Un (énième) projet de réforme des LP prévoit que les élèves de Terminale Bac Pro qui se destineraient au supérieur pourront passer par une période de 6 semaines en fin d’année de «préparation à la poursuite d’études».
Les enseignements disciplinaires seraient partiellement abandonnés au profit d’une formation méthodologique et aux compétences psycho- sociales, sans réels programmes, ni enseignants dédiés. Le SNALC a donc interrogé le ministère. Mais qui pourrait bien former ces élèves à ces compétences ? Réponse : « les enseignants d’EPS par exemple ! ».
Il est vrai que depuis 2019, les programmes en EPS en LP visent à « former de futurs professionnels compétents » qui sachent « s’organiser pour apprendre et s’entraîner » en développant leurs « capacités à diagnostiquer, planifier » et « les compétences nécessaires à l’analyse des données pour réguler les ressources qu’il(s) met(tent) en oeuvre ». Voilà, tout est dit. Les compétences méthodologiques et psycho-sociales, autrement dénommées « soft skills », au coeur des programmes, conféreraient aux enseignants d’EPS une légitimité pour alimenter en contenus ces 6 semaines du parcours poursuite d’études.
Alors oui ! Dans le sillage du programme ProFAN, pourquoi ne pas les charger de cette formation à l’adaptabilité, à l’autonomie, à l’apprendre à apprendre, à coopérer, déléguer, être à l’écoute, à résoudre seul ou à plusieurs des problèmes, à prendre des initiatives, à décider … ? Les activités sportives sont tellement porteuses de ces savoirs-faire et savoir-être.
Eh bien non ! Pour la simple raison que l’objet fondamental de l’EPS ce ne sont pas les savoirs associés et complémentaires aux pratiques physiques et sportives. Ce qui doit rester le coeur et la priorité de la discipline c’est l’éducation du corps par l’activité physique et les apprentissages moteurs permis par la pratique de diverses activités sportives.
Faire de l’EPS une matière d’apprentissage de soft skills c’est inverser et dévoyer son sens profond. C’est faire du corps des élèves non plus l’objet de cette éducation, mais un moyen d’acquérir des compétences très prisées par ailleurs, par la culture d’entreprise, l’esprit de management et le secteur privé.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine Universitaire n°1482 du 3 novembre 2023