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Lettre ouverte à l’institution : la voix d’un AESH qui a jeté l’éponge

© Antonios Ntoumas from Pixabay

Très chère Éducation nationale,

Pour commencer, j’ai été AESH pendant plusieurs années. Comme j’ai démissionné de mon poste pour cause de changement de vie professionnelle, il me semblait opportun de te transmettre quelques réflexions générales sur le métier d’AESH, à partir de ce que j’ai pu observer.

Même s’il existe certaine littérature, notamment syndicale, sur le sujet, il m’a semblé important de te soumettre ici un retour d’expérience et d’aborder, de manière précise, plusieurs aspects de la profession. Il faut cependant garder à l’esprit, pendant la lecture, que celle-ci a considérablement évolué et que cette évolution est amenée à se poursuivre.

Premier point, de plus en plus d’élèves nécessitent un accompagnement par un ou une AESH. Comme tu n’augmentes pas suffisamment les recrutements, les AESH doivent accompagner des élèves toujours plus nombreux, et souvent dans une même classe, ce qui modifie incontestablement le métier. Ce phénomène peut être difficile à gérer et nuit, à mon sens, à l’efficacité et à la qualité d’un accompagnement véritablement personnalisé. Changer d’élèves de temps en temps peut certes être bénéfique pour l’AESH, mais, d’un autre côté, multiplier les AESH pour un même élève se révèle compliqué, notamment pour ce dernier. Les contraintes et restrictions budgétaires, qui impactent le nombre d’AESH embauchés, empêchent de penser un équilibre sain dans les accompagnements. Autrement dit, selon le type de trouble de l’élève ainsi que le profil et les qualités de chaque AESH, il est indispensable de faire au mieux afin que la situation ne soit pas trop difficile, autant pour l’un que pour l’autre. En ce sens, le “saupoudrage” d’heures d’accompagnement et la multiplication du nombre d’élèves à suivre par AESH rendent la situation plus complexe, souvent au détriment de l’accompagnement. L’organisation des emplois du temps change au gré des élèves à prendre en charge, obligeant parfois l’AESH à s’adapter au pied levé ; sans compter les AESH qui officient dans plusieurs établissements en une semaine, avec des déplacements récurrents et parfois compliqués.

Au vu des budgets limités, il serait prudent de rendre plus simple et accessible la possibilité de faire entendre la voix des AESH en souffrance et d’essayer de tout faire pour que la hiérarchie puisse trouver des solutions avant que l’AESH ne “craque”. Car même si les directions ont en tête cette réalité, elles ne sont pas pour autant toutes “connaisseuses” du métier d’AESH. Celui-ci se révèle en outre, très souvent, peu reconnu et valorisé.

Le second point, dans la continuité du précédent, concerne donc le manque de reconnaissance envers les AESH, qui provient sans doute de plusieurs facteurs. Les AESH ne sont pas recrutés sur concours et sont en contrat précaire, CDD ou CDI de droit public, sans aucune possibilité d’évolution de carrière. Les enseignants, quant à eux, peuvent être des contractuels ou des fonctionnaires de catégorie A ayant obtenu le concours, avec évolution de carrière (grade, échelon, changement de poste). Il y a donc une différence évidente de statut, comme de fonction (un enseignant n’est pas AESH et vice-versa, bien sûr). 

Mais la difficulté à conjuguer les talents et les compétences de chaque métier conduit à un manque de travail d’équipe. C’est souvent, me semble-t-il, à cause d’une position hiérarchique, où chacun est trop attaché à son autorité personnelle, ce qui rend l’exercice du métier difficile. J’ai vu des cas où l’on reprochait aux AESH des manquements qui ne concernaient pas leur corps de métier. Comme pour fuir ses propres responsabilités, il paraissait plus facile de mettre en cause l’AESH. De plus, la France étant très attachée aux relations de pouvoir au sein des institutions et puisque l’AESH est en bout de chaîne, au bas de l’échelle sociale et professionnelle, sa parole n’est pas toujours recueillie, son propos pas toujours bien estimé par les autres corps de métier, de direction ou d’enseignement. 

Par ailleurs, on confond parfois le travail de l’AESH avec celui de l’enseignant, alors qu’il doit y avoir complémentarité et entraide, non substitution.

Soyons clairs, la situation est difficile pour tous : l’enseignant qui reçoit l’AESH dans sa classe et qui a une classe entière à “gérer”, et la direction qui travaille, avec plus ou moins de facilité, avec les parents, en essayant aussi d’améliorer les difficultés sur le “terrain” (dans son école, son collège…). Cela n’empêche pas de dire ce qui est, pour gagner en “‘humanité”, tant dans les relations, les choix proposés et la communication, que dans les actes.

