C’est la question du jour du Figaro, au lendemain de la nomination de l’ex ministre de la Justice à la place d’Amélie Oudéa-Castéra, restée seulement un mois à la tête du ministère de l’Éducation nationale.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Nomination d’une revenante, Nicole Belloubet, notre question du jour porte sur elle. Êtes-vous satisfait de la nomination de Nicole Belloubet au ministère de l’Éducation nationale ? Jean-Rémi Girard, bonjour. Merci d’être ici, président du SNALC, Syndicat National des lycées et collèges, des écoles et du supérieur. Un mot avant de se plonger dans le dossier Belloubet, Amélie Ouéda-Castera n’a pas résisté, est-ce de votre faute ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Je ne crois pas que ce soit uniquement de notre faute. Je pense que c’est quand même en grande partie de sa faute à elle.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Ah oui, vous trouvez ? C’était impossible pour elle de rester ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
C’était compliqué. Dès la première prise de parole, on crache sur l’école publique et sa dernière prestation à l’Assemblée nationale consistait à dire que si on fermait des classes, c’était parce qu’il n’y avait pas assez d’élèves dans les classes, ce qui manquait d’émulation, et que tous les professeurs étaient d’accord avec ça. Je pense qu’à un moment donné, il fallait quand même arrêter les frais. Ce n’était pas sérieux.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Honnêtement, bon, oui, elle a fait des erreurs de communication notamment, mais est-ce qu’elle paye un peu pour la mauvaise foi de tous les côtés ? On n’a même pas pu voir ce qu’elle faisait, Amélie Oudéa-Castera.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Ah ben, nous non plus, d’ailleurs, on n’a pas pu voir ce qu’elle faisait. On n’a pas pu la voir beaucoup.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Ah oui, vous ne l’avez pas vue ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Nous, on l’a vue une fois pendant 50 minutes, Amélie Oudéa-Castera, pendant tout le mois. Donc, voilà. Après, on est bien d’accord qu’elle n’était pas forcément dans une situation simple. Elle s’est pris les pieds dans le tapis. Bon, ben, parfois, c’est ce qui se passe en politique. Une fois encore, nous n’avons pas spécifiquement demandé sa démission.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Est-ce que ça posait réellement un problème aux professeurs et au monde enseignant que ses enfants, car c’est ça l’origine, ses enfants soient dans le privé ? Est-ce que c’est un problème qu’un ministre de l’Éducation nationale ait ses enfants dans le privé ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Ah non, ça, tout le monde s’en fiche. Ce n’est pas la première fois. D’ailleurs, Pap Ndiaye, ses enfants allaient à l’école Alsacienne.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Oui, alors je ne comprends pas.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Ce n’est pas ça, en fait, du tout le problème. Ça, c’est sa vie personnelle. Elle a ses enfants dans le privé. À Stanislas, si elle a envie, elle a la chance, elle, de pouvoir le faire. Tant mieux pour elle. Le problème, c’est qu’elle a, en fait, craché sur l’école publique dès qu’elle est intervenue. En plus, en disant des choses qui se sont révélées complètement fausses. Et ensuite, elle a passé son temps à s’excuser.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Vous me dites, Jean-Rémi Girard, que si elle n’avait rien dit à l’origine et qu’elle avait seulement expliqué que c’était son choix, point, on n’en serait pas là.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Ah oui, mais c’est ce que Pap Ndiaye avait fait. Et Pap Ndiaye, on n’a pas passé un mois sur la scolarité de ses enfants.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Nicole Belloubet, tiens donc un retour! Alors un retour pour ceux qui suivent la politique. Je ne suis pas certain qu’elle ait marqué de son empreinte l’histoire du ministère de la Justice. Mais elle a été ministre de la Justice pendant deux ans. Mais finalement, il semblerait que le ministère de l’Éducation lui convienne mieux, puisque c’est son secteur, l’Éducation nationale.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Ah oui, Nicole Belloubet, c’est quelqu’un que j’ai croisé au tout début de ma carrière de représentant syndical. C’est une femme qui a été rectrice de deux académies, qui s’est occupée des questions d’éducation dans la région Midi-Pyrénées, qui était là au tout début de Vincent Peillon sur la refondation de l’école. Moi, j’ai passé 80 heures l’été 2012 avec elle dans des réunions. C’est quelqu’un qui maîtrise les dossiers.