Même si « cela n’arrive qu’aux autres », nous vous invitons à prendre connaissance des 10 recommandations du SNALC : autant d’erreurs à ne pas commettre, de conseils à appliquer, de pièges à repérer. Le SNALC, fort de son expérience de terrain, d’écoute, de défense, vous donne les outils pour être plus fort au travail.
SOMMAIRE
1 – NE JAMAIS SE RENDRE SEUL À UNE CONVOCATION HIÉRARCHIQUE
Une convocation de l’autorité hiérarchique, qu’elle se tienne au rectorat ou ailleurs, a peu de chances d’être placée sous le signe de la bienveillance. A fortiori si vous êtes en difficulté ou en opposition avec cette autorité. Tel l’avenir d’une gazelle esseulée dans la savane, votre sort sera vite compromis : les crocs de vos prédateurs sont aiguisés, ne leur offrez pas un festin facile. Votre première réaction sera donc de rechercher la personne de confiance qui pourra vous accompagner lors de cet entretien.
2 – S’APPUYER SUR LA LÉGITIMITÉ D’UN REPRÉSENTANT SYNDICAL
Plus qu’un simple témoin, le représentant syndical détient une légitimité : il n’agit pas à titre individuel mais au nom de toute une organisation. Être accompagné d’un élu syndical revient à se présenter avec le soutien d’un bataillon potentiel de juristes, de commissaires paritaires assermentés, et même d’avocats (GMF partenaire du SNALC) pour désamorcer, négocier et défendre votre dossier, votre situation. Le SNALC présente l’avantage sur tous les autres qu’il est à la fois représentatif et totalement indépendant, libre de ton et d’action, insoumis à quelque autorité que ce soit. En outre, ses élus sont disponibles et à votre écoute permanente.
3 – VEILLER À FAIRE RESPECTER L’ORDRE DU JOUR DE LA RÉUNION
La convocation doit mentionner un ou plusieurs sujets à l’ordre du jour. Hélas, rapidement, vous constaterez des dérives parfois grossières qui consistent à vous amener sur un terrain hors sujet, une pente savonneuse. Par exemple, sur un entretien motivé par un incident de gestion de classe, il sera rapidement question de difficultés ou d’insuffisances pédagogiques, quitte à racler les fonds de tiroir pour débusquer des rapports de tout début de carrière, et ce même en l’absence de tout IPR, compétent dans ces domaines. Un DRH tentera au besoin de vous faire reconnaître votre fragilité psychologique, un mal-être nécessitant une thérapie, s’arrogeant au passage des compétences d’expert psychiatre concluant à votre insuffisance professionnelle et pouvant aboutir à votre radiation.
4 – SE MÉFIER DES ÉCRITS ET DES INCITATIONS À ÉCRIRE
On incite les personnels de direction à ne pas laisser de traces écrites, autres que celles qui font état de banalités. En revanche, l’écrit de votre part est à double tranchant. Ainsi, les fiches de signalement d’incidents quand elles se multiplient, y compris à la demande de la direction, peuvent être retournées contre vous : « vous êtes le seul à signaler ces incidents, vous êtes le seul à avoir des problèmes ? » ou encore « mais avec tous ces signalements, quand est-ce que vous travaillez ? ». Retenez enfin que signer un compte rendu d’entretien ne signifie pas l’approuver, mais simplement en avoir pris connaissance. Pour plus de garantie, le SNALC vous incite à signer et à mentionner en toutes lettres : « je prends connaissance de ce compte rendu le… et conteste [tout ou partie] des éléments mentionnés – courrier à suivre ».
5 – RESTER OBJECTIF ET CIRCONSTANCIÉ, COHÉRENT
Veillez à rester objectif et à vous tenir à la description des faits : pas de commentaires de valeur, pas de jugement. Les exagérations et interprétations abusives, parfois involontaires sous le coup de l’émotion ou de la souffrance, pourraient discréditer votre témoignage. N’attaquez personne, ne concluez en aucune façon à des sentences : laissez à vos interlocuteurs ou lecteurs le soin de conclure eux-mêmes d’après les faits objectifs auxquels vous vous efforcerez de vous tenir. Restez clair dans vos descriptions : ne mélangez pas plusieurs affaires. Soyez concis, éviter les répétitions, les énumérations. À l’écrit comme à l’oral, privilégiez les phrases simples et courtes.
