Dans de nombreux établissements, les équipes se voient proposer — parfois imposer — des devoirs communs, des progressions harmonisées ou des pratiques uniformisées. Le SNALC rappelle que ces dispositifs n’ont de sens que s’ils respectent le cadre légal, dont la liberté pédagogique est un pilier. Revenir aux textes, c’est rappeler ce qui est obligatoire et ce qui ne peut pas l’être.
La liberté pédagogique : un principe législatif fondateur
Dans la loi n°2005-380 du 23 avril 2005, on peut lire à l’article L. 912-1-1 : « La liberté pédagogique de l’enseignant s’exerce dans le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l’éducation nationale et dans le cadre du projet d’école ou d’établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres des corps d’inspection. Le conseil pédagogique prévu à l’article L. 421-5 ne peut porter atteinte à cette liberté. »
La liberté pédagogique n’est pas une option : c’est une garantie légale.
Elle est individuelle, protégée, et concerne :
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le choix des démarches,
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les supports utilisés,
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la progression,
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le contenu des évaluations,
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l’organisation des apprentissages.
Aucun établissement, aucune équipe disciplinaire, aucun conseil pédagogique et aucun IPR ne peut imposer une méthode, un contenu, une progression ou un devoir commun obligatoire.
Le travail en équipe : une obligation de coopération, pas d’alignement
Le décret n°2014-940, article 2, inscrit explicitement parmi les missions liées au service d’enseignement “le travail au sein d’équipes pédagogiques constituées d’enseignants ayant en charge les mêmes classes ou groupes d’élèves ou exerçant dans le même champ disciplinaire”. Ce travail collégial relève donc bien d’une mission professionnelle — sans pour autant pouvoir, à lui seul, imposer une uniformisation des pratiques pédagogiques.
Effectivement, les enseignants doivent participer à la vie de l’équipe : concertation, coordination, partage. Encore faudrait-il que ce travail supplémentaire soit rémunéré.
Mais cela ne signifie pas que l’équipe a un pouvoir hiérarchique interne. Le travail en équipe ne peut pas devenir un mécanisme qui efface les singularités professionnelles.
Obligation d’échanger, oui.
Obligation de se conformer, non.
Conseil pédagogique et équipes matières : des instances consultatives
Le conseil pédagogique propose. Il ne décide pas.
Les équipes disciplinaires peuvent recommander :
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des progressions communes,
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des devoirs communs,
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des projets partagés.
Mais en aucun cas elles ne peuvent rendre ces décisions obligatoires pour un membre de l’équipe. Le consensus, s’il existe, ne vaut jamais contrainte juridique.
Les devoirs communs : aucun fondement légal d’obligation
Aucun texte réglementaire n’impose des devoirs communs ou une harmonisation des évaluations, hors épreuves nationales (DNB, baccalauréat).
Les devoirs communs relèvent :
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soit de propositions d’équipe,
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soit d’organisations matérielles pilotées par la direction.
Mais le contenu pédagogique du devoir commun reste libre, sauf accord explicite de tous.
En conséquence :
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un enseignant ne peut pas être contraint de donner un devoir commun,
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aucune sanction ne peut être prononcée en cas de refus,
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aucune hiérarchie interne ne peut lui imposer un sujet.
Le projet d’établissement : ce qu’il peut imposer… et ce qu’il ne peut pas
Le projet d’établissement, défini à l’article L401-1 du Code de l’Éducation et adopté par le conseil d’administration, s’impose à toute la communauté éducative pour ce qui relève de l’organisation collective : dispositifs communs, calendriers, logistique ou actions transversales. En revanche, il ne peut en aucun cas imposer un choix de méthode, une progression, un type d’exercice ou le contenu d’un devoir commun. Ces aspects relèvent de la liberté pédagogique, garantie par l’article L912-1-1, qui s’exerce y compris dans le cadre du projet d’établissement. Ainsi, si certains dispositifs peuvent être obligatoires dans leur forme, ils ne peuvent jamais contraindre le fond des pratiques pédagogiques.
Cela signifie que lorsqu’un dispositif comme la tenue d’un devoir commun ou un parcours d’évaluation est inscrit dans le projet d’établissement validé en CSE, il devient opposable seulement au sens organisationnel.
Le projet d’établissement doit être compatible avec la liberté pédagogique, et ne peut en constituer une restriction.
Coopération oui, uniformisation non : l’équilibre nécessaire
La loi encourage un travail collectif qui bénéficie aux élèves, mais elle protège la diversité des pratiques. Le SNALC réaffirme que :
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la collaboration est une richesse lorsqu’elle repose sur la volonté,
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l’uniformisation forcée va à l’encontre de la loi,
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la liberté pédagogique n’est pas négociable,
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aucune pression locale ne peut y déroger.
Les textes sont clairs : travailler ensemble, oui ; imposer des pratiques uniformes, non.
La liberté pédagogique est garantie par la loi et demeure la condition d’un travail collectif constructif. Le SNALC continuera de veiller à ce que la coopération ne devienne jamais une contrainte, et à rappeler que le projet d’établissement organise des actions communes sans jamais pouvoir dicter les choix pédagogiques individuels.





