Le 5 septembre 2023, Nicolas, élève de 15 ans scolarisé dans un lycée des Yvelines, se suicide après avoir subi du harcèlement dans son ancien établissement. Ses parents avaient pourtant alerté l’établissement au moment des faits ainsi que le rectorat de Versailles, sans que le problème ne soit réglé.
Ce drame a provoqué un profond émoi et une vive indignation, amplifiés par la publication du courrier de réprobation du rectorat aux parents, poussant notre ministre Gabriel Attal à faire de la lutte contre le harcèlement scolaire une priorité. Le SNALC salue cette volonté : malheureusement, Nicolas n’est pas la seule victime. Il y a eu d’autres suicides sur fond de harcèlement scolaire (Lucas, Lindsay, Dinah…). Selon un rapport du Sénat de septembre 2021, 800.000 à un million d’enfants seraient victimes de harcèlement scolaire chaque année (toujours d’après ce rapport, un quart des collégiens serait confronté à du cyberharcèlement).
Le SNALC partage évidemment ce combat. Se battre contre le harcèlement scolaire, c’est lutter contre les différentes formes de discrimination, mais c’est aussi œuvrer pour un meilleur bien être des élèves. Cependant, nous estimons que les mesures prises, y compris récemment, ne suffiront pas à endiguer ce fléau.
Tout d’abord citons le Programme pHARe. Ce dispositif créé en 2020, expérimenté 2 ans dans 6 académies, a été généralisé sur tout le territoire depuis la rentrée 2022 dans les écoles et collèges et élargi aux lycées depuis la rentrée 2023. En l’état, et dans l’attente des résultats de l’enquête menée par l’Inspection générale sur l’efficience du dispositif, le SNALC estime qu’il est insuffisant pour plusieurs raisons :
- Formations incomplètes : trop théoriques (vidéos, magister…) et courtes (deux jours), peu d’échanges entre pairs.
- Méthodologie insuffisante : la « préoccupation partagée», dite Pikas ne convient pas à toutes les situations de harcèlement, notamment les plus dures, et laisse parfois de côté la victime.
- Surcharge de travail, manque de temps et de personnel : le travail dans le cadre de ce programme se fait sans temps dédié pour les personnels déjà submergés par ailleurs.
- Absence de visibilité sur le cyberharcèlement : on ne peut contrôler ce qui relève de la sphère privée et se substituer aux parents.
Certaines mesures récentes vont dans le bon sens, avec par exemple la possibilité, dans le premier degré, de déplacer le harceleur dans une autre école.
Le SNALC reste en revanche dubitatif quant à l’efficacité de la journée du 9 novembre et du questionnaire anonyme remplis par les élèves de l’école au lycée. Dans l’absolu, un questionnaire peut permettre de détecter certains signaux faibles. Toutefois, dans le cas qui nous occupe, les multiples objectifs affichés (visée statistique mais aussi détection des cas dans une classe) rendent l’ensemble confus et peu cohérent. Surtout, cela donne l’impression que le Ministère entend régler la question en 24 heures Or il s’agit d’une lutte qui doit s’inscrire sur un temps long.
Le SNALC demande :
- Une formation pratique de l’ensemble des personnels (organisée au sein de chaque établissement) sur le harcèlement. Les personnels doivent avant tout pouvoir maîtriser un certain nombre d’éléments sur le sujet. Faute de quoi, les interventions comme celles du 9 novembre ne seront pertinentes ni pour les collègues ni pour les élèves.
- Un recrutement bien plus important de personnels sociaux et de santé, qui manquent cruellement : infirmières, médecins scolaires, psychologues, assistantes sociales.
- Une réflexion sur le traitement actuel de la lutte contre le harcèlement dans les programmes d’EMC.
Le SNALC soutiendra tout projet visant à combattre le harcèlement et toutes formes de discriminations. À condition que cela soit cohérent, réalisable et pertinent. Pour lutter contre ce fléau, il faut une politique plus sérieuse et plus ambitieuse : on ne saurait se satisfaire de bricolages ou d’affichages.