C’est l’objectif de ce journal d’écriture créative qui invite à démarrer une pratique d’écriture régulière en partant de son histoire, de ses goûts littéraires, de ses auteurs de référence, pour s’encourager à jeter ses propres mots sur le papier. Un chemin pour découvrir, sous une forme ludique qui évoque celle du cahier de vacances, l’auteur qui sommeille en chacun.
Invitées :
– Valérie Blondel, enseignante de français Langue étrangère (FLE) à l’Université de Bâle, en Suisse et formatrice dans des ateliers d’écriture
– Valérie de Swetschin, rédactrice et formatrice, elle anime des ateliers d’écriture auprès des étudiants des universités de Paris 2 Panthéon-Assas et d’Évry.
Elles publient Mon journal d’écriture créative, aux éditions Eyrolles.
Pascal Paradoux : 5 % d’inspiration, 95 % de transpiration : tel est le conseil de l’écrivain Martin Winckler, qui distille ses encouragements dans un MOOC, un cours ouvert et gratuit sur Internet. Donc, au boulot, pour tous ceux et toutes celles qui veulent écrire ! Ce que suggèrent aussi Valérie Blondel et Valérie de Swetchin, qui publient à la veille des vacances un cahier d’exercices intitulé Mon journal d’écriture créative. Valérie Blondel, bonjour.
Valérie Blondel : Bonjour.
Pascal Paradoux : Vous êtes enseignante de FLE et vous animez des ateliers d’écriture. Est-ce que vous pouvez m’en dire plus ? Dans quel cadre ? Ils sont ouverts à qui ?
Valérie Blondel : Oui. J’enseigne le français langue étrangère au centre de langues de l’université de Bâle, en Suisse alémanique. Et, par ailleurs, dans un cadre associatif, j’anime des ateliers d’écriture pour adolescents et enfants.
Pascal Paradoux : Mais ils veulent écrire ? Devenir écrivains ? Ou simplement s’exprimer ?
Valérie Blondel : Oui, ils sont souvent extrêmement motivés. Donc, ils viennent passer deux heures…
Pascal Paradoux : Seulement deux heures ?
Valérie Blondel : Pour écrire, oui, oui. Des créneaux de deux heures.
Pascal Paradoux : Valérie de Swetchine, bonjour.
Valérie de Swetschin : Bonjour, Pascal.
Pascal Paradoux : Vous êtes aussi professeure, vous animez aussi des ateliers d’écriture. Mais vous, c’est plutôt pour des étudiants.
Valérie de Swetschin : Oui, à la fac. Mais pas seulement. Alors je rebondis sur ce que vient de dire Valérie, et sur votre air légèrement surpris à propos des deux heures : personne n’a trois semaines pour écrire. Donc, notre mantra, c’est de dire : le temps passe vite pour tout le monde, il faut être proactif. On dit : en 30 minutes, vous pouvez écrire. Vous êtes dans le train, dans le métro ? Vous pouvez écrire. On vous donne une consigne, on vous contraint, on vous restreint… et grâce à ça, vous pouvez écrire.
Pascal Paradoux : Et les étudiants ont besoin de ça ? Est-ce que l’université leur apprend à écrire ou pas du tout ?
Valérie de Swetschin : Ça dépend. Quand ils sont en filière littéraire ou d’écriture, oui. Sinon, non. Mais les étudiants post-bac, comme les élèves en école primaire, collège, lycée… vous, moi : on pense que tout le monde a besoin d’écrire. On est obnubilés par nos écrans, nos téléphones. On a tous besoin d’écrire. C’est un vrai catalyseur, une urgence pour certains.
Pascal Paradoux : Oui, et puis l’écriture universitaire et scolaire est souvent très codifiée. Vous, vous parlez d’écriture créative. Ce n’est pas exactement la même chose.
Valérie Blondel : Pas du tout la même chose. Pas du tout le même angle. Valérie et moi animons des congrès autour de l’écriture créative avec le SNALC, un syndicat d’enseignants du primaire au supérieur. Tous les participants — enseignants, AED, AESH — vivent ces journées comme des bouffées d’air.
Pascal Paradoux : Oh là là, c’est quoi des AED, AESH ?
