Dans une période d’unité syndicale face au 49-3 et à la réforme des retraites, Jean-Rémi Girard explique la position du SNALC.
Jean-Rémi Girard, président du SNALC, répond aux questions sur franceinfo le 17 mars 2023.
France Info
Merci d’être avec nous, Jean-Rémi Girard, président du SNALC, le syndicat des personnels de l’Éducation nationale. Le baccalauréat démarre dès ce mois de mars cette année. Dès lundi, les lycéens plancheront sur leurs épreuves de spécialités.
Des épreuves qui tombent au plus fort de la mobilisation contre la réforme des retraites, avec des préavis de grève pour ces journées d’examen. Vous avez publié il y a quelques heures sur le site de votre syndicat un communiqué dans lequel vous manifestez plus que jamais votre opposition au projet de réforme des retraites. Ce 49-3 a-t-il renforcé votre détermination ?
Jean-Rémi Girard
Bien sûr ! Je crois que pour beaucoup de personnels de l’Éducation nationale qui vont être impactés si cette réforme passe, il y a le fond de la réforme et la manière qui a énormément choqué. Effectivement, on a des personnels dans l’Éducation nationale qui sont extrêmement remontés. Ils ont déjà participé massivement aux précédentes journées de mobilisation et vont continuer à se mobiliser.
France Info
Les syndicats lycéens ne vous suivent pas tous, mais certains disent être prêts à vous suivre s’il le faut. Ce préavis de grève couvre l’ensemble des actions jusqu’à la fin de l’année scolaire. Ça représente quoi en termes de risques pour les élèves de collège et du lycée, qui passent notamment le brevet et le bac ?
Jean-Rémi Girard
Au SNALC, nous avons posé un préavis de grève global et général sur l’ensemble de l’année scolaire. Nous savions qu’on aurait une année un peu compliquée. Ensuite, ce que nous disons, c’est qu’avec l’interprofessionnelle qui s’est réunie hier et qui a donné un calendrier du mouvement avec une grosse journée de mobilisation jeudi prochain, nous appelons évidemment à la journée de jeudi prochain. Concernant lundi, mardi et mercredi, pour les épreuves écrites de spécialités, les actions se déterminent localement. Les collègues dans les établissements scolaires sont en train de se réunir pour décider. Le risque au niveau de l’ensemble du pays est quand même assez minime car, comme en 2019, il est possible d’organiser des surveillances, même avec un taux de grévistes parfois important. Le risque n’est pas complètement exclu, et le fait qu’il y ait eu ce 49-3 utilisé ajoute une couche d’incertitude, car on peut rentrer dans des réactions d’opposition très forte à ce qui s’est produit hier.
France Info
Pour assurer une égalité entre les candidats, votre ministre de tutelle, Pap Ndiaye, demande que dans tous les lycées, les journées de vendredi et/ou du samedi soient consacrées aux révisions des épreuves de spécialité pour les élèves de terminale. Vous estimez, comme d’autres syndicats, que c’est une improvisation de dernière minute ou vous trouvez ça bien ?
Jean-Rémi Girard
C’est bien que les élèves aient du temps pour réviser, mais c’est complètement de l’improvisation surtout dans des lycées qui sont des structures lourdes.
France Info
En fait, il répond à une demande écrite par lettre des lycées.
Jean-Rémi Girard
Nous le comprenons. L’année dernière, il y a eu des journées de révision mais annoncées beaucoup plus tôt. Nous ne demandons pas l’absence de journée de révision, nous y sommes favorables mais il faut qu’elles soient intégrées dans le calendrier scolaire dès le début de l’année. Les lycées ont planché sur leur organisation et d’un seul coup, mardi, il y a un courrier du ministre qui la modifie. Au passage, on remarque que Pap Ndiaye se préoccupe de l’égalité entre les candidats dans un bac où il y a 40% de contrôle continu. Donc ce n’est pas la journée de révision pré-épreuve de spécialité qui va remettre de l’égalité entre candidats alors même qu’on a le bac le plus local qui ait jamais existé.
France Info
Alors d’une promotion à l’autre aussi, il y a beaucoup de choses qui changent. Vous contestez le fait que ce soit dès le mois de mars, c’était en mai l’année dernière, c’est trop tôt.
Jean-Rémi Girard
C’est beaucoup trop tôt. Très clairement, les collègues nous le remontent. On l’avait déjà dit, au SNALC, en affirmant que mettre les épreuves à la mi-mars est une folie en termes de gestion du calendrier pédagogique. Les collègues ont été obligés de courir après le programme et les préparations aux méthodes des épreuves. Il y a quand même 2 mois de moins pour les préparer aux méthodes des épreuves qui vont avec les programmes.
France Info
C’est une perte de chance aussi pour les élèves.
Jean-Rémi Girard
Bien sûr, c’est plus compliqué pour tout le monde. Les élèves sont nettement plus stressés par ce calendrier. Nous parlions justement de cette période de révision quand le bac était en juin, les cours se terminaient plus tôt, les élèves avaient une plage de révision beaucoup plus importante. Et c’est aussi un calendrier qui fait perdre des journées de cours supplémentaires aux élèves de terminale, mais aussi aux élèves de seconde et aux élèves de première. Non seulement lundi, mardi, mercredi prochains, mais aussi des cours en rapport aux épreuves de compétences expérimentales, d’oraux de langue vivante, de spécialité artistique où les professeurs qui feront passer ces épreuves la semaine suivante ne feront pas cours en même temps. D’autre part, nous n’avons pas du tout récupéré le mois de juin comme cela avait été promis par Jean-Michel Blanquer.
France Info
Alors pour revenir à la réforme des retraites et à votre mobilisation, ces épreuves de spécialité qui ont lieu donc lundi, mardi, mercredi sont importantes, coefficient 16 pour chacune d’entre elles, donc c’est énorme. Elles comptent aussi pour les dossiers d’admission post-bac qui sont envoyés pour ceux qui veulent faire des études supérieures. Alors évidemment, si on veut être entendu, il faut des actions fortes, mais en termes de pénalisation de vos élèves que vous suivez et que vous accompagnez, c’est aussi important. C’est un dilemme professionnel en termes de conscience professionnelle.
Jean-Rémi Girard
Oui, beaucoup de collègues ont ce dilemme de conscience professionnelle, car ce sont eux qui ont préparé les élèves toute l’année scolaire et qui veulent, a priori, leur bien. Nous avons quand même envie qu’ils aient leur bac, c’est évident ! C’est pour cela qu’au SNALC, nous n’avons pas appelé à la grève spécifiquement lundi, mardi et mercredi. Nous nous inscrivons dans le calendrier de l’interprofessionnelle. Notre rôle d’organisation syndicale est que les collègues qui mènent des actions de grève locale soient couverts par un préavis. De toute façon, ces choses-là se décident vraiment très clairement au niveau local, ce sont les impulsions locales qui font qu’il va se passer des choses ou pas. Avec le 49.3, le gouvernement fait plus que jouer avec le feu. Il est clairement en train de se brûler et il peut y avoir des conséquences vraiment terribles. Au-delà simplement d’une éventuelle grève des personnels qui surveillent les épreuves, avec ce qui se passe dans les transports, s’il y a des blocages routiers, cela peut aussi avoir des impacts sur la capacité des élèves à se rendre tout simplement dans le centre d’examen.
France Info
Merci beaucoup de votre présence sur le plateau de la matinale, Jean-Rémi Girard, président du SNALC, syndicat des personnels de l’Éducation nationale.