L’École semble coincée dans les rouages d’une tourmente politique qui, tel un carrousel infernal, tourne inlassablement… Sa musique, d’abord familière, est devenue aujourd’hui assourdissante, oppressante, presque effrayante : celle d’un manège qui emporte les espoirs et épuise les énergies. Ce cycle infernal donne le tournis et occulte l’urgence d’une situation pourtant critique. Pendant que les responsables politiques se disputent les projecteurs, la société reste en suspens. Mais la réalité de l’École, elle, continue inexorablement de se dégrader. Les problèmes s’accumulent, les incohérences aussi. Rien ne va plus. Les relations, de plus en plus conflictuelles avec les parents, en témoignent. Ces derniers ont perdu confiance — et pour cause : une grande partie des professeurs des écoles également.
Depuis des années, comme si l’instabilité était devenue la norme, les professeurs des écoles sont ballotés au gré des vents politiques, sans jamais savoir si les réformes de la veille seront encore valables le lendemain. Ainsi, une fois de plus, dès septembre, à peine les cartables ouverts pour la rentrée, la menace d’une dissolution politique planait déjà, ajoutant une nouvelle incertitude à un quotidien déjà fragile. Et c’est le retour des mêmes rengaines et de la même petite musique : durée des vacances infiniment trop longues ou semaine de 4 jours tellement dévastatrice…
Après quelques semaines de classe, les professeurs des écoles ressentent donc déjà un sentiment d’épuisement, las d’un métier devenu trop éprouvant.
Or, bien que le pays soit au bord de la banqueroute, le Ministère continue de prétendre que tout va bien, que tout est maîtrisé, que la situation financière du pays n’a aucune incidence sur le fonctionnement de l’Éducation nationale. On nous annonce une nouvelle décision, un nouveau plan, une nouvelle réforme… Sur le terrain, tout le monde sait pertinemment que ce sera coûteux et que ce sera irréfléchi, malvenu, inadapté ou inapplicable, faute de moyens humains et de clairvoyance.
Le SNALC est, lui aussi, exaspéré. La preuve : il a choisi de claquer la porte du premier groupe de travail ministériel de l’année, dédié au référentiel de formation des futurs enseignants du premier degré. Ce sujet met en lumière le flou récurrent concernant les objectifs du Ministère et l’incertitude plus qu’inquiétante sur le budget alloué à la formation, le tout dans un contexte de finances publiques particulièrement fragiles. Le SNALC a estimé que le moment était particulièrement mal choisi pour complexifier davantage l’existant avec une formation coûteuse très spécifique, potentiellement inadaptée, et qui, de toute évidence, ne constituait pas une priorité. Mais sans surprise, à peine quatre jours plus tard, l’arrêté fixant le cadre national de la licence professorat des écoles a été publié au Journal officiel.
Le manège infernal ne s’arrête jamais et rend toute la profession malade. Depuis plus de vingt ans, la situation de l’École est critique. Les gouvernements successifs n’ont cessé d’enchaîner modifications, réformes, adaptations et remises en question, prétendant vouloir améliorer les choses. Bien souvent, les décisions ont été descendantes, prises sans tenir compte des avis, des critiques et des inquiétudes des élus du personnel. Année après année, elles n’ont fait qu’aggraver une situation devenue intenable et amènent peu à peu l’École vers son point de rupture.
Le SNALC le répète, ce carrousel cauchemardesque doit s’arrêter. Il en va de la santé et de l’avenir de notre École publique, de notre profession et des générations futures
Article publié dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1505-École du 3 octobre 2025