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La souffrance psychologique et sa gestion en EPS

Souvent inavouée la souffrance psychologique des professeurs d’EPS est masquée derrière une image dynamique et des propos évoquant une difficulté transitoire ou une normalité à endurer : « Je suis crevé ! », «Cette classe est difficile, ingérable…», « J’ai la trouille avec cet élève…», « Je ne m’en sors pas dans cette activité ! »… Voici un état des lieux autour de cette importante problématique ainsi que des conseils et des propositions portés par le SNALC visant à y remédier..

LA DÉVALORISATION INDIVIDUELLE ET PROFESSIONNELLE

En premier lieu, les professeurs d’EPS enseignent une discipline souvent jugée secondaire voire accessoire ce qui représente une difficulté psychologique pour 65% d’entre eux 1. Sur ce point, l’intégration des professeurs d’EPS au corps des certifiés serait une reconnaissance légitime que nous défendons et que nous avons amplement justifiée 2.

En second lieu, comme tous les enseignants, les professeurs d’EPS souffrent d’une dévalorisation sociale et économique. Pourtant recrutés par concours à Bac +5, ils ont perdu 25% de leurs revenus en 30 ans 3 et connaissent une paupérisation sans précédent qui contribue à une déconsidération de leur statut. Ce n’est pas la mise en oeuvre du PPCR qui appauvrit les uns pour enrichir les autres et fait miroiter un grade exceptionnel réservé à une infime élite, qui pourra limiter cette tendance.

Enfin, la profession souffre d’une stigmatisation injuste bien orchestrée par l’institution qui divise et oppose les catégories professionnelles pour mieux les affaiblir et les réformer. Les fonctionnaires sont décrits comme des privilégiés et les professeurs comme des personnels travaillant à mi-temps et bénéficiant de nombreux congés. Aussi la restauration de la journée de carence, le gel du point d’indice et bientôt l’alignement du calcul des retraites sur celui du privé semblent des mesures légitimes alors qu’elles ne sont que déconsidération et techniques de sape du métier. Elles préparent insidieusement l’abandon de l’éducation publique au profit d’une « économie des savoirs » 4 où l’école de demain, privée et élitiste, sera fondée sur une logique ultra-libérale et l’investissement.


LES DÉVIANCES, LES INCIVILITÉS ET L’INSÉCURITÉ

La société et son école sont en crise. La mondialisation, le déclin industriel, le chômage de masse, l’accroissement des inégalités entre les personnes et les territoires, la montée de l’individualisme, du pédocentrisme, des communautarismes, le recul des grandes valeurs et de l’autorité, la défiance à l’égard des institutions,… sont autant de mutations qui impactent les élèves et l’école. En recherche d’un nouveau souffle et chargée d’endiguer toutes les dérives éducatives et sociétales, l’école est à la peine. Confrontés à ce que F. DUBET définit comme « une sous-culture de l’opposition scolaire » 5, les professeurs sont plus que jamais en première ligne et l’exercice du métier devient de plus en plus difficile.

Les déviances et les incivilités, conçues comme un ensemble de nuisances sociales variées visant à bousculer les règles élémentaires de la vie collective, à défier l’ordre public et à génèrer une instabilité et une insécurité constantes 6, détériorent la relation pédagogique, freinent les apprentissages et pèsent sur la motivation et le moral des professeurs. Elles conduisent à l’épuisement professionnel et à une souffrance au travail, perceptibles dans la multiplication des arrêts pour dépression ou burn-out, à la désertification des concours de recrutement et à la multiplication des démissions.

Dans l’attente d’une recette miracle, le règlement interne d’EPS demeure un point d’appui indispensable. Ce règlement construit par l’équipe pédagogique doit préciser tous les attendus permettant le bon fonctionnement collectif et pédagogique ainsi qu’une échelle de sanctions détaillée. La tenue d’EPS, l’accès aux installations, l’utilisation des vestiaires, les comportements en cours… doivent être clairement décrits. Ce règlement propre à l’EPS doit idéalement être annexé au règlement intérieur de l’établissement et figurer dans le carnet de liaison des élèves. Il est voté et donc légitimé par le conseil d’administration. La vie scolaire et les responsables administratifs, rouages indispensables dans cette lutte pour le respect sont chargés de son application pour soulager les professeurs dans cette contrainte disciplinaire et soutenir leur autorité.

