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Une école de la confiance ? À certaines conditions, oui.


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LE PREMIER DEGRÉ 33 – décembre 2020

L’école de la confiance est devenue une marque déposée. Et surtout un outil de communication d’un ministre ayant le sens de la formule, rarement magique. La bienveillance n’est que trop rarement appliquée à ceux qui œuvrent en ses murs : les professeurs des écoles. Elle est pourtant exigée, mais sans contrepartie.

Observatoire aveugle

Jamais notre profession n’aura été autant observée. Notre ministre de l’observatoire devrait enlever ses œillères et tirer les conclusions évidentes pour tous. Afficher la volonté de reconnaître nos compétences et vouloir renforcer notre légitimité face à la communauté éducative ne suffit pas. Sur le terrain, les déclinaisons de cette volonté vont à contre-courant de la finalité exprimée. Quand cessera-t-on de réduire les enseignants à de simples membres de la communauté éducative ? Par leurs savoirs et leur savoir-faire, ils sont des experts, et à l’école leur parole devrait primer sur celle des parents. Dans les faits – et c’est un comble – les enseignants en sont réduits à écouter, et parfois à devoir suivre, les directives des parents et/ou les injonctions de supérieurs hiérarchiques n’ayant jamais eu de classe. Nous sommes entre le marteau et l’enclume, les mains liées dans le dos.

Dialogue et bouchons de cire

Quand notre ministre prétend entendre les enseignants et leurs problématiques, il serait opportun de commencer par retirer les bouchons de cire afin d’écouter l’avis des élus des personnels, qui sont les plus au fait des besoins de la profession. Force est de constater que le dialogue social n’est plus qu’un monologue médiatique.

Comment améliorer les conditions de travail des personnels et leur accorder davantage d’autonomie dans l’exercice de leurs missions ? En leur donnant le statut d’experts qui n’auraient pas à faire preuve de leur expertise chaque jour. Mais la confiance n’y est pas : chaque jour, chaque projet, chaque fiche est un examen de compétences qui se réplique à l’infini. L’enseignant est observé, sa pratique est disséquée. Le ministre doit accorder aux enseignants du crédit de façon définitive.

Nous dresser les uns contre les autres

Pour détourner l’attention des vrais problèmes – surcharge et complexification du quotidien – le ministère focalise sur les interactions prétendument vacillantes entre directeur et adjoints en prétextant vouloir les améliorer. Comment fluidifier la communication, mieux partager l’information et développer le travail collectif ? La réponse, une fois de plus, nous l’avons : en soulageant directeurs et adjoints de tâches occupationnelles chronophages et stériles qui les poussent à craquer et génèrent de mauvaises ambiances dans les équipes. La communication se fait bien quand on ne la surcharge pas à dessein. L’ambiance au sein des équipes n’a jamais été aussi délétère que depuis que les concertations sont imposées et que leurs finalités ne servent que nos supérieurs. Les réunions doivent répondre à un besoin constaté.

Pouvons-nous avoir confiance en notre hiérarchie ?

Pas à cette heure. En cas de problème, la protection de notre supérieur n’est pas acquise et là encore, nous devrons nous disculper par nos propres moyens. Navrant.

Avant toute chose, la protection fonctionnelle se doit d’être indéfectible. Dans les faits, si votre syndicat ne demande pas à ce qu’elle vous soit accordée, votre IEN aura vite fait de regarder ailleurs en souhaitant que les choses s’aplanissent d’elles-mêmes. A vous d’endurer et d’essayer de ne pas y laisser votre peau. Intolérable.

Ensuite, et cela relève pourtant de l’évidence, il est plus que temps de rendre à l’enseignant ce pouvoir qui lui a été enlevé. Cette confiscation l’oblige, pour chaque démarche, à demander par maints détours, l’autorisation de membres de la communauté éducative toujours plus conscients du pouvoir qu’ils ont contrairement à nous.

Les pistes envisagées par le ministère ne peuvent pas nous convenir : multiplier les instances de contrôle hors-sol se nourrissant exclusivement d’indicateurs alimentant graphiques et diagrammes ne peut servir que de courte-échelle aux responsables statisticiens sévissant au-dessus de nous.

Vous l’aurez compris, il est maintenant nécessaire de sortir d’un système auto-entretenu qui se nourrit de sa propre essence et n’engendre rien de fonctionnel mais tellement de fictionnel !