Audience Intersyndicale du mardi 19 juillet 2022 à 17h, avec Monsieur Laurent CRUSSON, conseiller social
Lors de cette audience, le SNALC a exposé et développé 5 urgences pour les AESH.
Nous vous invitons à en prendre connaissance.
Le SNALC reviendra longuement sur le contenu de cette audience dans ses prochaines publications.
Objet : Situation des personnels AESH
Le SNALC tient à vous remercier d’avoir répondu favorablement à notre demande d’audience destinée à échanger sur la situation des personnels AESH, et dans un délai relativement bref.
Il faut dire qu’il y a urgence à revoir les conditions d’emploi et de travail des AESH.
La première urgence concerne la rémunération et les quotités travaillées des AESH.
En effet, en moins d’un an, il y a eu un écrasement du pied de la grille indiciaire. Ainsi, entre septembre 2021, date d’entrée en vigueur de cette nouvelle grille, et le 1er mai 2022, tous les AESH en CDD sont passés à l’indice plancher (352), alors que 10 points d’indice majoré séparaient l’échelon 1 (AESH en CDD depuis moins de 3 ans au 1er septembre 2021) de l’échelon 2.
Quant aux AESH en CDI (échelon 3), l’écart avec leurs collègues toujours en CDD n’est plus que 3 points d’indice majoré, soit un écart de rémunération brute de seulement 14,55€, pour un temps complet (très rare chez les AESH), et en tenant compte du dégel du point d’indice au 1er juillet.
Si aucune refonte de cette grille n’est envisagée dans les plus brefs délais, avant la fin de l’année 2022, on assistera à un écrasement de toute la grille, rendant ainsi caduque la volonté esquissée de construire un début de revalorisation salariale des AESH.
Par conséquent, le SNALC demande la convocation d’un groupe de travail afin de revoir très rapidement la grille de rémunération des AESH. Cette dernière devra être capable par le niveau des indices retenus de reconnaître leurs compétences, leur rôle indispensable dans l’école inclusive et l’expérience professionnelle accumulée en leur offrant de réelles perspectives d’avancement.
Pour le SNALC, l’écart de points d’indice majoré entre chaque échelon doit être maintenu lorsqu’il y a hausse de l’indice majoré plancher, ce qui suppose une augmentation de tous les indices majorés de la grille dès que l’indice majoré minimum augmente. Enfin, ce dernier est nettement trop bas, d’autant plus dans un contexte très inflationniste, condamnant la quasi-totalité des AESH à un salaire correspondant au SMIC, ou plus exactement à 52 ou 62% d’un SMIC en raison des temps incomplets (ou temps partiels imposés).
Les temps incomplets, devenus la norme en termes de quotités travaillées, doivent très vite également être inscrits à l’agenda du ministre, afin que les AESH puissent vivre dignement de leur emploi dans l’Éducation nationale. La solution du multi employeur pour atteindre ou se rapprocher d’un salaire décent n’est pas acceptable pour le SNALC. Par conséquent, la question des temps incomplets et celle de la rémunération ne sauraient être traitées séparément.
Enfin, si de nombreux départements profitent de la signature des renouvellements de contrats pour harmoniser les quotités travaillées de 61% vers 62% (et idem pour toutes les autres quotités), cela se fait sans rattrapage sur les années précédentes (c’est-à-dire à partir du 1er septembre 2019), d’autres départements refusent toujours d’appliquer les préconisations ministérielles concernant le calcul de ces quotités. Ainsi, pour un même nombre d’heures hebdomadaires d’accompagnement, on observe des inégalités salariales d’un département à l’autre.
De plus, le SNALC demande une revalorisation de l’indemnité de fonctions particulières allouée aux AESH référents (décret 2020-1287 du 23 octobre 2020). En effet, l’arrêté du 23 octobre 2020 fixe le montant annuel de cette indemnité à 600€ depuis septembre 2020.
La deuxième urgence concerne les conditions de travail avec la généralisation des PIAL.
