Ce mois de novembre a été marqué par une enquête nationale portant sur l’exigence des savoirs. C’est de cette exigence dont il sera question dans ce numéro de la Quinzaine Universitaire.
Nous sommes désormais habitués aux consultations et enquêtes faussées, aux informations tronquées, aux vérités maquillées et aux annonces trompeuses. Depuis des années, notre ministère présente aux médias l’image fallacieuse d’une école merveilleuse, opérationnelle et bienveillante au coeur d’un système éducatif cohérent et mûrement réfléchi.
Notre lassitude, en tant que professeurs, provient du décalage entre les beaux discours et une réalité beaucoup moins rutilante. Sur le terrain, rien n’est prêt et le fonctionnement de notre École paraît tout sauf mûrement réfléchi. Notre lassitude s’explique également par le fait que les syndicats, en particulier le SNALC, n’ont de cesse d’alerter le ministère sur les défaillances à répétition de notre système et les problèmes que cela engendre pour la profession, mais que rien ne change. C’est toujours la même histoire : il n’y a prise de conscience (forcée) que lorsque les médias s’en mêlent, lorsqu’un accident survient ou lorsqu’une enquête menée par un organisme indépendant fait du bruit. Alors on exécute quelques pirouettes, on opère quelques changements mineurs dans quelques textes, quelques beaux discours qui semblent emplis de gravité, de compassion, voire de sincérité… Et hop ! Après quelques jours, on n’en parle plus et c’est reparti, comme si de rien n’était, jusqu’à la prochaine « vague ».
À chaque rentrée, à chaque nouveau ministre pourtant, des signes ou des initiatives peuvent nous laisser entrevoir une prise de conscience porteuse de changements. Nous nous prenons alors à espérer que le ministère, conscient qu’il n’est plus possible de prétendre que tout va très bien (Mme la Marquise), prendra enfin les choses en main.
Ainsi, la dernière enquête lancée par le ministère avait tout pour plaire au SNALC, à commencer par son intitulé : « L’exigence des savoirs » (à condition bien sûr qu’il s’agisse bien de remettre en question le processus d’apprentissage dans sa totalité et non uniquement les compétences des professeurs). Or, quelques items de ce questionnaire suffisent pour comprendre qu’une fois de plus, tout est biaisé. Lorsque les propositions de réponses aux questions sur le ressenti des enseignants permettent une évaluation oscillant à peu de chose près entre parfait et presque parfait, où est l’honnêteté ? Où est la réelle volonté de prendre en compte la réalité ?
Une enquête pour une école qui serait plus exigeante dans l’apprentissage des savoirs aurait mérité d’être, elle aussi, plus exigeante en termes d’objectivité et prenant en compte la réalité du terrain. L’absence de questions réellement connectées au quotidien des classe n’est pas sérieuse, mais peut-être révélatrice des intentions du ministère.
Ce dernier remet sans cesse en question nos compétences et exige de nous de la rigueur, mais nous aimerions que cette exigence s’applique à tous les niveaux de la hiérarchie et que les remises en question ne soient pas seulement descendantes, car les professeurs des écoles ne sont pas LES responsables. Les choix politiques en matière d’éducation, ils les subissent, contraints et forcés. Or, nous ne pouvons que nous inquiéter car , sur le terrain, nous constatons que le niveau de lecture de nos élèves est loin d’être satisfaisant, et nous savons pertinemment que l’apprentissage et les résultats sont étroitement liés. Il est évident que l’amélioration des résultats aux évaluations nationales ne pourra résulter uniquement d’heures de soutien. C’est pourquoi le SNALC a lancé sa propre enquête.
Article paru dans la revue du SNALC, la Quinzaine universitaire n°1483 École du 8 décembre 2023