Troisième point, les AESH n’ont pas toujours accès au GEVA-Sco des élèves. Ils travaillent donc sans informations écrites sur le handicap de ceux qu’ils accompagnent. Si les textes rendent accessibles les GEVA-Sco aux AESH, bien trop souvent, au sein des écoles, on ne nous en donne pas de copies écrites, ou on nous propose de pouvoir les lire à des horaires où nous ne sommes pas dans l’école. Il me paraît opportun et même important, même si ce n’est pas une règle générale, pour intégrer l’AESH dans un réel travail d’équipe, de l’inviter aux réunions ESS où est mis en place le GEVA-Sco, et de lui fournir, en copie sur son email professionnel ou en impression papier, tous les documents permettant de mieux appréhender le handicap des enfants dont il doit suivre la scolarité. Le rapport de confiance doit l’emporter sur la méfiance ou la crainte que l’on pourrait nourrir notamment à l’égard d’un AESH susceptible d’être défaillant. Il me semble que cette façon de procéder, par la rétention d’informations, tend à infantiliser l’AESH. Il devient presque un élève de plus, sans être mis au courant de ce qu’il lui est essentiel de savoir pour faire évoluer au mieux ses pratiques.

Quatrième point, les jours de fractionnement ne sont pas toujours appliqués. En effet, certaines académies ne respectent pas la réglementation en vigueur. Pourtant, si tel était le cas, cela permettrait d’envoyer un message de respect vis-à-vis du métier d’AESH. Avec la technologie et la capacité d’adaptabilité qui sont les tiennes, chère Éducation nationale, on doit pouvoir trouver des solutions permettant aux AESH de prendre ces jours de fractionnement, auxquels ils ont droit, et sans que cela génère une logistique lourde. En démocratie, au sein de la République française, et dans les situations difficiles que nous vivons, il me semble que l’on se doit de montrer l’exemple en appliquant cette règle, favorable aux AESH, et en adaptant le service pour maintenir une continuité. De plus, comme les jours de fractionnement sont rarement au-dessus de deux jours par an et par agent, la situation ne me semble pas insurmontable. 

Choisir de ne pas le faire, c’est encourager la critique de ceux qui voient leurs droits bafoués et participer au manque de reconnaissance de leur travail. Cela favorise peut-être aussi la montée d’une grande colère, parfois extrême, dans la population, en laissant penser qu’en démocratie, notre institution est incapable d’appliquer un texte juridique qui ne présente aucune complexité. À mon sens, et c’est aussi ce que pensent plusieurs AESH avec lesquels j’ai pu échanger : le refus d’application des jours de fractionnement est ressenti, par les AESH qui en ont connaissance, comme une façon de ne pas reconnaître vraiment leur “existence”, sur le plan professionnel et personnel.

Le cinquième point, corollaire du précédent, concerne l’importance d’appliquer vraiment la règle concernant les rattrapages des heures supplémentaires que font les AESH. Là aussi, certaines académies font glisser ces heures dans les heures connexes sur l’année. Les AESH deviennent donc des personnes sous-payées, qui font des heures supplémentaires gratuitement pour toi, Éducation nationale. Cela ne devrait pas être le cas.

Le nombre souvent élevé des démissions d’AESH témoigne, à mon sens, d’un problème multifactoriel de la profession que j’ai voulu éclairer ici par mon expérience et ma réflexion, et en proposant des éléments d’amélioration.

Je terminerai tout de même par quelques pensées positives que je souhaite t’adresser.

Femmes ou hommes, enseignants, directeurs d’établissement, IEN, psychologues scolaires, ATSEM, ERSH, personnels de cantine, affectés au nettoyage ou aux activités périscolaires…, tous œuvrent du mieux possible, au regard des conditions d’exercice qui sont les leurs, et avec un dévouement remarquable. Pour le formuler autrement, je souhaitais dire ici tout l’excellent travail que j’ai pu voir dans les écoles. Mes propos précédents ont pour but de te faire entendre mes remarques et observations, en visant ce qui pourrait être amélioré sur le terrain, au sein de ton institution.

Il est capital de le dire ici : les ATSEM, personnel de mairie, peuvent être amenées à vivre des difficultés communes avec les AESH.

D’autres questions que tu connais bien, comme celle du faible niveau de salaire des AESH, concernent, quant à elles, les politiques menées par ton ministère. Des décisions peuvent et doivent être prises par nos élus, au niveau des pouvoirs législatif et exécutif.

Très chère Éducation nationale, j’espère que ma lettre ne sombrera pas dans l’oubli de la corbeille du désintérêt et de l’indifférence, mais qu’elle te trouvera sensible et attentive à ceux qui croient encore à une école inclusive digne et de qualité.

Je formule ici le vœu d’une école plus humaine, qui puisse montrer que notre société démocratique est capable d’être la plus juste et sincère possible, notamment envers ceux qui travaillent en bas de la hiérarchie, et font leur maximum pour améliorer la vie des personnes en situation de handicap.

Ton action future peut, j’en suis sûr, favoriser un élan plus positif et inclusif encore, en y intégrant, je l’espère, mes propositions.

Il me semble que, plus nous agirons dans le bons sens et l’intérêt général, en nous comportant le plus correctement possible à l’égard de tous ceux qui nous entourent, mieux se portera la société dans son ensemble.

Je te prie de croire, Chère Éducation nationale, en mon attachement indéfectible à un service public d’éducation inclusif de qualité.

Kévin, ex-AESH

15 novembre 2025