La multiplication des interlocuteurs plus ou moins officiels au sein du PIAL avec différents degrés d’autorité (réglementaire ou non sur l’AESH) entraîne des difficultés à se positionner et à savoir à qui s’adresser en cas de besoin. On trouve au sein d’un même PIAL : professeur, professeur des écoles, directeur d’école, AESH référent, enseignant référent, coordonnateur de PIAL, référent PIAL, référent ASH, CPE, chefs d’établissement, IEN, IEN ASH… Certains ont toute légitimité, d’autres n’en ont aucune, et pourtant ces différents acteurs sont régulièrement nommés (ou auto-proclamés) responsables des AESH.
Ces multiples interlocuteurs avec plus ou moins d’autorité et de responsabilité envers les AESH compliquent le dialogue des AESH avec l’institution.
Enfin, les emplois sur le temps périscolaire ajoutent encore des interlocuteurs et supérieurs hiérarchiques à ceux du PIAL, précédemment listés.
Un guide PIAL ne serait-il pas nécessaire ?
Le SNALC est demandeur d’un groupe de travail sur les PIAL.
Le PIAL permet de déployer les AESH sur plusieurs établissements ou écoles. Il serait appréciable de fixer un délai minimum de prévenance (deux semaines ?) avant un changement d’établissement. Les AESH doivent pouvoir s’organiser personnellement. Certains PIAL sont très étendus et ces changements impactent leur vie personnelle (transports, garde d’enfant, second emploi…). Les changements intempestifs d’emploi du temps posent les mêmes problèmes.
Ces changements de lieu d’exercice ou/et d’emploi du temps s’expliquent très fréquemment par l’absence de brigades de remplaçants en cas d’absences d’AESH au sein du PIAL.
Au sein d’un PIAL, les AESH affectés sur plusieurs établissements et sous certaines conditions ont droit au remboursement de leurs frais de déplacements mais n’en sont que trop rarement informés. Par ailleurs, le logiciel de saisie utilisé le plus souvent (Chorus DT) est particulièrement complexe. Une simplification ou au moins une notice d’utilisation serait appréciée.
Le SNALC demande que les AESH, notamment en service partagé, soient au moins informés de la possibilité de bénéficier du remboursement de leurs frais de déplacement et des modalités d’obtention de celui-ci, et ce au début de chaque année scolaire.
Enfin, il serait souhaitable de rappeler aux académies que le temps de transport entre deux lieux d’affectation, en cas de service partagé, y compris durant la pause méridienne, doit être comptabilisé dans le temps de travail de l’AESH, et être mentionné sur son emploi du temps.
Le SNALC souhaiterait à nouveau vous interroger sur le cas des AESH qui exercent leurs missions en collège ou en lycée et qui peuvent être amenés à accompagner les élèves en stage en entreprise. Le guide RH du ministère ne fait pas allusion à ces stages. Quelle position pour les AESH ? Ordre de mission ? Avenant au contrat ? Possibilité de refuser (Emploi du temps très différent, localisation du stage hors du périmètre du PIAL voire largement au-delà : 60 km par exemple) ?
Quel remboursement des frais de déplacements si le choix d’un avenant au contrat est fait ?
Pour conclure, le fonctionnement des PIAL est très souvent déshumanisé à tel point que l’on ne trouve plus de coordonnateurs, et que le projet de décret sur ces derniers n’en finit pas d’être repoussé tellement la rémunération proposée, notamment, est indigente.
La troisième urgence concerne les renouvellements de contrats des AESH.
En janvier dernier, le SNALC avait alerté la DGRH sur la situation des AESH en ASA, dont pour certains depuis la mi-mars 2020, qui s’inquiétaient d’un non-renouvellement de leur contrat à compter de septembre 2022, du fait de leur situation médicale.
Le SNALC avait obtenu comme réponse qu’être placé(e) en ASA ne saurait constituer un motif de non renouvellement.
Or, nous savons aujourd’hui que nombre d’AESH en ASA ne sont pas renouvelés.
