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Le Figaro TV – une professeure menacée pour avoir montré un tableau

« à chaque fois qu'on voit ressurgir des menaces de mort, de fausses accusations, il y a évidemment une forme de crispation, de tension, parce qu'il y a beaucoup d'incidents avec les élèves, mais aussi de plus en plus avec les familles.»
Jean-Rémi Girard
Président du SNALC

Yvelines : une professeure menacée pour avoir montré un tableau

Jean-Rémi Girard, président du SNALC, est l’invité, de Victoire Sikora sur Le Figaro TV mardi 12 décembre 2023.

Le Figaro TV – Victoire Sikora

Nous avons évoqué hier dans l’émission la condamnation de six collégiens à de la prison avec sursis suite à l’assassinat de Samuel Paty, professeur tué par un islamiste radical après avoir montré à ses élèves des caricatures de Mahomet. L’actualité nous rappelle avec effroi ce drame dans les Yvelines. Des professeurs d’un collège ont exercé leur droit de retrait, estimant à juste titre ne plus se sentir en sécurité. Une professeure de français a en effet été agressée verbalement après avoir présenté un tableau du XVIIe siècle à ses élèves. Gabriel Attal s’est rendu dans le collège cet après-midi. On écoute sa réaction. (…)

Pour évoquer ce sujet, Jean-Rémi Girard est en plateau avec nous. Vous êtes président du Syndicat national des lycées, collèges, écoles du supérieur. Merci beaucoup d’être avec nous. On ne peut pas s’empêcher de faire un lien avec cet écho sinistre au meurtre de Samuel Paty. Est-ce que la communauté enseignante est inquiète ?

SNALC – Jean-Rémi Girard
La communauté enseignante est inquiète. Elle l’était évidemment lorsqu’il y a eu l’assassinat de Samuel Paty. Elle l’était encore plus quand il y a eu l’assassinat de Dominique Bernard. Donc effectivement, à chaque fois qu’on voit ressurgir des menaces de mort, de fausses accusations, il y a évidemment une forme de crispation, de tension, parce qu’il y a beaucoup d’incidents avec les élèves, mais aussi de plus en plus avec les familles.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Cette enseignante est professeure de français et, dans le cadre de son cours, elle a décidé de montrer à ses élèves ce tableau. C’est un tableau magistral du XVIIe siècle signé Giuseppe Césari, “Diane et Actéon”. On comprend mal le déferlement de haine, de violence qui peut découler du tableau qu’on voit s’afficher.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, moi-même je suis professeur de français. D’ailleurs, j’ai beaucoup enseigné en classe de sixième.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Pourquoi utilise-t-on ce tableau en cours de français ?

SNALC – Jean-Rémi Girard
On utilise ce tableau sans aucun doute parce qu’on traite de la mythologie grecque et latine. Je faisais cela en cours de sixième, c’est généralement dans les programmes. On parle des héros et des héroïnes, et on illustre souvent pour montrer que la mythologie dure dans le temps et dans les arts. On est aussi censé, en tant que professeur de français, faire des relations entre la littérature et d’autres arts, dont la peinture. Et ce tableau montre l’un des mythes très connus des Métamorphoses d’Ovide. Donc, c’est Actéon qui surprend Diane et ses suivantes, et Diane qui va le changer en cerf.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Donc, pour vous, c’est quelque chose qui vous paraît d’un point de vue pédagogique tout à fait cohérent et pertinent dans le cadre de l’étude de l’histoire de l’art, du français, de la littérature…?

