Si le protocole sanitaire dans les écoles va être allégé, les syndicats enseignants et les organisations parentales ne croient pas au retour des élèves annoncé dimanche par Emmanuel Macron.
Les directeurs d’école et chefs d’établissement ont une semaine pour tout préparer. À partir du 22 juin, les écoles et collèges rouvriront «selon les règles de présence normale», a annoncé Emmanuel Macron. La présence des élèves sera à nouveau obligatoire. Fini le volontariat pour les familles qui ne souhaitaient pas y remettre leurs enfants. Pour les parents d’élèves, ce «retour à la normale» est un soulagement. «C’est une très bonne nouvelle pour les parents qui souhaitent que leur enfant retourne à l’école, salue Rodrigo Arenas, coprésidents de la FCPE, première fédération de parents d’élèves. Même son de coche chez les enseignants : «Le caractère obligatoire est une bonne chose, c’est le retour d’une école républicaine et égalitaire», salue Francette Popineau, porte-parole du syndicat SNUIpp-FSU. Tous se montrent néanmoins sceptiques sur la capacité des établissements à accueillir tous les élèves, dans la pratique.
«Je ne vois pas comment tous les élèves pourront tenir dans une même classe malgré la réduction de la distanciation», s’inquiète ainsi Jean-Rémi Girard, président du SNALC (Syndicat national des lycées, collèges, de l’école et du supérieur). À ce jour, d’après les derniers chiffres du ministère de l’Éducation nationale, 1,8 million d’écoliers – sur un total de 6,7 millions – sont retournés à l’école mais rarement à temps complet. Au collège, ils sont 600.000 sur 3,3 millions. Invité d’Europe 1, au lendemain de l’allocution présidentielle, le ministre Jean-Michel Blanquer a précisé que le protocole sanitaire sera allégé. Au lieu des 4m² requis jusqu’ici autour de chaque enfant ou adolescent, la distanciation physique sera désormais d’un mètre latérale. D’autres assouplissements devraient être proposés, ayant par exemple des incidences sur la fréquence de désinfection des locaux ou l’organisation des récréations. Le nouveau protocole sanitaire devrait être publié mardi ou mercredi après une concertation avec les organisations syndicales.
«La règle du mètre latéral de distanciation ne changera pas grand-chose dans les faits. J’ai en vain tenté de l’expliquer ce matin au ministère: il faudra toujours que chaque élève puisse avancer ou reculer sa chaise pour se lever et s’asseoir à sa table», objecte Francette Popineau. Jean-Rémi Girard, du SNALC, partage son avis : «De nombreux établissements disposent de tables doubles par exemple. Un mètre entre chaque élève, cela signifie qu’une seule place sur deux ne pourra être occupée. On ne va quand même pas changer tous le mobilier scolaire pour seulement deux semaines de cours.» Il soulève également la question des enseignants dont la santé présente un risque face à la maladie. Devront-ils retourner dans leur établissement ? «Le ministère n’a pas été d’une clarté totale sur ce point, regrette-t-il. Or les directeurs d’école et les chefs d’établissements ont besoin de rapidement savoir qui sera présent. Pour l’instant, ce n’est pas clair.»
«Au ministère, c’était l’improvisation la plus totale ce matin. Cela donne le sentiment que les décisions viennent d’une personne déconnectée de la réalité . Or c’est à nous qu’il revient ensuite de l’appliquer ensuite. C’est malheureusement toute l’histoire de cette crise», déplore Francette Popineau. «Les directeurs d’établissement connaîtront sans doute mercredi le détail du protocole sanitaire. En quelques jours, ils devront vérifier la distance entre les tables, appeler les professeurs, communiquer avec les parents…» En première ligne, les directeurs et directrices d’écoles se retrouvent une nouvelle fois coincés entre les directives gouvernementales, un protocole sanitaire qui les en empêche et la pression des parents. «C’est la troisième ou quatrième fois qu’ils doivent revoit toute l’organisation. Les directeurs d’école commencent à se fatiguer alors les événements du début de l’année scolaire ont montré combien leur mission était difficile», ajoute Jean-Rémi Girard.
Ce «retour à la normale» risque à nouveau de décevoir des parents d’élèves. Ces derniers jours, ils ont été nombreux à faire part de leur impatience et épuisement, du fait du nécessaire suivi scolaire de leurs enfants alors que leur activité professionnelle reprenait de manière plus soutenue. «Entre le dire et le faire, il y a eu jusqu’ici un grand écart. Depuis le début de la crise sanitaire, la politique du gouvernement a été de s’en remettre à la débrouille des parents,s’emporte Rodrigo Arenas de la FCPE. Pour ces derniers, comme les enseignants, ces volte-face successives, ordres puis contre-ordres sont tout simplement épuisants à la fois physiquement et psychologiquement. Il faut penser aux parents séparés, qui habitent parfois loin l’un de l’autre, à ceux qui avaient envoyé leurs enfants en garde chez les grands-parents. Maintenant, nous allons prendre le président aux mots. Le 22 juin au matin, aucun parent venu déposer son enfant ne doit se voir opposer un refus.»
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