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N’insultons pas notre intelligence

Mot du président

Jean-Rémi GIRARD

N’INSULTONS PAS

NOTRE INTELLIGENCE

Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1450 du 19 février 2021

C’était le 9 février dernier en comité technique ministériel. Aux longues déclarations, dont certains se font une spécialité dans les instances du ministère, le SNALC avait préféré l’esprit de synthèse pour commenter, entre autres, les 1 800 suppressions de postes dans le second degré à la rentrée prochaine : « Il faut arrêter de faire des Grenelle de l’éducation où l’on prétend chercher à améliorer les conditions de travail des personnels quand, dans le même temps, on mène une politique qui les dégrade. C’est une insulte à notre intelligence. »

Beaucoup d’insultes sont faites à notre intelligence, ces derniers temps. Comme le 16 février, lors du point sanitaire entre le ministère et les syndicats représentatifs, où l’on nous explique que l’allègement du protocole sanitaire (notamment sur la non automaticité des « cas contacts » chez les personnels(1)) est un « renforcement ». Où l’on nous signale, alors même que le problème est soulevé par le SNALC et d’autres depuis longtemps, que la reconduction des contractuels embauchés en novembre dernier et jusqu’aux vacances de février pour faire face à la crise n’est « pas complètement stabilisée » en interministériel. On n’a jamais prononcé autant de mots pour masquer une absence complète de contenu. Sur les raisons scientifiques des modifications, s’il y en a. Sur les éventuelles raisons économiques et de gestion des ressources humaines qui vont probablement avec. Et, parce qu’il va bien falloir le dire, sur le fait que non, l’Éducation nationale n’est clairement pas une priorité aujourd’hui.

C’est sûr, il y a du monde pour déplorer le faible niveau de rémunération des professeurs et des autres catégories de personnels, mais il y en a beaucoup moins pour déposer une proposition de loi afin que la question soit débattue et votée au niveau de la représentation nationale. Il y a du monde pour assurer que oui, on travaille à l’amélioration de la situation des AESH, mais il y en a beaucoup moins pour y travailler concrètement avec leurs représentants syndicaux. Il y a du monde pour nous expliquer que la réforme du lycée nécessite des adaptations dans le supérieur (que ce soit à l’université ou en classes préparatoires), mais il y en a beaucoup moins pour mettre les moyens financiers et humains pour permettre ces adaptations. La réforme des CPGE ? « À moyens constants », évidemment ! Souvenons-nous qu’on nous vendait au départ une meilleure spécialisation de nos lycéens. Grâce notamment à l’abandon d’une des trois spécialités en fin de première, on est en réalité obligé de mettre des rustines ici et là afin de rafistoler nos élèves. Et on nous sort un guide sur le contrôle continu en milieu d’année pour nous demander de « valoriser les trajectoires positives »(2)

Puisque nous parlons du supérieur, de nombreux médias et polémistes jouent la lutte des classes avec des trémolos dans la voix en opposant « étudiants riches » de prépa en présentiel et les « étudiants pauvres » de la fac à distance, mais c’est oublier que les BTS, qui recrutent à 43% des enfants d’ouvriers et d’employés (et qui ont trois fois plus d’étudiants que les CPGE) sont eux aussi en présence. Évidemment, c’est plus facile de déformer le réel pour qu’il colle à son idéologie préétablie que d’en analyser la complexité. Cela forcerait à admettre que la ligne de démarcation n’est pas celle de la richesse ou de la classe sociale, mais juste celle qui sépare le ministère de l’Éducation nationale de celui du Supérieur. Que d’énergie perdue, qui devrait plutôt être consacrée à réfléchir à trouver des modalités permettant une part de présence en université, comme le SNALC l’a pensé et défendu pour les écoles, collèges et lycées depuis juillet dernier. Sans oublier que ce ne sont pas les classes préparatoires qui décident des épreuves des concours, mais que ce sont elles auxquelles on reproche d’essayer d’y préparer leurs étudiants. Coupables, mais pas responsables, en quelque sorte…

Le SNALC n’insultant pas, lui, votre intelligence, ne multipliera pas les exemples. Il garde ses forces pour vous aider dans vos démarches, dans vos mutations, dans vos recours, dans vos problèmes quotidiens, qu’ils soient tristement banals ou terriblement exceptionnels. Non pas avec une intelligence artificielle, mais avec celle du coeur.

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(1) À lire dans notre compte rendu détaillé : snalc.fr/national/article/6382/
(2) À ce sujet, je vous invite à aller voir la vidéo du SNALC : https://www.youtube.com/watch?v=o03fIb69BsY

Le président national, Jean-Rémi GIRARD

le 19 février 2021

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