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Vous allez pouvoir nous parler d’elle. Tout d’abord, est-ce que cela vous rassure d’avoir traité avec quelqu’un qui connaît la maison ? Parce que ce n’était pas le cas d’Amélie Oudéa-Castera, qui n’avait aucun lien a priori avec l’Éducation nationale. Ce n’était pas non plus le cas de Gabriel Attal ou de Pap Ndiaye. Si, toutefois, ils avaient une certaine connaissance de l’Éducation nationale. Mais depuis Jean-Michel Blanquer, concrètement, vous n’avez pas eu, au ministère de l’Éducation nationale, un professeur, un recteur ou quelqu’un du milieu.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, effectivement.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Ça vous rassure, ça ou pas ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Pas forcément, parce que ce n’est pas toujours quand ils sont du milieu qu’ils sont les meilleurs. Enfin, Jean-Michel Blanquer, ça a duré longtemps sur la fin, quand même. Néanmoins, quoi qu’on puisse penser de Nicole Belloubet – et nous, on a des divergences de fond avec ce qu’elle a pu exprimer sur l’éducation quand elle était justement dans le secteur de l’Éducation nationale – il y a un point, c’est qu’effectivement, le fait qu’elle soit une ancienne rectrice, fait qu’elle va pouvoir comprendre beaucoup plus vite les problèmes qu’on a sur l’organisation de la rentrée scolaire dans les collèges, par exemple. Ça, on ne va pas avoir besoin de lui expliquer pendant des heures et des heures. Elle va normalement tout de suite piger. Donc, au moins, on pourra peut-être faire les constats plus facilement.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Êtes-vous satisfait de la nomination de Nicole Belloubet à l’Éducation nationale ? C’est notre question du jour. Alors, ce matin, j’ai lu un papier dans le Figaro. Je ne sais pas si vous l’avez lu. C’est un portrait de Nicole Belloubet, Jean-Rémi Girard. Alors, vous la connaissez mieux que nous, mais je lis certaines choses. C’est une femme de gauche qui arrive très clairement, avec une vision de l’école qui ne semble pas correspondre à celle qu’a prônée Gabriel Attal pendant ses 6 mois à l’Éducation nationale et depuis qu’il est Premier ministre. Est-ce que vous aussi, vous avez l’impression qu’il y a une divergence entre les deux ? Vous qui connaissez les deux.
SNALC – Jean-Rémi Girard
De ce que j’ai connu de Nicole Belloubet, oui, c’est un peu comme si vous demandiez à Gandhi de promouvoir la violence, en fait. Nicole Belloubet, c’est quelqu’un qui n’hésitait pas à affirmer qu’il fallait moins d’heures de cours disciplinaires, moins d’heures de français, de maths, d’histoire-géo pour faire plus de projets. Nicole Belloubet, elle est opposée au redoublement, très clairement. Nicole Belloubet déteste les uniformes, etc. Donc, c’est vrai qu’il y a un côté très étonnant de se dire qu’elle a une feuille de route qui va lui arriver, qui est quand même extrêmement opposée à ce que moi, je l’ai toujours entendu dire sur le secteur éducatif.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Est-ce que vous confirmez ? J’ai ce mot qui revient souvent, il est entre guillemets dans ce papier du Figaro : “pédagogisme”. C’est une chantre du pédagogisme. C’est vrai ou pas ? Et ça veut dire quoi ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Si on lance le débat sur ce qu’est le pédagogisme…
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Oui, mais pour que les gens qui nous écoutent et nous regardent comprennent.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, c’est quelqu’un qui, globalement, sur l’autorité, s’est opposée aux cours magistraux – même si en fait, on ne fait pas de cours magistraux. En collège et en lycée, on fait des cours dialogués au mieux, quand on y arrive. Mais effectivement, c’est quelqu’un qui va être pro-compétences, pro tout ça. Je l’ai entendue tenir des discours contre l’anglais renforcé, contre les options qui donnent plus à ceux qui en ont déjà plus, ce genre de choses-là. Maintenant, c’était il y a 10-15 ans, même 20 ans, pour certaines choses. Elle n’est pas dans le même gouvernement. Enfin, la Macronie, elle connaît aussi, Nicole Belloubet, elle a été ministre de la Justice. Donc, à voir, elle ne va peut-être pas mettre ses convictions personnelles, idéologiques, au premier plan non plus. Donc, nous, on attend de voir.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Vous aimeriez quoi ? Qu’elle mette ses convictions personnelles au premier plan, comme la plupart des syndicats, ou qu’elle suive la ligne Attal ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Nous, on aimerait…
