille d’autoévaluation (série de questions avec 3 niveaux de réponse) pour identifier des situations de harcèlement. Le ministre s’interroge encore de savoir si ce questionnaire sera anonyme ou non (mais penche pour l’instant plus pour un questionnaire anonyme et géré ensuite au niveau de la classe).
Idée d’une formation avec un socle minimal de connaissances sur le harcèlement (et lutte contre) à l’ensemble des personnels via des ressources numériques puis échange au sein des établissements.
3) Réaction
Il faut de l’efficacité et de l’humanité. Beaucoup de choses se font déjà au sein des établissements.
Le ministre évoque son souhait de mettre en place une équipe dédiée à la lutte contre le harcèlement dans chaque académie pour répondre aux parents et aux sollicitations des chefs d’établissement.
Question des sanctions. Plusieurs pistes sont à l’étude de façon générale :
– Peine de bannissement de 6 mois des réseaux sociaux en cas de condamnation
– Saisir le téléphone portable
– Création d’un couvre-feu numérique de 18h à 8h du matin par exemple
Sanction au sein de l’établissement : le ministre préfère que des sanctions plus légères soient proposées assez tôt dans les établissements plutôt que d’attendre la fin de processus. Cela n’empêchera pas des sanctions plus lourdes aboutissant à l’exclusion l’élève si besoin (éviter d’attendre sans réagir).
LE SNALC A INSISTÉ SUR…
- Mot sur le ton du courrier du rectorat de Versailles : ce manque d’empathie et d’humanité se retrouve aussi dans les courriers envoyés parfois aux personnels. Il faut changer cela.
- Le programme pHARe, qui s’est généralisé depuis 2022 dans les écoles et collèges (puis 2023 dans les lycées) a le mérite d’exister mais le SNALC émet des réserves sur certains points :
- La formation : très théorique, courte (8 journées sur 2 ans), beaucoup d’autoformation (vidéos), pas ou très peu d’échanges entre pairs.
- La méthodologie utilisée au cœur de ce dispositif, « la préoccupation partagée », n’est pas adaptée à toutes les situations, particulièrement dans les cas graves, notamment où le harceleur est conscient de ses actes.
- Suivant la taille des structures et des personnes disponibles, les équipes fonctionnent plus ou moins bien.
- Les personnels investis dans ce programme font cela en plus de leurs tâches quotidiennes. Peu de concertations. Certains référents sont parfois désignés par leur hiérarchie.
- L’institution doit œuvrer pour lutter contre le harcèlement, comme d’ailleurs elle a toute sa place pour lutter contre les discriminations (souvent liées au harcèlement d’ailleurs). Toutefois, il faut faire très attention car on demande beaucoup à l’Ecole (qui n’est pas responsable de tout), régulièrement, et sur des sujets très variés (écologie etc…). Les pressions sont très fortes pour les personnels, à tous les niveaux. Si en plus on prend en compte la politique de suppression de postes menée depuis des années et une médecine de travail très précaire et inefficace (surtout au niveau de la gestion des Risques Psycho-Sociaux), on aboutit à une situation de grande fragilité et de tensions pour les collègues. Attention à la (sur)charge mentale qu’ils subissent.
- Proposition d’une formation avec des connaissances a minima sur le harcèlement (ses réalités, la détection, comment y faire face) mais aussi sur l’écoute et l’empathie. Mais sans que cela alourdisse déjà leur quotidien.
- Il faut plus de personnel et notamment des personnels sociaux et de santé.
- Un des moyens préconisés par le SNALC pour lutter contre le harcèlement serait de réduire les effectifs par classe, ce qui améliore le bien-être de l’élève et le climat scolaire en général.
- Question des parents de victimes et de harceleurs. Il faut savoir communiquer avec les parents. Mais aussi protéger les personnels face à l’agressivité de certains parents (+ phénomène de judiciarisation des rapports qui se développe depuis plusieurs années)
- Il est indispensable de suivre les enfants victimes et les enfants harceleurs, y compris s’il y a un déplacement d’élèves, au-delà de l’année scolaire.
- Il y a des éléments sur lesquels nous n’avons aucune emprise comme par exemple la question des réseaux sociaux/ cyberharcèlement (avec des élèves parfois très jeunes s’inscrivant sur ces réseaux). Il faut sensibiliser et responsabiliser les familles.
L'AVIS DU SNALC
Le ministre veut faire bouger les choses et le SNALC partage cette volonté. Mais pour cela, il faut les moyens de ses ambitions. Il faut recruter davantage de personnels, surtout de santé et sociaux. Il faut réduire les effectifs par classe et proposer une formation pratique, efficace sans alourdir le quotidien bien chargé des collègues.
Nous attendons l’évaluation du programme pHARe par l’Inspection Générale
Si nous accueillons favorablement l’élaboration du questionnaire et la mise en place d’une équipe dédiée et formée dans chaque académie contre le harcèlement, nous avons plus de réserves quant à la journée du 9 novembre. Mettre cette journée en place part d’une démarche louable mais il ne faudrait pas que cela soit un simple effet d’affichage. Quant aux sanctions liées au cyberharcèlement (confiscation du téléphone, bannissement des réseaux sociaux etc…), nous les estimons peu efficaces vu les solutions de contournement qui existent.
Le SNALC continuera de travailler sur cette thématique et d’être vigilant sur ce qui lui sera présenté.