Mot du président
Jean-Rémi GIRARD
Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1486 – école du 16 février 2024
Une fois encore, une com’ assertive accouche d’une mise en œuvre aux fraises.
Entre le Gabriel Attal de novembre, dossier de presse à la main, éléments de langage à la bouche, et l’Amélie Oudéa-Castéra de janvier, lancée dans le grand bain sans flotteurs, la « priorité à l’éducation » et le « choc des savoirs » en ont pris un sacré coup dans l’aile. Et le premier degré, pourtant indispensable à l’acquisition des « fondamentaux » chers à notre gouvernement, a quasiment disparu des radars. Sauf chez la députée Rilhac, qui non contente d’avoir pondu une loi qui n’a aidé en rien les directions d’école, bien au contraire, veut remettre ça en faisant une nouvelle fois miroiter les décharges et l’aide administrative qu’elle a complètement échoué à nous apporter la fois précédente.
Pourtant, côté syndical, le SNALC fait le travail. Nous expliquons qu’imposer des évaluations nationales chaque année en élémentaire ne va pas aider les collègues. Que le souci, ce n’est pas de labelliser les manuels, mais de les financer. Que changer les programmes du CP au CE2 pour la rentrée prochaine alors qu’on est déjà au moins de février relève de la maltraitance institutionnelle. Que supprimer des postes, dans un temps où l’on a besoin de moins d’élèves par classe et de RASED, montre bien que la priorité à l’école est du pur affichage.
C’est pourquoi nous avons pu avertir la nouvelle nouvelle ministre, Nicole Belloubet, qu’il y a le feu au bâtiment. D’un côté, les données structurelles sont toutes au rouge : crise des recrutements sans précédent et désormais étendue aux professeurs des écoles, paupérisation de nos métiers, absence de plus en plus marquée du respect de la fonction par les familles. Les données sont d’ailleurs objectivées par le ministère lui-même. Les excellentes enquêtes de son département statistique (la DEPP), dont le SNALC a rencontré la directrice dernièrement, sont sans appel : le bien-être au travail est au plus bas, le temps de travail effectif au plus haut, les parents au plus violent. De l’autre côté, la technostructure peine à suivre le rythme, lance des expérimentations — l’uniforme, toujours utile pour attirer l’œil des médias — sans protocole expérimental préétabli, et aggrave les problèmes qu’elle est censée résoudre. Nous avons particulièrement alerté sur l’acte II de l’école inclusive, qui permettra à la société de nous pointer davantage encore du doigt sur la non prise en compte des besoins éducatifs particuliers, alors que nous sommes livrés à nous-mêmes dans un fonctionnement au rabais qui nous impose d’échouer.
Pour le SNALC, c’est le ministère lui-même qui a besoin d’un choc. Pour lui permettre une prise de conscience salutaire : qu’il se rende compte qu’aujourd’hui, il incarne le principal problème dans notre système éducatif, et qu’il ferait mieux d’acheter des extincteurs plutôt que de multiplier les foyers d’incendie. Et qu’il est plus que temps d’écouter une organisation comme le SNALC, cohérente, au plus près des attentes de terrain, qui n’a d’autre intérêt que d’améliorer la situation. Sans quoi, l’École de la République continuera de brûler.