Mot du président
Jean-Rémi GIRARD
Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1491 du 12 juillet 2024
Même si le SNALC est indépendant des partis politiques, il paraîtrait étrange de ne pas s’arrêter sur les résultats des élections législatives consécutives à la dissolution décidée par le président de la République. Non pas pour commenter les équilibres, mais pour signaler que nous entrons dans l’inconnu, et que l’inconnu s’étend au ministère de l’Éducation nationale.
À l’heure où j’écris ces lignes, Nicole Belloubet est toujours ministre, et la vie continue comme si rien ou presque ne s’était passé. Hautement politique elle aussi et à la limite du panégyrique, la circulaire de rentrée a été envoyée et, comme chaque année, personne ne l’a lue. Les groupes en 6e et 5e sont toujours prévus, quand bien même de plus en plus de collèges renoncent à les mettre en place, faute de moyens et d’intérêt pour cette usine à gaz. La généralisation des évaluations nationales à l’ensemble des niveaux de l’élémentaire et du collège est en route, avec un groupe de travail qui a eu lieu le 10 juillet. La ministre fait le forcing pour publier le texte qui cadre la réforme de la place du concours et de la formation initiale, quand bien même la moitié de ladite réforme n’est toujours pas écrite. Les agrégés font les frais d’un décret mesquin paru entre les deux tours, qui décentralise leur gestion, comme si c’était là l’urgence.
La position du SNALC est très claire : une élection a eu lieu, et elle n’autorise pas le gouvernement actuel à prendre des décisions politiques dans sa gestion du ministère. La raison voudrait qu’on appuie sur le frein et non sur l’accélérateur. Qu’on ne publie pas ce qui n’a pas encore été publié, et qu’on revienne sur tout ce qui est cause de désorganisation, comme les groupes en collège ou l’expérimentation des pôles d’appui à la scolarité (PAS) dans le cadre d’une école inclusive qui ne sait plus que changer les sigles pour masquer l’atrocité des conditions dans lesquelles elle place élèves et personnels.
Le SNALC jouera donc à plein son rôle de lanceur d’alerte à chaque fois que les « affaires courantes » ne feront pas l’affaire. Il portera auprès de son futur interlocuteur les attentes des collègues. Car pendant que le pays est en recherche d’une stabilité, l’École, elle, vit une crise nettement plus grave que celle des institutions de la Ve République. Les chiffres des reçus aux concours sont catastrophiques, avec plus de 3 000 postes non pourvus. Aucun rattrapage salarial n’aura lieu cette année. Si le politique pouvait, enfin, s’emparer de ces sujets, et nous éviter une rentrée sur l’unique thème « uniformes versus abayas », ce serait le bienvenu. Après tout, nous sommes dans une situation inédite, non ? C’est le bon moment pour vivre une autre situation inédite : celle où le pouvoir s’occupe de régler les problèmes réels remontés par le SNALC plutôt que de se perdre dans des calculs d’appareils. Notre message au personnel politique est donc le suivant : merci de vous mettre d’accord pour sauver l’École, qui ne tient plus que par la bonne volonté et l’épuisement de personnels dont la voix, que nous portons, doit urgemment être écoutée et entendue.