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Un entre-deux, vous allez me dire, je vous vois venir.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, nous, on aimerait que son aspect technique, qu’on lui reconnaît bien volontiers, permette que les mesures qui sont prises n’aillent pas dans le mur, parce qu’elles sont irréalisables sur le terrain, en fait.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
C’est-à-dire ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Les groupes de niveau en 6e, 5e, ça n’a pas été travaillé. Nous, on le dit depuis le début, le calendrier est beaucoup trop rapide. En ce moment même, on doit voter les répartitions horaires pour la rentrée prochaine dans les collèges. Personne ne sait comment ça marche, personne ne sait combien il doit y avoir de groupes, comment on les organise. C’est le bazar dans tous les collèges, parce que le ministère n’a pas fait son boulot.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
D’accord, vous me dites que rapidement, ce n’est pas possible, mais est-ce qu’à terme, c’est une mesure qui peut vous intéresser ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, bien sûr. Alors, probablement pas en 6e, ni en 5e, ni en 4e, ni en 3e, ça, ce n’est pas tenable, très clairement, parce que ça… Je ne peux pas vous faire toute l’organisation d’un collège, mais ça ne marchera pas. Enfin, c’est presque scientifiquement impossible de faire tenir les choses, de mettre les professeurs en barrette, en horizontal, en vertical, en diagonale, etc., avec tous les cours de français à la même heure, au même moment.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Bon, là, je vais bien vous croire, c’est vous qui êtes dedans.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Ce n’est absolument pas faisable. En revanche, effectivement, par exemple, en 5e et 4e, que la moitié de l’horaire soit en groupe avec les élèves les plus en difficulté, qui soit à effectif réduit, ça, c’est tout à fait organisable.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Est-ce que Nicole Belloubet a envie de faire ça ? Est-ce qu’elle a envie, par exemple, et vous, est-ce que vous avez envie qu’elle porte cette mesure très symbolique – en tout cas, pour l’instant – de l’uniforme.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Je ne sais pas si elle a envie de faire ça. Il faudra lui demander à elle.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Est-ce que vous en avez envie ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
On attend de la rencontrer la semaine prochaine pour ça. L’uniforme, c’est la priorité numéro 72 chez les personnels de l’Éducation nationale. Honnêtement, la priorité numéro 1, c’est déjà d’avoir des profs devant élèves. L’uniforme, ce n’est pas la question du moment pour nous.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Je vais vous rassurer. Elle avait démissionné de son poste sous le gouvernement de Raffarin lorsque celui-ci avait voulu diminuer le nombre d’enseignants. Donc, ça, visiblement, elle a envie d’augmenter le nombre d’enseignants. Ça, c’est plutôt une bonne nouvelle. Je voudrais vraiment que vous vous interrogiez sur la question de l’uniforme. Je sais que ce n’est pas votre priorité, mais c’est très symbolique et ça parle aux gens. Est-ce que vous, vous êtes pour ? Et est-ce que vous pensez que Nicole Belloubet va pousser dans le sens de Gabriel Attal et d’Emmanuel Macron ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Alors, nous, au SNALC, une fois encore, on s’en fiche de l’uniforme. On ne pense pas que ce soit une marque de totalitarisme ou de… Voilà, ce n’est absolument pas vrai. Il y a une tenue unique dans la plupart des établissements en Martinique. Ça existe en France, avant d’aller même chercher des exemples au Japon ou je ne sais où. On n’a jamais prouvé que ça avait un impact particulier en Martinique ou ailleurs. D’ailleurs, ça, en revanche, nous, ce que l’on constate dans l’expérimentation qui va être mise en œuvre, c’est que ça coûte énormément d’argent public parce que l’uniforme, ce ne sont pas les parents qui vont les payer. Ce sont les collectivités locales et l’État. Donc là, on est en train de mettre plusieurs millions d’euros juste pour 100 établissements. Plusieurs millions d’euros qui vont partir dans des vêtements. Partant de là, nous, on pense qu’il y a des priorités à avoir en termes budgétaires. L’Éducation nationale, ce n’est pas un gouffre sans fond. On ne peut pas le nourrir budgétairement jusqu’à plus soif. À un moment, ce n’est pas de l’argent bien employé actuellement.