Depuis près de cinq ans, le SNALC demande du respect pour les professeurs. Respect de leur liberté pédagogique. Respect de leur prérogative d’évaluation. Ces principes, pourtant inscrits dans la loi, semblent tombés en désuétude. Le baccalauréat en est le parfait symbole.
On entend déjà les « ce n’est pas nouveau ! » ou « ça a toujours existé », phrases assez classiques servant à dédramatiser la situation. Pourtant la situation est aussi grave qu’inédite.
Par, par le contrôle continu et l’introduction du Projet d’évaluation, l’administration a déjà pu s’immiscer dans les évaluations en classe. Les chefs d’établissement qui convoquent pour faire changer les notes ou qui interviennent sur les coefficients, se multiplient comme les chocolatines dans le Sud-Ouest.
Mais désormais, grâce à l’oeil que Big Brother peut porter en temps réel sur les notes des copies du baccalauréat, cette autorité supérieure peut changer les notes d’examinateurs dont le jugement est pourtant expert et objectivé par l’anonymat des copies. Et il peut le faire sans même avertir le correcteur.
Bien sûr, l’on nous parle de commissions d’harmonisation. Mais ces commissions n’existent dans les textes que pour le contrôle continu et existaient précédemment pour feu les E3C. Là, elles sont apparues ex nihilo.
Alors non, ça n’a pas toujours existé.
Ce qui a toujours existé et existe encore – et il faut continuer de le dénoncer – ce sont les consignes de bienveillance qui confinent au mensonge. Dans certaines académies, l’élève a dit « Bonjour » et a joué le jeu ? Il n’aura pas en-dessous de 8 au Grand oral. Dans d’autres, on réunit des collègues d’espagnol pour reprendre toutes les copies car les notes sont trop basses, ou on demande de s’asseoir sur un corrigé national trop méchant.
Au final tout se vaut et plus rien ne vaut rien.
Les professeurs perdent leurs illusions quant au respect que leur porte l’institution. Ils comprennent qu’ils ne sont que des exécutants, les assistants « pots de fleurs » d’un grand illusionniste. Quant aux élèves et aux parents, ils peuvent, en attendant de rencontrer le mur du réel, continuer à se bercer… d’illusions.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1467 de juillet 2022