COMPTE RENDU DE LA RENCONTRE ENTRE LE SNALC ET
LE CONSEIL DES SAGES DE LA LAÏCITÉ
Rencontre bilatérale du 23 octobre 2020
© Philippe Martin – Flickr.com
Une semaine après l’attentat barbare dont a été victime notre collègue, la peine est toujours vive.
Un hommage sera rendu le 2 novembre au matin. Le ministère souhaite qu’un sursaut soit envisagé et qu’une réponse soit construite.
L’école a été attaquée. Il faut trouver les moyens d’inculquer la laïcité.
Il s’agit dans cette audience de penser le long terme, l’évolution de l’Éducation nationale.
Le conseil des sages souhaite écouter les propositions et l’état des lieux dont dispose notre organisation.
LE POSITIONNEMENT DU SNALC
Le SNALC a rappelé ses positions claires sur la laïcité à l’école en soulignant par exemple qu’il a été la seule organisation représentant les enseignants à avoir voté pour la loi de 2004.
Notre syndicat a mené une réflexion de fond depuis longtemps sur les questions de la laïcité.
Le constat que nous dressons n’est pas récent : la question de la laïcité est difficile.
Nous sommes régulièrement saisis dans les académies de cas individuels dont on ne peut tirer une vérité statistique. Cependant, il est à noter que nous disposons même de remontées venant de maternelle, notamment dans la relation filles / garçons.
Pour le SNALC, l’administration n’a pas toujours été claire depuis que le débat est entré dans l’espace public en 1989.
Le principal message du SNALC est qu’avant d’être une question de pédagogie, l’enseignement de la laïcité est une question de capacité à faire bloc, à tous porter le même discours, y compris dans les niveaux supérieurs de la hiérarchie.
Le SNALC tient aussi à ce que le problème du « conflit de loyauté » soit pris en compte. Tout ce qui relève des parents et de la famille au sens large prime souvent chez l’élève sur ce qui est dit à l’école. Ainsi, un certain nombre d’éléments échappent à la sphère du scolaire.
Il peut être intéressant d’avoir des partenaires associatifs fiables qui permettent d’entrer plus facilement en contact avec certaines familles.
Concernant l’enquête menée par l’inspection générale, le SNALC attend d’être informé, notamment sur la question des accompagnateurs lors d’un rendez-vous.
Il faut, dans l’avenir, que l’on s’en tienne aux parents d’élèves (et lister clairement les exceptions à cette règle, par exemple pour un traducteur).
L’autre point concerne la protection du collègue à partir du moment où l’on disposait d’un certain nombre d’éléments.
LES ANALYSES DU SNALC
La question des programmes est secondaire
Les programmes d’EMC contiennent tout ce dont on a besoin mais ils doivent être adaptés aux horaires et aux conditions d’enseignement.
Au collège, il faut aussi les recentrer et les rendre annuels en évitant les redites dues au « spiralaire » entre chaque cycle.
Au lycée, le problème est la modularité du programme d’EMC. Il est logique qu’ils répondent à des revendications et à des problèmes sociétaux variés. Mais on a besoin d’un cadrage pour que tous les élèves aient quelque chose qui soit davantage commun.
Si quelque chose est à revoir sur programmes et horaires, c’est sur le lycée professionnel qu’il faut faire un travail, car les contenus se sont appauvris.
Au final, dans les programmes, il ne s’agit pas d’ajouter de la laïcité de façon transversale. Cela n’aurait que peu d’impact.
En revanche, armer plus les collègues d’un point de vue méthodologique sur le « comment » faire passer certaines notions qui peuvent être conflictuelles serait intéressant.
Formation
Il ne faut pas laisser s’installer l’idée que si notre collègue a été assassiné, c’est parce qu’il n’aurait pas été assez formé. Ce serait du domaine de l’injure. Il ne faut pas ajouter non plus à la formation initiale qui est déjà très chargée.
La formation continue est assez inexistante. Elle n’est pas toujours accordée. Il y a eu la formation laïcité. Mais on peine à trouver des collègues qui l’ont suivie.
Alors que la question de la formation en établissement est posée, le SNALC répond que si elle est en adéquation avec les besoins des équipes, elle peut être porteuse.
Si on met en place un grand plan de formation en ne formant que quelques collègues qui devront ensuite transmettre la bonne parole, ça ne marchera pas.
Enfin, il faut penser à former aussi — voire avant tout — les contractuels, qui sont d’ailleurs nombreux en voie professionnelle, là où le plus d’incivilités nous sont remontées.
Dans les besoins d’urgence : une forme d’automaticité de la protection fonctionnelle et une simplification des démarches afin qu’elle devienne une réponse plus rapide et qu’elle protège réellement les personnels. Il faut aussi que les collègues soient mieux informés de l’existence de cette protection fonctionnelle et de son utilité.
Autocensure
Lorsqu’une situation a été mal réglée, on a tendance à s’accommoder davantage de l’existant. Un collègue qui a eu affaire à une résolution de problème dans laquelle il ne s’est pas senti soutenu ne fera plus appel à sa hiérarchie.
Cela ne doit plus être le cas.
Les différents dispositifs et outils
Pour le SNALC, il est hors de question d’empiler de nouveaux dispositifs. Il faut rendre l’existant plus opérationnel.
La Charte de la laïcité est un objet d’étude et un outil intéressant notamment en primaire.
A Souâd AYADA qui demande comment cette charte peut être abordée avec les parents, le SNALC répond que cela se faisait souvent à travers le carnet de liaison, objet en voie de disparition. Il peut aussi être intéressant de l’intégrer au temps d’accueil des parents lors de la rentrée.
Le Vademecum sur la laïcité est bien. Une version papier serait souhaitable dans les établissements, car nombre de collègues ne le connaissent pas.
Formulaire « atteintes à la laïcité » : On l’a redécouvert car il ne s’est pas inscrit dans les us. L’enseignant a plutôt l’habitude de passer par la voie hiérarchique. Ce document à remplir en ligne est très peu connu. Et son rôle est peu clair pour les enseignants. Il donne l’impression de faire doublon.
Les réseaux sociaux
En tant qu’enseignants, nous n’avons aucun contrôle et aucune visibilité dessus. Le SNALC ne souhaite pas que l’on devienne un état totalitaire qui espionne les échanges des concitoyens. Cependant, il y a un travail interministériel à faire à partir du moment où on a un signalement et un danger.
Les professeurs documentalistes sont clairement pertinents dans la formation des élèves sur les problématiques liées aux réseaux sociaux, mais pour cela il faut les laisser enseigner.
Pour boucler la boucle et revenir aux programmes, en enseignement de SNT, le seul aspect sociologique abordé est la théorie dite des « six poignées de mains ». Cet enseignement s’inscrirait pleinement dans la formation du citoyen si l’on s’intéressait aux mécanismes qui sous-tendent le fonctionnement des réseaux (l’addiction par le biais de l’appel à l’émotion plutôt qu’à la réflexion).
Le SNALC a enfin indiqué qu’il est évidemment disposé à s’entretenir de nouveau avec les sages si ces derniers souhaitent des échanges plus longs.
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