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Jean-Rémi Girard, président du SNALC, qui va répondre à cette question du jour. « Êtes-vous satisfait de la nomination de Nicole Belloubet à l’Éducation nationale ? » Je comprends, vous me dites, pour l’instant, on attend de voir. Mais là, première vue, vous êtes plutôt satisfait. Vous vous dites, bon, bah tiens, elle va suivre ce que veut faire Gabriel Attal, ce qui l’a entrepris depuis six mois à l’Éducation nationale. Ou au contraire, elle ne va pas le faire. Et donc, ça nous embête ou ça nous plaît ? Qu’est-ce qu’il en est pour vous ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Moi, je vois mal Nicole Belloubet ne pas essayer d’imprimer un petit peu sa marque quand même. Une fois encore, pour l’avoir connue, ce n’est pas…
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Elle n’est pas là juste pour vous draguer, vous, les syndicats ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Je pense qu’elle est là pour apaiser les choses, très clairement. Ensuite, ce n’est peut-être pas mon syndicat qu’elle va chercher à draguer le premier. Ça, qu’on soit bien d’accord. Néanmoins, je dirais, là, on a, à tout le moins, besoin de quelqu’un d’un peu technique. On a besoin de compétences techniques au ministère de l’Éducation nationale en ce moment. Si au moins, elle peut apporter ça, et effectivement que sur ses convictions idéologiques, ça passe au second plan, ce ne sera peut-être pas la pire ministre. Enfin, je veux dire, la pire ministre, on vient de l’avoir. Donc, je pense que ce ne sera pas pire.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Alors, vous me dites que vous êtes plutôt satisfait, visiblement, en tout cas, par rapport à Amélie Oudéa-Castera, si j’ai bien compris.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Honnêtement, en même temps, vous me mettez un ficus par rapport à Amélie Oudéa-Castera. Je suis assez satisfait aussi.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Êtes-vous satisfait de la nomination de Nicole Belloubet à l’Éducation nationale ? C’est oui à seulement 22% pour les internautes du Figaro. C’est non à 77,85%. Je pense que cette vision qu’on a pour l’instant de Nicole Belloubet ne plaît pas aux internautes du Figaro. Elle a eu des positions particulières sur la laïcité. Je lis dans le journal de ce matin, à nouveau, je m’y réfère. Elle n’aurait pas interdit les abayas, assène un syndicaliste.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Ah non, ça, elle n’aurait pas interdit les abayas, Nicole Belloubet, je vous le confirme. Enfin, c’est pas du tout, une fois encore, sa ligne idéologique, très très clairement. Maintenant, elle n’est pas Premier ministre, elle n’est pas présidente de la République. Donc, c’est possible qu’elle n’ait pas tout à fait son mot à dire sur ces choses-là. Vous imaginez, avec Gabriel Attal Premier ministre, Nicole Belloubet disant, ah ben non, finalement, l’interdiction des abayas, on arrête ? Ça n’arrivera pas, ça n’arrivera clairement pas.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Elle a des qualités, j’imagine. Est-ce que sa principale, c’est la négociation ? Est-ce que vous allez la rencontrer, discuter beaucoup, plus qu’avec d’autres ? Comment ça se passe d’ailleurs, d’acquérir un nouveau ministre : ils convoquent tous les syndicats, un par un ou ensemble ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Un par un. Il y a des audiences assez habituelles pour faire un peu l’état des lieux, pour présenter ce qu’ils veulent mettre en place, et puis pour écouter les revendications, les propositions qu’on peut avoir. C’est variable, Gabriel Attal, nous, on l’avait vu à peu près deux heures et demie, Amélie Oudéa-Castera, on l’avait vu 50 minutes. Donc, si Nicole Belloubet peut faire une heure et quart, déjà, ce serait pas mal. On aurait au moins le temps de se parler d’un certain nombre de sujets, parce que des difficultés à l’Éducation nationale, il y en a énormément. Il n’y a pas que les groupes de niveau en collège.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Je sais que vous avez un avis de prof, ou en tout cas de membre de l’Éducation nationale.