SNALC – Jean-Rémi Girard
On peut difficilement être plus dans le programme. Moi, je n’ai jamais montré cette œuvre-là parce que, justement, il y a une liberté pédagogique. Je passais plutôt par des opérettes d’Offenbach, sur Orphée aux Enfers. Mais c’est parfaitement quelque chose que j’aurais pu montrer à mes élèves, et je ne me serais jamais posé la question de savoir si ça allait choquer ou pas.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Alors, ce qui choque, ce sont ces cinq femmes nues. Certains élèves se sont révoltés, assurant avoir été profondément choqués. D’autres n’ont pas hésité à qualifier leur professeur de raciste et à prétendre que présenter ce tableau aurait été une provocation réfléchie à l’encontre de la communauté musulmane et des valeurs prétendues et défendues.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Certainement pas. Enfin, je n’imagine pas un seul instant ma collègue montrer ce tableau pour choquer une communauté. Je vous le dis, à sa place, je prépare mon cours, je traite de Diane et Actéon, je connais ce tableau, ou je fais des recherches et je vois ce tableau, alors je me dis c’est bien, je vais pouvoir faire une illustration, je vais pouvoir travailler sur la représentation picturale des mythes antiques. Enfin, c’est absolument certain que cette idée ne lui a jamais traversé l’esprit.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Alors, ces élèves qui se disent avoir été choqués dans la foulée du cours, ils ont pu s’exprimer puisqu’il y a eu une heure de vie de classe que je trouve assez saine pour faire ressortir justement les choses qui peuvent avoir blessé, choqué certains. C’était avec leur professeur principal. Sauf que là, on se rend compte que ça monte finalement, l’inquiétude gronde et puis les menaces se font de plus en plus violentes. Pourquoi est-ce qu’on n’a pas réussi à désamorcer ce qui aurait pu être un problème ? Bon bah oui, en effet, il y a eu des femmes nues qui ont été sur ce tableau et essayons d’en parler dans le cadre d’une vie de classe, ça aurait pu se passer comme ça.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Je crois que ça aurait tout à fait pu en rester là, selon les informations que nous avons eues. Toute la communauté enseignante a été en soutien de la collègue, y compris l’équipe de direction. Donc là, il n’y a pas eu de faille côté établissement, côté personnels de l’établissement. Mais à un moment, il faut bien se rendre compte qu’aujourd’hui, l’école n’est pas la seule source d’autorité reconnue par nos élèves, ni non plus par les familles. Les élèves ont évidemment une autorité familiale. Certains peuvent avoir d’autres sources d’autorité, une autorité religieuse, l’autorité de tout ce qu’ils regardent sur les réseaux sociaux, parfois aussi. Et donc, ils peuvent remettre en cause ce que nous faisons dans le cadre de programmes validés par l’État, parce que ça ne correspond pas à une autre autorité à laquelle, finalement, ils accordent plus de poids que l’école de la République.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
La mécanique, elle s’est très vite enrayée puisque le lendemain, vendredi, le principal du collège a reçu un courrier d’un parent d’élèves. C’est ce que vous nous expliquez, relatant les mêmes faits, évoquant “des propos racistes tenus par la professeure”. Et puis la dynamique, finalement, s’est enrayée rapidement, c’est ce que je disais, on s’est rendu compte que ce qui était un épiphénomène dans une classe a pris une ampleur importante.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui cela a pris de l’ampleur. Il faut bien voir aussi que ce collège a connu de nombreux incidents depuis la rentrée. C’est loin d’être la première fois. Justement, le chef d’établissement avait même signalé à sa propre autorité, donc au rectorat, qu’il y avait des difficultés dans l’établissement. Moi aussi, je suis dans le rectorat de Versailles, et le rectorat de Versailles a rarement tendance à répondre rapidement ou à répondre positivement à ce genre de choses. Et du coup, l’établissement était dans une situation, depuis la rentrée, qui était visiblement compliquée. Et ça, c’est ce qui a mis le feu aux poudres, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Je peux vous faire toutes les expressions, mais en tous les cas, ça a pris de l’ampleur. Sans aucun doute, c’est une situation qui rappelait très très fortement Samuel Paty, parce que ça a commencé quasiment de la même manière.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
De la même manière, évidemment, et c’est là où on prend la mesure de la gravité de ce qui peut arriver derrière. C’est pour ça que la professeure a porté plainte pour diffamation, elle a demandé une protection fonctionnelle, bien sûr, elle a également utilisé son droit de retrait. On la comprend, et elle a été suivie par d’autres professeurs qui eux aussi ne se sentent plus en sécurité dans l’établissement pour enseigner.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Oui, c’est très important. Cette collègue a eu les bons réflexes, ou elle a été conseillée en ce sens d’une bonne façon, puisque dans ces cas-là, ce qu’il faut faire, c’est effectivement porter plainte. C’est ce qui permet éventuellement aussi de lancer des enquêtes, des recherches pour voir s’il n’y a pas des choses qui sont en train de circuler sur les réseaux sociaux. Car ça peut aller très vite, et on ne sait pas par qui, quand et comment ça peut revenir, ni de quelle façon. Ensuite, c’est demander la protection fonctionnelle, c’est-à-dire que votre employeur, ici l’État, s’engage d’une part à vous payer des frais d’avocats s’il y a des procédures juridiques, mais surtout d’autre part, il prend la responsabilité d’assurer votre protection, c’est-à-dire de vous recommander, de vous dire quoi faire jusqu’à ce que le danger cesse. C’est quelque chose qu’on connaissait beaucoup moins avant l’assassinat de Samuel Paty. Nous, en tant que syndicat, aider les collègues à obtenir des protections fonctionnelles, c’est une mission qu’on accomplit de plus en plus.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Elle a eu les bons réflexes, vous l’avez dit.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Tout à fait.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Les professeurs qui se sont arrêtés aussi par solidarité ont eu aussi le bon réflexe pour alerter sur la situation, montrant qu’ils ne pouvaient plus travailler dans ces conditions. Et puis, je précise que des renforts ont été envoyés pour, je ne sais pas comment le dire, venir densifier finalement les effectifs et le corps professoral.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Voilà, mais vous voyez qu’il a fallu en passer par une alerte médiatique pour qu’enfin, le rectorat de Versailles se dise, ” Ah tiens, dis donc, dans ce collège, ça n’a pas l’air de se passer si bien. Si on renforçait un petit peu la vie scolaire ? “ Les collègues le demandaient depuis la rentrée, en fait. Ça se passait mal et effectivement, il a fallu que ce soit au niveau national, qu’il y ait une prise de conscience et surtout quelque chose de symboliquement fort, c’est-à-dire que le ministre Gabriel Attal lui-même est venu se déplacer dans l’établissement. Je ne me souviens pas que ça se soit passé comme ça avant l’assassinat de Samuel Paty. (…)

