Présentés comme une plus-value pédagogique, les travaux pratiques délocalisés en entreprise se généralisent dans différentes filières, sous la pression des inspecteurs. Pourtant, la vitrine séduisante masque mal une réalité bien moins reluisante : une surcharge de travail invisibilisée pour les enseignants et de profondes inégalités pour les élèves.
La mise en place des TP délocalisés repose sur une organisation titanesque, intégralement assumée par les enseignants. Ainsi, une PLP Commerce a consacré trois mois à démarcher des dizaines d’entreprises afin de placer une seule classe, essuyant de nombreux refus et jonglant avec un emploi du temps éclaté. Une fois les élèves répartis, les enseignants doivent aussi assurer les TP sur des sites dispersés, à l’instar de cet enseignant en hôtellerie- restauration qui parcourt 58 kms en une journée et regagne son domicile à 19 h 30 au détriment du travail de préparation et de correction.
À cette surcharge de travail pour les PLP, s’ajoute une inégalité pédagogique majeure. Ne pouvant être présents simultanément sur tous les lieux, les enseignants doivent parfois s’en remettre entièrement aux entreprises pour la qualité des activités proposées. En résulte une véritable loterie de formation : certains élèves d’une même classe accèdent à des tâches formatrices quand d’autres se voient confinés à des activités répétitives. Une telle disparité est incompatible avec l’équité républicaine. Des contraintes financières aggravent ces inégalités, comme l’achat de chaussures de sécurité, indispensables en entrepôt, dont le prix compris entre 90 et 135 euros, n’est pas systématiquement couvert par les lycées et repose alors sur les familles.
Le SNALC dénonce une dérive qui éloigne les PLP de leur mission d’enseignement, sans que le travail supplémentaire soit rémunéré, et sans garantir une formation équitable pour tous. L’ouverture à l’entreprise ne peut justifier un tel déséquilibre : les TP délocalisés doivent rester exceptionnels, reposer sur le volontariat des PLP et donner lieu à une rémunération du travail supplémentaire.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1508 du 19 décembre 2025





