«Ce que j’espère, c’est que nous serons capables d’alléger [le protocole sanitaire] en septembre. Imaginez que l’épidémie reparte, ce ne sera pas le cas. Mais si les choses […] continuent à évoluer positivement comme c’est le cas actuellement, alors oui il faudra l’alléger, certainement.» Invité mardi 2 juin par Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV-RMC, le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a abordé le sujet de la rentrée scolaire de septembre, évoquant une possible évolution des mesures mises en place pour assurer la sécurité des élèves, professeurs et personnels.
Comme l’a rappelé le ministre, le protocole sanitaire en vigueur, qui mêle maintien de la distanciation physique, application des gestes barrières, limitation du brassage des élèves et désinfection régulière des locaux et matériels, date d’il y a moins d’un mois. Mais, déjà, il faut songer à la prochaine phase, qui commencera en septembre. Jean-Michel Blanquer a ainsi annoncé que son mois de juin serait consacré à «une concertation très large, avec les organisations représentatives, les parents d’élèves, les élèves, les élus, pour préparer la rentrée avec les différents scénarios».
Les syndicats, qui attendent le début de cette concertation de pied ferme, soulignent eux aussi l’importance d’envisager plusieurs hypothèses. Le virus ne sera-t-il plus qu’un mauvais souvenir à la rentrée ? Déferlera-t-il à nouveau en septembre ? Resurgira-t-il plus tard dans l’année ? «Quoi qu’il en soit, il faudra porter une attention particulière à ceux qui ont décroché, ainsi qu’aux niveaux charnières que sont le CP, la sixième et la seconde, déclare Jean-Rémi Girard, président du SNALC. Il faudra dialoguer avec le niveau d’en dessous pour savoir quels points du programme ont manqué à quels élèves.»
La rentrée se fera sans vaccin
Cette rentrée apparaît déjà comme un véritable casse-tête. D’abord parce que les établissements scolaires n’ont pas forcément le temps de la préparer : ils doivent actuellement gérer la reprise progressive des cours et son cortège d’obstacles à surmonter. «La reprise est toute fraîche. Les enseignants et personnels sont dans l’immédiateté pour répondre aux défis du ‘maintenant’, qui les accaparent totalement. Il faudra que les équipes puissent avoir du temps fin juin et début juillet pour préparer la rentrée de septembre», confirme Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-Cfdt.
Ensuite, même si la situation sanitaire s’améliore, comme l’espère Jean-Michel Blanquer, aucun vaccin ne sera prêt dans trois mois. L’ombre d’une deuxième vague continuera donc de planer au-dessus des établissements scolaires. Dans ces conditions, tous les parents accepteront-ils de renvoyer leurs enfants à l’école ? Tous les professeurs et les personnels seront-ils prêts à revenir en présentiel ? «Il faudra un régime d’exemption pour protéger les plus fragiles, estime Catherine Nave-Bekhti. Mais sans que cela pèse sur les parents».
Car ce qui est possible pour certains parents en ce mois de juin, en sortie de confinement, ne le sera plus forcément en septembre. «Beaucoup d’enfants ne vont pas à l’école ou n’y retournent que quelques jours par semaine. Pour le moment, on s’organise, mais ce n’est pas envisageable dans la durée», affirme Cécile*, mère de famille francilienne. Pour permettre aux parents de reprendre le chemin du bureau à temps complet, il faudrait que les élèves puissent tous retourner à l’école. Ce qui reviendrait à renoncer au respect de la distanciation physique à l’école.
Comment rattraper le retard?
À la rentrée, les enseignants auront fort à faire pour réduire les écarts de niveau de leurs élèves. «Les écarts dans les classes, c’est très fréquent. Là, le risque d’hétérogénéité est encore plus fort», craint la secrétaire générale du Sgen-Cfdt. Comment rattraper le retard de certains ? Faut-il privilégier un rattrapage accéléré en septembre pour ensuite commencer le programme de l’année en cours, ou lisser ce rattrapage sur toute l’année ? «Le plus grand enjeu de la rentrée, c’est que les élèves raccrochent et puissent se mettre au travail au mieux dès le début de l’année», insiste le président du SNALC.
Malgré les difficultés, les personnes interrogées par Le Figaro retiennent tout de même du positif de ces trois derniers mois, et espèrent pouvoir en tirer des leçons. «Cela n’a pas été parfait, mais personnels et enseignants ont démontré leur adaptabilité face à cette situation inédite et déstabilisante. Et nous avons constaté un changement dans les relations école-familles», assure Catherine Nave-Bekhti. Jean-Rémi Girard ajoute : «Maintenant, il faut que nous nous organisions collectivement en amont de la rentrée, pour être mieux préparés à une éventuelle deuxième crise sanitaire».
L’été s’annonce studieux pour la communauté éducative. Jean-Michel Blanquer et ses équipes du ministère de l’Éducation nationale savent qu’ils seront en première ligne en septembre. Les personnels, enseignants et collectivités locales doivent se tenir prêts à toute éventualité. Certains enfants bénéficieront des dispositifs mis en place par les autorités, notamment les «vacances apprenantes». Après près de six mois sans cours en présentiel pour la plupart des élèves, le défi de la rentrée – et au-delà, de toute l’année scolaire 2020/2021 – est de taille.
*Le prénom a été modifié
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