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Êtes-vous rassuré par la prise de parole de Gabriel Attal ?

SNALC – Jean-Rémi Girard
En tout cas, ça montre qu’il est derrière les professeurs du collège. Vous vous souvenez peut-être du mouvement “Pas de Vague”, où quand même les enseignants signalaient qu’on est souvent lâchés par notre hiérarchie quand ça se passe mal. Là au moins, il y a un affichage assez clair, un soutien assez clair du ministre. Et effectivement, ensuite les procédures disciplinaires, ça, on connaît. Ça, on sait le faire dans un établissement scolaire. Ça peut aller au conseil de discipline suivant la gravité des faits. Ça peut être le chef d’établissement qui détermine certaines sanctions de lui-même, puisque tous les élèves concernés n’ont peut-être pas eu le même comportement. C’est différent de se sentir choqué, et il y a une liberté de conscience. On peut se sentir choqué, et néanmoins continuer de suivre le cours. Mais faire courir des rumeurs comme quoi le professeur est raciste…

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Et peut-être faire remonter les choses intelligemment aussi.

SNALC – Jean-Rémi Girard
Et dialoguer avec les collègues. Des élèves qui ont eu un souci pendant le cours, qui ont trouvé quelque chose qui n’était pas normal, viennent me voir à la fin. On en discute très tranquillement. On désamorce, et généralement, ça se passe bien. C’est plus compliqué au collège, parce qu’en termes de maturité intellectuelle en 6e, ce n’est pas la même chose qu’au lycée. Et effectivement, parfois, ils ont certaines idéologies qui leur sont rentrées assez fortement dans le crâne. Et nous-mêmes, on a du mal à désamorcer ça, parce qu’on n’a pas les moyens et on n’a pas la capacité parfois de les atteindre et de leur faire se rendre compte qu’il faut relativiser certaines choses. D’où la nécessité d’être soutenu, et que le ministre de l’Éducation nationale rappelle qu’effectivement, à l’école, on ne touche pas aux professeurs ; que nous, on a des règles, si un professeur commet quelque chose qui ne va pas, on a des procédures disciplinaires, on a tout ça. Mais ça, c’est le job de l’employeur. Ce n’est pas le job des élèves, ce n’est pas le job des parents.

Le Figaro TV – Victoire Sikora
Il ne doit pas y avoir d’impunité. Merci beaucoup Jean-Rémi Girard, de nous avoir éclairés sur ce sujet, d’avoir évoqué avec nous ce souci dans les Yvelines, et donc dans ce collège où une professeure a été agressée verbalement. 

« ... il a fallu que ce soit au niveau national, qu'il y ait une prise de conscience et surtout quelque chose de symboliquement fort, c'est-à-dire que le ministre Gabriel Attal lui-même est venu se déplacer dans l'établissement. Je ne me souviens pas que ça se soit passé comme ça avant l'assassinat de Samuel Paty,....»
Jean-Rémi Girard
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