Plus inquiétant encore, on compte aujourd’hui plus de 400 incidents graves déclarés par jour dans les établissements du secondaire dont plus de 80% concernent des atteintes aux personnes, verbalement (40%) ou physiquement (30%) 7.

Elles doivent donner lieu à des mesures fermes et immédiates qui engagent le chef d’établissement, sans détours, sans recherche de minoration des faits ou de protection d’une renommée. Parallèlement, la victime peut « déposer une main courante voire une plainte en cas de faits avérés » 8 pour faire respecter ses droits. L’assistance juridique de la GMF comprise dans l’adhésion au SNALC est aussi un recours possible.


LE MAINTIEN DE L’ÉCOUTE ET DE L’ORDRE

La réceptivité des élèves, leur capacité d’écoute, d’adhésion et de persévérance sont devenues majoritairement problématiques 5. L’obtention d’une attention collective de qualité, préalable et essentielle à toute activité, est énergétivore pour les professeurs. Elle entraîne au fil du temps une usure. Les leçons de natation sont à ce titre exemplaires et paroxystiques (acoustique déplorable, oreilles immergées, élèves instables et inattentifs…).

En EPS, les attentes institutionnelles en matière de formation méthodologique, centrées sur des observations multi-critériées, des temps d’analyse, d’auto et co-évaluation, de définition de projets, de verbalisation… inscrivent l’EPS dans une dimension intellectualiste qui nécessite de multiplier ces temps d’écoute, de réflexion et d’immobilité, en rupture avec les attentes des élèves, plus soucieux de se dépenser que de penser. Elles génèrent ainsi des conflits dans la relation pédagogique, particulièrement dans des contextes difficiles, qui conduisent les professeurs à une démotivation et à un épuisement liés à un maintien de l’ordre et de l’attention artificiel, superflu et contre-productif. Ces attentes scolastiques contribuent directement à l’accroissement des souffrances professionnelles.

Il serait temps de réduire ces écarts entre les aptitudes et les appétences du public scolaire et les contenus d’enseignement proposés en EPS. Comme nous l’avons publié 9, les situations ludiques, dans et par l’action, offrent toutes les possibilités d’atteinte des objectifs et des finalités que l’EPS s’est assignée. Les jeux didactiques et sportifs permettraient l’obtention plus facile de l’adhésion et de la persévérence des élèves, la réduction des conflits dans des temps de gestion de l’attention centrés sur l’activité ludique, la maximalisation des temps pratiques et la préservation des ressources des professeurs au bénéfice de leur disponibilité et de leur santé.


LA DÉMULTIPLICATION DES MISSIONS

L’école n’est plus seulement un lieu d’enseignement mais un remède social de masse qui, comme un chirurgien, est chargée de réduire toutes les fractures. La démultiplication des missions qui incombent aujourd’hui aux professeurs sommés de contrecarrer toutes les carences sociétales (éducation à la nutrition, à la santé, à la sexualité, à la sécurité, à la laïcité, à la citoyenneté…) tout en poursuivant l’instruction et la clôture de leur programme, les place dans un système cornélien sinon schizophrène. Les temps d’éducation particulièrement pléthoriques et devenus sans limite, entrent en tension avec ceux de l’instruction toujours aussi conséquents, complexes et sans cesse à reconstruire au gré de réformes contradictoires.

Les professeurs sont soumis à un stress sans précédent. P. PERRENOUD n’hésite pas à décrire « un métier impossible qui oblige à affronter des contradictions irréductibles » 10. En plus de l’épuisement, la diversification des misions engendre la culpabilité de ne pas réussir, une dépréciation de l’estime de soi, une remise en question de sa valeur et de sa compétence professionnelle. Elle facilite des évaluations négatives et dévalorisantes et accroît in fine la souffrance au travail. Une telle pression, injuste, doit être reconnue, dénoncée et combattue.