Si le SNALC a bien pris note de l’annonce de l’emploi de 4000 AESH à la rentrée 2022, il est demandeur d’un bilan sur les non renouvellements de contrats, sur les démissions et les licenciements d’AESH, permettant de raisonner en recrutements nets et non plus en recrutements bruts.
Enfin, dans de très nombreux départements, le SNALC a noté un affranchissement par les DSDEN de la disposition de l’article 45 du décret 86-83 : «La notification de la décision doit être précédée d’un entretien lorsque le contrat est susceptible d’être reconduit pour une durée indéterminée ou lorsque la durée du contrat ou de l’ensemble des contrats conclus pour répondre à un besoin permanent est supérieure ou égale à trois ans. ».
Les AESH ont dû demander cet entretien, après avoir reçu leur notification de non renouvellement.
Le SNALC souhaiterait que le ministère rappelle aux académies cette obligation d’organiser un entretien préalable en cas de reconduction (ou non) en CDI ou si la durée du contrat ou de l’ensemble des contrats conclus pour répondre à un besoin permanent est supérieure ou égale à trois ans.
La quatrième urgence concerne les conditions d’emploi des AESH.
Les heures connexes sont trop souvent utilisées à tort et à travers, lissées, faites en présence d’élèves, pour accompagner des sorties scolaires… Cela se fait le plus souvent sous la pression quand les AESH font remarquer que ces heures ne sont pas prévues pour cela.
Le SNALC est demandeur d’un groupe de travail sur les heures connexes.
Plusieurs académies refusent d’accorder les heures de fractionnement aux AESH, alors que c’est un droit pour ces personnels. L’argument mobilisé est le suivant : les heures de fractionnement sont intégrées dans les heures connexes.
Le SNALC souhaiterait que le ministère explique la distinction entre les heures connexes et les heures de fractionnement, et rappelle le droit pour les AESH à bénéficier de ces heures de fractionnement.
Les AESH ont été soumis dans certains départements à des entretiens professionnels téléphoniques avec l’IEN ou avec les directeurs d’école. Ces pratiques ne sont pas conformes au cadre de gestion des personnels AESH.
Lorsque les AESH sont soumis à des retenues sur salaire, le plus souvent suite à un arrêt maladie, ils sont démunis. Ils ne sont pas informés en amont de la retenue sur salaire, de son montant et de la durée de la retenue. Là encore, les AESH sont précarisés.
Des académies (académie de Rennes par exemple) ont refusé aux AESH la possibilité de s’inscrire aux formations MIN ASH, prétextant construire elles-mêmes sur le long terme la formation des AESH.
Le SNALC demande au ministère de faire le nécessaire pour qu’une telle interdiction ne puisse plus se reproduire.
Concernant la formation, dans le cadre de la poursuite de l’agenda social du GRENELLE de l’Éducation, le ministère avait programmé le mercredi 29 septembre 2021, à 14h30, un nouveau GT 3 pour reprendre les travaux sur les AESH et en particulier aborder à nouveau la question de leur formation et de leurs parcours professionnels.
Le lundi 27 septembre 2021, Monsieur SOETEMONT, directeur général des ressources humaines, nous a informés que ce GT était reporté et serait reprogrammé rapidement à une date ultérieure, car des travaux associant les différentes directions du MENJS étaient encore en cours sur ces sujets et nécessitaient un peu de temps pour leur finalisation.
À l’heure actuelle, soit 10 mois plus tard, avez-vous des informations à nous communiquer sur la tenue de ce groupe de travail «formation et parcours professionnels » des AESH ?
Le SNALC est vraiment dans l’attente d’un tel groupe de travail, car la formation des AESH est très problématique et mérite que nous y apportions des réponses.
Il est régulièrement demandé aux AESH référents de réaliser des missions qui ne leur incombe pas, notamment l’établissement des emplois du temps des AESH de leur PIAL, les mettant en porte-à-faux envers leurs collègues AESH.
