Professeurs dépossédés
Notre marge de manœuvre au sein des établissements a été progressivement réduite. Notre liberté pédagogique a été amoindrie par la multiplication d’instances concoctées par des personnes qui n’ont jamais enseigné ou qui n’enseignent plus depuis longtemps. Le conseil pédagogique, création de 2005, côtoie désormais le conseil école-collège institué depuis la rentrée 2014 pendant que le conseil de cycle 3 s’est ouvert aux professeurs de collège en 2016.
La démultiplication de ces instances entraîne, en salle des professeurs, des remarques telles que « le conseil pédagogique a décidé que… », « ça a été décidé par le conseil école-collège… ». ll est vrai qu’on les utilise parfois en toute illégalité pour imposer des dispositifs comme les classes sans notes ou la mise en oeuvre de la dernière expérimentation à la mode made in Éducation nationale. En outre, lors des débats, la prise de parole de certains intervenants peut prendre du temps. D’où la tentation de considérer comme acquis un point qui a à peine été débattu ! Bref, c’est le règne de l’arbitraire. Le conseil académique des savoirs fondamentaux (CASF) est le dernier « bidule » créé en ce sens. Sa compétence à valoriser et diffuser les pratiques jugées efficaces dans l’enseignement accroît encore le risque de se voir imposer des fonctionnements pédagogiques absurdes.
Dans ce millefeuille administratif, pas étonnant que nous nous sentions dépossédés de notre pratique ! Le SNALC rappelle néanmoins que la majorité de ces instances sont consultatives et que les décisions qui y sont prises ne s’imposent pas, contrairement à celles qui sont votées au conseil d’administration.
Le SNALC dénonce le pouvoir pris par ces organes. En effet, ils sont souvent inefficaces – comme le confirment vos témoignages affligeants – et semblent avoir pour objectif premier de nous mettre au pas en nous imposant des schémas pédagogiques formatés, bien loin des réalités professionnelles. Utilisés pour dresser des bilans de nos méthodes au moyen de comparaisons statistiques, ils permettent en outre de nous culpabiliser le cas échéant.
Le SNALC vous conseille cependant d’y participer afin de les contrôler et d’éviter les atteintes à la liberté pédagogique. Pour alléger la tâche, répartissez-vous le travail entre plusieurs collègues. Faites entendre votre voix. Trop de personnes y siègent, souvent des néophytes, se taisant et laissant faire.
Le SNALC siège dans les instances académiques et nationales pour protéger votre liberté pédagogique qui, rappelons-le, est inscrite dans la loi de 2005.
Article paru dans la revue du SNALC, la Quinzaine universitaire n°1489 du 14 mai 2024