Déjà en 2015, la DGESCO souhaitait que le professeur «ne prépare plus ses cours, seul dans sa chambrette». Aujourd’hui, en 2024, par le biais des évaluations d’établissement comme par sa réforme des groupes en collège, le Ministère confirme sa volonté de forcer les professeurs à jouer collectif. En quoi cela gêne-t-il le SNALC ?
Posons un élément d’emblée, afin d’éviter toute interprétation hasardeuse de nos propos : le SNALC n’a absolument rien contre les professeurs qui font le choix de travailler en équipe, de produire des cours ensemble ou de bâtir des évaluations communes. La raison en est simple : il s’agit d’un choix pédagogique effectué par des collègues.
Justement – et c’est là que le bât blesse – ce à quoi nous assistions en 2015 et ce que nous retrouvons avec la réforme des groupes au collège, est en réalité une obligation à travailler forcément en parallèle avec ses collègues, avec une progression commune imposée et la contrainte de travailler de la même manière. La précédente réforme du collège prétendait mettre en place cette imposition via les EPI et d’autres dispositifs auxquels il était encore parfois possible de se soustraire. Aujourd’hui, la démarche est encore plus délétère car les professeurs de français et de mathématiques n’auront pas le choix ou, au bas mot, subiront des pressions importantes.
D’aucuns pourraient penser qu’il s’agit d’un effet pervers de la réforme, d’une conséquence qui n’était pas anticipée par les concepteurs. Or, dans un groupe de travail sur la formation des personnels de direction qui a eu lieu en juin 2024, il a été clairement posé par un membre de l’IH2EF 1 – qui est chargée de cette formation – que faire travailler les professeurs en équipe était l’un des objectifs de la réforme ; il s’agit même d’une utopie déjà ancienne.
Pour le SNALC, cette obligation de travailler à plusieurs est grave, d’abord parce que professeur est un métier intellectuel qui n’a pas besoin de ce type d’imposition. Par ailleurs, cette uniformisation nie la différence entre les classes, l’importance de la relation pédagogique – avant tout humaine – et de ce que l’on peut appeler « l’effet professeur ».
(1) IH2EF : Institut des hautes études de l’éducation et de la formation
Article paru dans la revue Quinzaine universitaire n°1492 du 6 septembre 2024