Connaissez-vous le Centre national d’étude des systèmes scolaires qui, dans le jargon institutionnel, répond au doux nom de CNESCO ?
Se définissant comme « une intelligence collective » – à défaut d’en receler d’individuelles ? –, il ambitionne de favoriser « le changement dans l’éducation » : co-enseignement, certifications et différenciations à gogo, « numérique pour dépoussiérer l’apprentissage », « école associant des acteurs divers »…
Programme alléchant, financé en grande partie par le MENJ. Son indépendance vis-à-vis du politique est donc évidente.
Parmi les trouvailles du CNESCO, un concept original mérite le détour : la « conférence de consensus », système où les intervenants sont invités à s’accorder avant même d’avoir débattu ! Art de la métonymie ou de la mythomanie ? À voir…
La perspicacité du CNESCO n’est plus à démontrer : pour preuve, le rapport consacré à l’attractivité du métier d’enseignant où l’on peut lire entre autres qu’il n’y a « pas de crise d’attractivité avérée sur le long terme » (1). Bien vu ! De même, le dossier sur la laïcité de 2020 (année sans histoire, comme on sait), rassurant, car : « le sujet semble apaisé dans la grande majorité des établissements. » (2)
C’est sûr, avec les copains du CNESCO, faute de lumières, on a affaire à des-potes éclairés ! En effet, qu’importe si l’expertise est démentie par l’expérience : foin des méthodes antédiluviennes ! Les « experts » du CNESCO luttent pour déconstruire les « croyances » (3) des « acteurs de terrain » (comprenez les professeurs), auxquels ils attribuent un cerveau d’une circonférence égale à une lentille du Puy – un petit (peu) salé, non ?
Malgré ses « contenus scientifiques robustes », rédigés dans un franglais feutré, le CNESCO n’est plus le conseiller officiel du ministère. Son rôle se réduit à « accompagner » (litote savoureuse) les politiques éducatives. Oh… quel dommage (!) CNESCO va bien pouvoir faire maintenant ?
Pas de panique ! Grâce à la très efficace « stratégie de dissémination » de ses « recommandations », reprises en chœur par les missi dominici de l’EN, voici une instance qui la baille belle à la liberté pédagogique… Chapeau, le CNESCO !
(1) Cnesco (2016) : Le métier d’enseignant attire-t-il toujours ? Dossier de synthèse. https://www.cnesco.fr/attractivite-du-metier-denseignant/ , p.17.
(2) Cnesco (2020) : Laïcité et religion au sein de l’école et dans la société : évaluation des attitudes citoyennes des collégiens et des lycéens. Paris : Cnesco-Cnam, p.40. https://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2021/02/210218_Rapport_laicite.pdf
(3) Cnesco (2015). Lutter contre les difficultés scolaires : le redoublement et ses alternatives. Dossier de synthèse. https://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2021/12/Dossier_synthese_redoublement_MAJ2022.pdf, p.12.
Article paru dans la revue du SNALC, la Quinzaine universitaire n°1476 du 14 avril 2023