Valérie Blondel : Des assistants d’éducation et des accompagnants d’élèves en situation de handicap. Majoritairement des femmes.
Pascal Paradoux : Et donc ?
Valérie Blondel : Et donc, grâce au SNALC, on passe une journée avec eux. Ils arrivent à 9 h, repartent à 16 h, enchantés. Parce qu’ils ont découvert l’écriture créative.
Pascal Paradoux : Donc enchantés et transformés.
Valérie Blondel : Absolument. Tout à fait.
Pascal Paradoux : Alors comment définir l’écriture créative ? Est-ce qu’on parle de littérature, Valérie de Swetchine ?
Valérie de Swetschin : Oui et non. Il y a un sous-texte à l’écriture créative : donner envie d’écrire, mais aussi de lire. Les deux ne peuvent pas être dissociés. L’écriture créative, c’est écrire avec des contraintes. Si j’arrive dans une classe et que je dis : “vous avez deux heures, carte blanche !”, ils n’écrivent rien ou rien d’intéressant. Il faut une consigne, quelle qu’elle soit. On en propose dans notre carnet — 300 au moins — avec des contraintes de temps (15 à 120 minutes), de longueur (10 lignes, deux pages, mini-nouvelle). C’est la contrainte qui libère.
Pascal Paradoux : Donc, forte de ces expériences, vous avez imaginé ce journal d’écriture créative. Et finalement, vous revendiquez le côté “cahier d’exercices”.
Valérie de Swetschin : Tout à fait. En France, environ 3 millions de personnes tiennent un journal intime. Ces gens-là n’ont pas besoin de nous. Mais il y en a plein qui se disent : “ce n’est pas pour moi, je ne suis pas assez intello, je n’ai rien à dire”. Or un journal intime n’a pas vocation à être publié. C’est de l’introspection. On propose des pistes progressives, avec joie et bonne humeur, des extraits littéraires… mais aussi du travail sur soi.
Pascal Paradoux : Et donc, vous validez le point de vue de Martin Winckler.
Valérie de Swetschin : Tout à fait. Inspiration : 5 %. Transpiration : 95 %. Écrire, c’est du travail.
Pascal Paradoux : Avez-vous pardonné à vos parents ?
Valérie de Swetschin : Elle est dure, cette question. On a hésité à la garder. Oui, bien sûr. C’est important de pardonner à ses parents. Et à ses proches en priorité.
Pascal Paradoux : Quelle est la plus belle histoire d’amour que vous avez lue ? Valérie Blondel ? Valérie de Swetchine ?
Valérie de Swetschin : La plus récente qui m’a bouleversée, c’est *Les Ardents* d’Alice Winn. Une histoire d’amour pendant la Première Guerre mondiale. Extraordinaire.
Valérie Blondel : Je crois que c’est *Cent ans de solitude* de Gabriel García Márquez.
Pascal Paradoux : Un classique. Mais pourquoi n’avez-vous pas encore écrit de romans ou nouvelles ?
Valérie Blondel : Moi, j’écris des petits bouts.
Pascal Paradoux : Des petits bouts de quoi ?
Valérie Blondel : Des petits bouts de texte.
Pascal Paradoux : Qui peuvent faire un texte à l’arrivée.
Valérie Blondel : J’aime faire des exercices d’écriture créative. Pour l’instant, je n’ai que des petits bouts.
Pascal Paradoux : Et vous ?
Valérie de Swetschin : J’essaie de faire un long bout.
Pascal Paradoux : Donc on se retrouvera. Merci beaucoup Valérie Blondel. Merci Valérie de Swetschin.
Mon journal d’écriture créative est publié aux éditions Eyrolles. Et avant de vous procurer le livre, si vous voulez quelques questions pour potasser ou vous essayer, par exemple :
— Quel rêve souhaiteriez-vous concrétiser ?
— Avez-vous un secret que vous n’avez révélé à personne ?
— Pourquoi vous est-il arrivé de percer un secret ?
Quelques exemples issus du Journal d’écriture créative. Merci beaucoup.
De vive voix : Pascal Paradoux à la présentation, Cécile Lavolot à la programmation, Laura Pinto à la réalisation.