6 – REFUSER LA CULPABILISATION, GARDER SA DIGNITÉ
La tendance est à la culpabilisation. L’Ecole va mal, des réformes ahurissantes contribuent à une dégradation incessante des conditions de travail… Du côté de la direction et parfois même de l’opinion publique, il semble entendu que les personnels sur le terrain ont leur part de responsabilité : la vie scolaire est incapable de contenir les incivilités d’élèves, le professeur ne sait pas appliquer les réformes favorisant du coup les comportements répréhensibles au sein de sa classe, la secrétaire est désorganisée et ne parvient pas à accomplir la multiplicité des tâches qui lui sont confiées avec du matériel souvent obsolète… Relevez la tête : il est hors de question d’endosser la responsabilité des errements et incompétences de tout un ministère. Vous avez une haute idée de votre métier, vous l’exercez de votre mieux avec conscience et respect : exigez ce même respect en retour de votre engagement. En cas de difficulté, le premier devoir de la hiérarchie est un devoir de protection fonctionnelle envers ses personnels.
7 – CONSERVER LES TRACES ÉCRITES, RASSEMBLER DES TÉMOIGNAGES
Si vous faites l’objet de critiques et d’une forme d’acharnement à votre égard, vous devrez à terme démontrer l’aspect récurrent de ces atteintes : c’est sur ce principe que repose notamment la notion de harcèlement. Dès lors, n’attendez pas pour rassembler et consigner tous les éléments susceptibles de démontrer cette récurrence. Au besoin, tenez un carnet consignant la chronologie des événements. Conservez les mails et demandez une trace écrite des injonctions orales, surtout quand elles vous paraissent contradictoires entre elles. Les SMS doivent aussi être consignés, ils pourront au besoin être retranscrits par voie d’huissier. Enfin, n’hésitez pas à proposer en début d’entretien l’enregistrement de la séance : si votre interlocuteur s’y oppose, faites alors noter son refus dans le compte rendu.
8 – ÊTRE IRRÉPROCHABLE DANS SON TRAVAIL
A fortiori si vous vous sentez dans la ligne de mire, évitez de prêter le flanc à la critique : soyez irréprochable, ponctuel, respectueux. Prenez garde de ne pas agir sous le coup de l’émotion, de la pulsion. Retenez-vous de critiquer – et d’autant plus avec des noms d’oiseau… – telle personne, même en son absence, même en présence de personnes qui vous sembleraient « neutres » : vous pourriez être surpris de la façon dont vos propos seront rapportés par des collègues en qui vous aviez entière confiance. Sans vous montrer méfiant à l’excès, comprenez que dans le contexte actuel de gestion, tout est mis en œuvre pour diviser et rivaliser ; de fait, la faiblesse des uns profite au bénéfice des autres.
9 – NE PAS SE CONFIER SUR SES DIFFICULTÉS, PRÉSERVER SA VIE PRIVÉE
Dans un conflit vous opposant à l’administration, celle-ci cherchera à rassembler tous les éléments possibles pour démontrer vos insuffisances, votre responsabilité. À ce titre, la moindre confidence concernant vos difficultés personnelles pourra être utilisée et retournée à votre insu afin de démontrer un état de faiblesse de votre part de nature à remettre en cause votre efficacité professionnelle et votre crédibilité. Ainsi, évitez de vous confier à propos de votre vie privée, même si cela a une incidence indéniable sur votre vie professionnelle : divorce, problèmes d’argent, de santé…
10 – DÉPOSER UNE MAIN COURANTE VOIRE UNE PLAINTE EN CAS DE FAITS AVÉRÉS
Trop d’agressions verbales ou physiques sont étouffées pour « éviter les vagues ». Parfois avec les recommandations du chef de service ou d’établissement, qui en arrive à convaincre la victime des risques qu’elle encourrait ou ferait encourir à l’établissement voire à l’équipe : renommée, représailles, conséquences sur la DGH, les emplois du temps voire sur l’agresseur lui-même, « à qui vous risqueriez de gâcher l’avenir » … N’acceptez pas ce renoncement, ne baissez pas la tête à l’instar d’une société, ne réagissant plus aux incivilités. Pour rester maître dans votre classe et digne dans votre métier, réagissez et faites respecter vos droits. Une main courante est simplement le dépôt, dans un commissariat de police, d’un témoignage écrit ; elle permet de dater officiellement les faits en question en vue de toute procédure judiciaire ultérieure. À ce stade, l’auteur des faits ne sera pas forcément prévenu du dépôt de la main courante. En revanche, un dépôt de plainte contre X déclenchera une enquête de la part des services de police afin de déterminer les responsabilités de chacun. Évitez les dépôts de plainte nominatifs qui, en cas d’échec de la procédure, pourraient être retournés contre vous. Ne négligez pas ces étapes : si la situation s’aggrave, votre absence de réaction vous serait alors reprochée.
Ces recommandations sont inspirées d’expériences vécues, défendues et relatées par Jean-Pierre Gavrilovic, président du SNALC de Strasbourg et DETOM, et secrétaire national chargé de la communication et du développement.