UNE FORMATION INITIALE INADAPTÉE

La formation initiale, très théorique, assujettie aux modes des dernières stratégies d’enseignement qui n’ont fait leurs preuves qu’en situation expérimentale ou dans des contextes protégés, qui font fi des pratiques éprouvées et efficaces acquises par l’expérience, est loin d’être une aide pour les professeurs débutants. Soumis au dernier dictat didactique en vogue dans les ESPE, ils doivent se conformer à des procédures d’enseignement sophistiquées, complexes, comme les classes inversées, nouvelle grande découverte, pour satisfaire aux attentes d’une hiérarchie complice et soumise aux directives ministérielles, plus souvent politiciennes et démagogiques que pédagogiques et bienveillantes.

Ce formatage conceptuel des néo-professeurs inadapté à leur niveau d’expérience et en grand décalage avec des contextes d’enseignement majoritairement réfractaires, qui nécessitent au contraire des procédures simples, claires et fonctionnelles, les place d’emblée en grande difficulté et en souffrance. Une étude menée par l’Université de Bordeaux a démontré que près de 50% des enseignants en début de carrière étaient en état d’épuisement émotionnel 11. Tout ceci explique en grande partie la multiplication par trois du nombre de démissions des jeunes enseignants ces dix dernières années 11.

Les professeurs débutants devraient disposer d’une formation pragmatique et opérationnelle centrée sur des stratégies et des contenus d’enseignement simples articulés sur la réalité des contextes scolaires et non sur des élèves épistémiques. L’expérience cumulée en EPS devrait être synthétisée dans un répertoire de situations pédagogiques clés, hiérarchisées et adaptées aux caractéristiques connues des élèves. Ce répertoire serait une base qui sécuriserait les professeurs débutants et faciliterait grandement leurs premiers pas. Le succès par défaut du site non institutionnel « Pepsteam », comme en attestent ses 25 000 membres et ses 1 000 visiteurs journaliers, répond à cette demande et comble une lacune inadmissible.

Enfin, il nous semble que l’idée d’un compagnonnage entre professeur expert et débutant mériterait d’être sérieusement étudiée. L’expert, reconnu pour ses compétences, volontaire et en fin de carrière, partagerait son temps de travail avec un novice. Chacun assumerait 10 h d’enseignement. Le tuteur compléterait son service de 20 h, par 10 h d’aide à la préparation des leçons et à l’accompagnement pédagogique en classe du stagiaire qui lui donneront l’occasion de transmettre complètement ses connaissances et son expérience. Voilà une proposition innovante, simple, pragmatique et réellement bienveillante que le SNALC entend bien porter, pour une EPS autrement… !



(1) MEN DEPP : Etre professeur d’EPS en 2009, Dossier 195, 2010.
(2) L. BONNIN : Intégrer les P. EPS dans le corps des certifiés, Quinzaine Universitaire 1414, 2018.
(3) R. GARY-BOBO : Article Le Monde, 7 Février 2014.
(4) OCDE : L’économie fondée sur le savoir, 1996.
(5) F. DUBET, D. MARTUCCEILI : Sociologie de l’expérience scolaire, 1996.
(6) S. ROCHÉ : Tolérance zéro ? Incivilités et insécurité, 2002.
(7) leparisien.fr/societe/violences-scolaires-442-incidentsrecenses- chaque-jour-20-09-2017-7273113.php.
(8) JP. GAVRILOVIC, MH. PIQUEMAL : Les 10 recommandations du SNALC pour être plus fort au travail, 2018.
(9) L. BONNIN : A l’EPS des jeux didactiques et sportifs, Quinzaine Universitaire 1418, 2018.
(10) P. PERRENOUD : Enseigner : Agir dans l’urgence - décider dans l’incertitude, 1996.
(11) M. REPPERT : Mémorandum sur la souffrance des professeurs et personnels non enseignants de l’EN, 2017.



contact : Laurent BONNIN