La situation des APSH est compliquée. Leurs missions ne sont pas suffisamment précisées et ils se retrouvent souvent à faire une immense partie du travail des enseignants. Lorsque les relations de travail deviennent tendues, ils sont à la merci de l’enseignant et se retrouvent dans des situations des plus délicates.
Les missions des APSH devraient être précisées de manière générale mais également au cas par cas pour chaque nouvel accompagnement, afin d’éviter les dérives. On a des cas où c’est l’enseignant en situation de handicap qui fait passer tout seul les entretiens d’embauche avec des demandes des plus étonnantes. Pour les personnels accompagnés malvoyants, les APSH doivent entre autres corriger des copies, préparer des supports… il serait pertinent de permettre officiellement le recours au télétravail pour ces personnels.
Par ailleurs, leur position est trop floue lorsque l’enseignant accompagné est absent ou part à la retraite.
Le SNALC demande la rédaction d’une circulaire spéciale APSH. La dernière dont nous avons connaissance date de 2014.
La cinquième urgence concerne les activités périscolaires.
Selon le Conseil d’État, l’État et les collectivités territoriales ont l’obligation de respecter le droit à compensation du handicap pour que le droit à l’éducation et le caractère obligatoire de l’instruction soient effectifs pour tous. De plus, pour la Haute juridiction, les AESH recrutés par l’État peuvent intervenir pendant le temps scolaire et le « temps hors scolaire ».
Enfin, les juges du Palais-Royal ont déterminé la répartition des charges entre les collectivités publiques. Trois solutions sont désormais envisageables :
Les AESH peuvent être mis à la disposition de la collectivité locale (convention conclue entre la collectivité et l’employeur dans laquelle la charge financière de cette mise à disposition revient à la collectivité locale).
Les AESH peuvent être directement employés par la collectivité locale pour les heures effectuées « en dehors du temps scolaire ».
Les AESH peuvent être recrutés conjointement par l’État et par la collectivité locale, qui s’entendent alors sur la mise en œuvre de l’accompagnant pendant le “hors temps scolaire”.
Qu’en est-il de l’avancée de ces 3 types de solutions envisageables pour les AESH sur le « hors temps scolaire » ?
Le transfert de la compétence « périscolaire » vers les mairies précarise encore plus les AESH : nombre de mairies ne proposent pas aux AESH d’accompagner les élèves sur ce temps et transfèrent les compétences vers des animateurs qui ne risquent pas de quitter leur poste pour cause de mutation intempestive.
De plus, ceux qui conservent ces missions n’ont que des contrats précaires et au SMIC (perte de salaire pour les AESH cumulant de l’ancienneté et rémunérés par l’Éducation nationale au-dessus de l’indice majoré plancher), y compris pour les AESH en CDI.
De plus, l’AESH est parfois recruté(e) sous forme de vacations et n’est pas rémunéré(e) si l’élève est absent.
Par ailleurs, beaucoup d’AESH accompagnent des élèves notifiés sur le temps de cantine, réalisant ainsi plus de 6 heures de travail consécutives.
Or, conformément au décret 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature, « Aucun temps de travail quotidien ne peut atteindre six heures sans que les agents bénéficient d’un temps de pause d’une durée minimale de vingt minutes. »
Lorsque l’AESH est recruté(e) par une collectivité territoriale pour assurer ce temps de cantine (ou toute autre activité périscolaire), qui accorde et par conséquent rémunère les 20 minutes de pause ?
En conclusion, pour le SNALC, il est inenvisageable d’en rester en l’état.
Le SNALC demande donc l’ouverture de négociations dès la rentrée de septembre pour améliorer les conditions d’emploi et de travail des AESH, piliers de l’école inclusive. Le SNALC réitère sa volonté d’arriver à un véritable statut de la fonction publique pour ces personnels, accompagné d’une grille de catégorie B et d’un abandon des PIAL. Pour le SNALC, le fonctionnement actuel de l’inclusion relève plus souvent d’une école de la souffrance que d’une école de la confiance, notamment pour les AESH.