Dans un monde gouverné par les chiffres et soumis à la dictature de la performance, il est logique de voir des rapports divers et variés se multiplier de toutes parts et à tout propos.
Dans l’Éducation nationale, certains sont le fruit d’une méthodologie rigoureuse, d’autres n’ont pour objectif que d’appuyer une nouvelle politique publique dans le mépris le plus total de ce que les professeurs constatent au quotidien dans leur classe. Mais parfois, un rapport propose des mesures frappées au coin du bon sens dont il faut s’emparer. C’est le cas pour le rapport contenu dans le bulletin de l’Institut des politiques publiques Perspectives budgétaires juin 2025, Taille des classes et inégalités territoriales : quelle stratégie face à la baisse démographique ? qui s’intéresse aux effectifs des classes du premier degré. Le SNALC en présente son analyse.
Dans un contexte de baisse démographique internationale, on constate une diminution de 8 % du nombre d’élèves en France depuis 2015 et les projections prévoient une baisse supplémentaire de 19 % d’ici 2034. On le sait, les classes françaises sont parmi les plus chargées d’Europe, voire de l’OCDE. Deux possibilités se présentent donc face à la baisse démographique : supprimer 50 000 postes d’enseignants ou permettre enfin la réduction de la taille des classes. Ce rapport chiffre de manière précise le coût et l’impact des deux hypothèses.
PROFITER DE LA BAISSE DÉMOGRAPHIQUE POUR DIMINUER LE NOMBRE DE POSTES
La première option semble évidemment la plus dans l’air du temps. Le rapport souligne d’ailleurs le faible investissement de la France dans l’école primaire. En 2021, la dépense par élève y était inférieure de 11 % à la moyenne des pays de l’OCDE et de 18 % à celle de l’Allemagne.
Il ne serait donc pas étonnant que le ministère de l’Éducation nationale tire parti de cette baisse démographique pour réduire les dépenses. En effet, une suppression de 5 300 postes en équivalents temps plein (ETP) chaque année, soit 53 000 ETP sur les dix prochaines années, représenterait une diminution de 19 % des effectifs des professeurs des écoles. Cela permettrait de générer une économie budgétaire annuelle de 3,4 milliards d’euros d’ici 2034. Une opportunité financière difficile à ignorer pour le gouvernement !
MAINTENIR LE NOMBRE DE POSTES POUR AMÉLIORER LE TAUX D’ENCADREMENT
Plusieurs études menées aux États-Unis et en Suède ont mis en évidence l’impact de la taille des classes sur l’avenir des élèves. Ceux qui ont bénéficié de classes réduites ont une probabilité accrue d’accéder à l’enseignement supérieur et de percevoir des revenus plus élevés à l’âge adulte.
Une telle mesure améliore en outre sensiblement les conditions de travail des PE et renforce l’attractivité du métier.
Elle engendre également d’autres effets positifs tels que la participation civique et l’amélioration de la santé. De fait, la réduction des classes augmente mécaniquement les recettes fiscales et favorise la baisse de certaines dépenses.
Les conclusions du rapport sont formelles : maintenir les effectifs enseignants afin de réduire la taille des classes générerait 9 € de gains salariaux futurs par euro net dépensé. À long terme, une réduction du nombre d’enseignants engendrerait un coût économique bien supérieur aux économies réalisées d’autant plus que cette solution apparaît comme une mesure budgétaire coûteuse.
Dès lors, le SNALC ne peut qu’espérer que ce rapport sera lu et suivi d’effets. Il faut noter également que l’étude contient des projections très intéressantes sur les évolutions démographiques des différents départements. Ces projections justifieront d’adapter localement le nombre d’enseignants en fonction des ajustements démographiques et des indices de positionnement sociaux afin de garantir un principe d’équité de moyens.
Pour le SNALC, il n’est pas acceptable de réaliser des économies qui creuseront les déficits de demain et pèseront lourdement sur la santé et les conditions de travail des professeurs des écoles. Il est grand temps que le bon sens et la vision à long terme guident les décisions !
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1507-École du 28 novembre 2025