SNALC – Jean-Rémi Girard
De prof aussi, j’enseigne toujours.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Voilà, des gens qui sont à l’intérieur. Mais ce qu’avait entrepris Gabriel Attal, ça plaisait beaucoup aux Français/ Pour preuve, sa propre cote de popularité. Pourquoi, selon vous, Emmanuel Macron ne suit pas cette ligne-là avec sa nouvelle ministre de l’éducation nationale ? On jugera dans les faits, mais dans son passé, dans son histoire, elle ne semble pas être dans cette ligne-là, alors que ce sont des mesures entreprises par Gabriel Attal qui sont populaires.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Moi, une fois encore, j’attends de voir, parce que Nicole Belloubet, c’est une femme intelligente. Elle a des qualités, elle est intelligente. C’est clair, Nicole Belloubet, c’est quelqu’un d’intelligent. C’est quelqu’un qui a quand même une certaine finesse de pensée, qui a un sens politique. Moi, je l’ai vue ce matin dans le discours où elle arrivait, où Amélie Oudéa-Castéra partait. Elle a fait un discours qui ressemblait à un vrai discours de vraie ministre de l’Éducation nationale, assez clairement. Donc, j’attends de voir, parce que c’est peut-être quelqu’un qui est capable aussi, à un moment, de mettre certaines de ses convictions au second plan, de la jouer un peu plus collectif. C’est pour ça. J’ai un a priori, parce que je vous dis, je la connais depuis longtemps. Néanmoins, je ne suis pas certain qu’elle sera exactement là où on l’imagine non plus.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Jean-Rémi Girard du SNALC, deux dernières questions. Première chose, vous allez la rencontrer. Allez, une heure et quart, je vous le souhaite. Vous allez lui demander quoi ? Je suis Nicole Belloubet. Rapidement, vous me dites, OK, on veut travailler sur ces trois sujets. Ce sont lesquels ? Premièrement, si j’ai bien compris, le nombre de profs devant les élèves, c’est ça ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
L’attractivité du métier d’enseignant. Au-delà du métier d’enseignant. Ça, c’est le numéro un. On n’arrive plus à recruter. Ça, sujet numéro un. Deux : l’école inclusive. L’accueil des élèves en situation de handicap. C’est une source de souffrance chez les élèves et chez les personnels. C’est la première, aujourd’hui, je pense, dans les classes, notamment à l’école primaire. Et trois, le bien-être au travail. On va appeler ça comme ça.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Pour vous, alors ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, pour les personnels, moi, je suis un représentant des personnels. En même temps, les enquêtes du ministère de l’Éducation nationale – la dernière est sortie il y a quelques jours – montrent que c’est encore, c’est toujours une catastrophe. À un moment, il faut arriver à travailler les questions de médecine, les questions du nombre d’élèves par classe, les questions de soutien hiérarchique, d’autorité, également. Toutes ces choses-là qui permettent d’accomplir notre métier de manière agréable. Aujourd’hui, il y a quand même de moins en moins de gens qui veulent devenir professeurs et de plus en plus de professeurs qui veulent partir. Ce n’est pas normal.
Le Figaro Live – Thibaut Gauthier
Quatre ministres en deux ans, un peu de stabilité, ça vous ferait du bien ?
SNALC – Jean-Rémi Girard
Si la stabilité va avec une politique qui nous va, oui. En même temps, la stabilité, je vous dis, cinq ans de Jean-Michel Blanquer, on aurait préféré cinq mois parce que toute la deuxième partie a été quand même un petit peu pénible. Donc, nous, une fois encore, on ne fait pas de procès d’intention aux gens. On attend de juger sur les actes. S’il n’y a pas un investissement budgétaire, s’il n’y a pas un moment… C’est bien gentil de nous parler pédagogie, “on va faire les meilleures pédagogies”. S’il n’y a plus de profs pour faire les meilleures pédagogies ou même des pédagogies un peu moins bonnes, il n’y aura plus d’école. À terme, c’est vers ça qu’on va. Je pense qu’à un moment, il va y avoir de plus en plus d’absences non remplacées, de plus en plus d’élèves qui n’auront pas de profs devant eux… Est-ce ce qu’on veut pour notre pays ? Je ne suis pas certain.
SNALC – Jean-Rémi Girard
Merci beaucoup Jean-Rémi Gérard, président du SNALC, le syndicat national des lycées, des collèges, des écoles et du supérieur. Merci de nous avoir aidés à répondre à cette question du jour : Êtes-vous satisfait de la nomination de Nicole Belloubet à l’Éducation nationale ?