Le ministre de l’Éducation nationale l’abandonnerait bien au bord du chemin. Dans certains couloirs du Ministère, on irait même jusqu’à le piquer. Le concours est en danger. Pouvait-il en être autrement ?
EMPOISONNÉ À PETIT FEU
En moins d’une décennie, le CAPES et le CRPE auront connu moult évolutions. Du point de vue structurel, la masterisation aura eu des effets délétères. Elle aura tout d’abord mis le concours au milieu d’un parcours de Master pour ensuite aligner totalement les deux agendas. Quel que soit le format, les étudiants, stagiaires, alternants, candidats de concours et doctorants ont eu trop de casquettes et trop de tâches non connectées à mener de front en trop peu de temps. Le tout pour une entrée réelle dans le métier plus tardive.
Ajoutez à cela des épreuves de concours qui ne cherchent plus des professeurs compétents dans leurs champs disciplinaires, mais des fonctionnaires s’inscrivant dans une chaîne hiérarchique et se conformant à la doxa pédagogique en vigueur et vous obtenez un cocktail détonant.
Comment avec le surcroît de travail, la perte de temps, d’argent et de sens feindre de s’étonner que le concours n’attire plus ?
EMPOISONNEMENT SYSTÉMIQUE
Si encore il représentait le sésame pour un avenir prometteur, l’amont pourrait être supportable comme l’était l’année d’IUFM – voyage transitionnel en Absurdie avant la vraie vie – il y a quelques années. Mais là aussi le bât blesse. Malgré les annonces rutilantes, le salaire n’a rien d’attirant et le manque de reconnaissance à la fois dans et hors l’institution ont de quoi rebuter.
QUEL MOBILE ?
Difficile de dégager un mobile certain. On peut y voir une volonté de contractualiser le métier, moyen assez simple de faire des économies en se débarrassant de statuts qui coûtent cher et – horreur – protègent les personnels. On peut aussi analyser tout cela à l’aune d’un désir de ne plus enseigner des connaissances, mais de former des personnes employables…
Quelle que soit la raison première, assassiner les concours aurait des conséquences économiques certaines à plus ou moins long terme. Tout cela ne doit pas faire oublier que la qualité de l’enseignement – osons le mot : de l’instruction – relève aussi et surtout d’un choix de société.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1474 du 17 février 2023