Alors que le pacte enseignant, des missions supplémentaires basées sur le volontariat, doit se déployer à la rentrée, les professeurs du premier comme du second degré ne semblent pas convaincus.
Jean-Rémi GIRARD, président du SNALC, réagit sur BFMTV le 02 septembre 2023
“Le pacte? Hors de question”, tempête pour BFMTV.com une professeure de lettres modernes au lycée. Dans son établissement, une quarantaine d’enseignants ont d’ailleurs signé une lettre dans laquelle ils refusent d’adhérer au pacte enseignant annoncé par Emmanuel Macron au mois de mars dernier. Un dispositif, détaillé dans un prospectus distribué lors de la pré-rentrée de ce vendredi, que cette enseignante juge méprisant.
Le pacte enseignant, qui doit entrer en vigueur à la rentrée de septembre, est une combinaison de missions supplémentaires sur la base du volontariat. Chaque mission, de dix-huit ou vingt-quatre heures, est rémunérée 1250 euros bruts par an avec la possibilité de cumuler jusqu’à trois missions – six en lycée professionnel.
Concrètement, les professeurs du premier degré pourront assurer l’heure de soutien ou d’approfondissement en mathématiques et en français qui devient obligatoire en 6e ou encore intervenir dans le cadre du dispositif “devoirs faits” qui se généralise à la rentrée, détaille la note de service du ministère de l’Éducation nationale.
Quant à ceux du second degré, il est prévu qu’ils puissent assurer des remplacements de courte durée, proposer des stages de réussite, coordonner des projets d’innovation pédagogique, encadrer la découverte de métiers ou encore prendre en charge des élèves à besoins particuliers.
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C’est justement pour cette raison que Nathalie, professeure dans un collège privé sous contrat, a accepté de s’engager pour un pacte et demi. Mais à contrecœur. “Ce que j’aurais voulu, c’est une vraie revalorisation socle”, regrette-t-elle pour BFMTV.com. “Mais malgré un bac+5, on est contraint de signer ces pactes pour payer nos factures.”
C’est quand elle a découvert que certaines des missions qu’elle faisait déjà gratuitement – notamment l’organisation d’expositions ou de sorties scolaires – étaient proposées dans les pactes, qu’elle a accepté. “Mais on n’a pas attendu les pactes pour faire des projets innovants! Il y a quelque chose d’humiliant là-dedans. Comme s’il fallait qu’on nous dise ce qu’on doit faire avec nos élèves.”
Un calendrier “délirant”
L’autre grief important, c’est la mise en place tardive et dans l’urgence du dispositif. Alors que les chefs d’établissement devaient en faire la promotion auprès de leurs personnels en fin d’année scolaire, les textes officiels n’étaient pas encore parus. La note de service, sorte de mode d’emploi du pacte enseignant, n’a en effet été publiée au Bulletin officiel que le 27 juillet, soit bien après la fin de l’année.
“La rentrée, on la prépare dès le mois de janvier, ça prend au moins six mois”, explique Laurent Kaufmann, le proviseur d’un collège de Montreuil interrogé plus haut. “Là, le calendrier a été délirant.” “Ça s’est mis en place dans le désordre et la désinformation”, abonde pour BFMTV.com Jean-Rémi Girard, professeur de lettres modernes et président du SNALC.
Faute de cadrage national clair, les académies et établissements ont ainsi librement interprété les annonces du ministère. Quand certains ont cru qu’il fallait nécessairement adhérer au remplacement de courte durée pour pouvoir s’engager dans d’autres missions, d’autres ont compris l’inverse. Dans certains établissements privés, ce sont même les missions de professeur principal qui ont été intégrées au pacte.
“Cela va créer des inégalités d’un établissement à l’autre”, s’inquiète encore Jean-Rémi Girard, du SNALC. “Une politique nationale va devenir complètement hors de contrôle, illisible avec du grand n’importe quoi.”
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