Avant d’entrer dans le vif du sujet, rappelons comment doivent se passer ces évaluations et quel but elles sont censées servir.
Après une phase d’auto-évaluation, l’école ou l’établissement reçoit des visiteurs qui viennent observer des cours et échanger avec les différents personnels de l’établissement et autres membres de la communauté éducative (en gros, avec des parents d’élèves). Grâce à ces deux phases d’évaluation, une sorte de rapport est établi qui permet à l’équipe de bâtir son projet, lui-aussi, d’école ou d’établissement.
Ce processus semble se dérouler plus ou moins bien selon les lieux où il a lieu. Il y a des IEN et des chefs d’établissement qui ont bien compris que les questionnaires proposés par l’Education Nationale pour la phase d’auto-évaluation ne tiennent pas la route. En effet, ils confinent à l’auto-flagellation pour les enseignants et sont de véritables enquêtes de satisfaction en direction des élèves et de leurs parents. Donc, les personnels encadrants raisonnables s’en détachent et proposent une réflexion d’équipe.
De même, concernant la deuxième phase, certaines académies ont pris le parti de proposer à des enseignants dont l’établissement a été évalué de se joindre aux groupes d’évaluateurs externes afin de visiter d’autres établissements. Et elles le font sans trier les professeurs pour ne garder que les plus dociles et les plus acquis « à la cause ».
Malheureusement, en l’absence d’un cadrage sérieux et concerté avec les organisations syndicales représentatives – le SNALC avait pourtant montré les dysfonctionnements potentiels – dans de nombreux endroits, l’évaluation est totalement dévoyée.
La première phase, grâce aux questionnaires mal ficelés, est l’occasion pour certains parents d’élèves de « casser » du professeur, confirmant ce que beaucoup de commerciaux savent déjà : dans une enquête de satisfaction, les mécontents et les « jamais contents » sont ceux qui ont le plus souvent tendance à s’exprimer…
La deuxième phase, s’appuyant sur la première, permet à certains inspecteurs de vérifier les dires des parents et tend parfois à se transformer en inspection.
Encore une fois, signalons qu’il existe des écoles et des établissements où ces deux phases se déroulent correctement. Le SNALC ne peut qu’en être ravi. Mais il n’est pas acceptable que, par manque d’un vrai cadrage, ce ne soit pas le cas partout.
Enfin, rappelons que le projet d’établissement est l’une des rares forces qui peuvent peser sur la liberté pédagogique des professeurs. Dès lors, quel que soit le résultat de l’évaluation et quelles que soient les préconisations du groupe d’expert qui sera venu visiter votre école, votre collège ou votre lycée, il sera important de veiller à ne pas vous laisser imposer n’importe quoi. Car là est sans doute – outre les errances mentionnées plus haut – le plus grand danger.
Si les évaluations d’écoles et d’établissements sont un moyen déguisé de s’attaquer, par le biais du projet d’établissement à notre liberté pédagogique, alors, à l’instar du président de la République, nous le disons : « ça ne va pas le faire ».