Après la révision des programmes des cycles 1 et 2 l’année dernière, c’est désormais au tour des programmes de français et de mathématiques du cycle 3 d’être actualisés en ce début d’année. Ces nouvelles versions ont été examinées lors de deux réunions multilatérales d’environ 1 h 30 chacune. Le SNALC a insisté pour que cette consultation ne se limite pas à ces premiers échanges et a demandé la tenue de nouvelles réunions avec les organisations syndicales afin d’en approfondir l’examen : plus de 50 pages pour le français et plus de 100 pages pour les mathématiques.
Globalement, ces programmes peuvent paraître structurés. Accompagnés de nombreux exemples, ils définissent clairement des objectifs par niveau, et non par cycle, conformément à une demande du SNALC qui a néanmoins émis des réserves. Certaines descriptions superflues et alambiquées abordent en effet des concepts sociétaux éloignés de l’objectif principal consistant à proposer un outil clair et fonctionnel aux professeurs. En outre, au-delà de l’aspect décousu de l’ensemble, un examen plus attentif fait apparaître de nombreux points de vigilance.
Étant donné que les contenus en soi évoluent très peu, on peut s’interroger : en quoi une nouvelle version contribuera-t-elle à favoriser les apprentissages ? Comment les professeurs vont-ils accueillir et s’approprier cette énième réécriture ? En effet, l’appropriation et la mise en application rigoureuse des programmes nécessitent plusieurs années. Or, les professeurs ont à peine le temps de se familiariser avec la dernière mouture qu’une nouvelle version leur est déjà imposée. Déstabilisant et démotivant, pour ne pas dire contreproductif.
Enfin, ces programmes sont, une fois encore, très lourds avec des exemples de réussites qui résonnent comme des objectifs à atteindre absolument. Pour le SNALC, ces exemples s’avéreront parfois inatteignables et provoqueront angoisse et sentiment d’échec pour bon nombre d’élèves et bon nombre de professeurs.
Les inspecteurs généraux qui ont rédigé cette révision en ont souligné l’objectif : améliorer le niveau de nos élèves afin que la France ne figure plus en fin de classement des évaluations internationales. Pour y parvenir, les contenus ont donc été inspirés par ceux des pays de l’OCDE les plus performants. Malheureusement, tenter de faire croire que changer les contenus permettra de faire remonter la France dans les résultats des évaluations revient un peu à essayer de persuader un élève qui arrive dernier au cross du collège que ses nouvelles baskets lui permettront de rattraper les meilleurs coureurs…
Pour le SNALC, réécrire les programmes n’aura qu’un impact limité sur l’amélioration du niveau des élèves si l’on ne commence pas par traiter le problème central qui pèse sur l’école : les conditions de travail. De nombreux obstacles, parfois critiques, entravent le bon fonctionnement du système éducatif. Parmi eux, on trouve la surcharge de classes, les défis liés à l’inclusion scolaire, la formation initiale et continue des enseignants qui reste largement insuffisante, mais aussi un climat de démotivation généralisé, illustré de façon alarmante par le manque d’attractivité de la profession. Aussi, tant que ces enjeux essentiels ne seront pas sérieusement considérés dans une réflexion globale, toute tentative de modifier les contenus pédagogiques pour améliorer les résultats restera-t-elle vaine.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1498-École du 14 février 2025