Lindsay et Lucas, deux collégiens de 13 ans, se sontsuicidés les 12 mai et 7 janvier derniers, après avoir été victimes deharcèlement scolaire. Leurs établissements respectifs étaient pourtantdotés du programme pHARe, dédié à la lutte contre ce fléau.
Maxime Reppert, vice-président du SNALC, syndicat de l’école au supérieur, est questionné dans le figaro du 06 juin 2023
Une nouvelle disparition tragique. Lindsay, une collégienne âgée de 13 ans, s’est donné la mort le 12 mai dernier après avoir été victime de harcèlement scolaire. Lundi 5 juin, le tribunal pour enfants d’Épinal a reconnu coupables quatre adolescents de harcèlement sur le petit Lucas, qui s’était suicidé le 7 janvier dernier.
La collégienne de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) comme le jeune garçon vosgien étaient pourtant inscrits dans des établissements dotés du programme de l’Éducation nationale pHARe de lutte contre le harcèlement scolaire. Ce dispositif, créé en 2017 et généralisé dans toutes les écoles élémentaires et les collèges publics en 2022, souhaite prévenir ce fléau qui toucherait près de 700.000 élèves chaque année, d’après un rapport parlementaire de 2021.
«Trop théorique»
Ce programme repose sur huit piliers, parmi lesquels : la prévention, la «mesure du climat scolaire», la formation d’une «communauté protectrice de professionnels et de personnels» pour les élèves ou encore l’intervention «efficace» en cas de situation de harcèlement. Pour son bon fonctionnement, le dispositif s’appuie sur la formation de personnels au sein des établissements scolaires (professeurs, infirmières, CPE). Chaque école ou collège doit en compter au moins cinq. Cette «équipe ressource»agit comme référents en cas de harcèlement.
Mais comment sont-ils formés ? Par huit journées constituées de modules soigneusement préparés par le ministère. Et «ils sont trop théoriques», regrette d’emblée Maxime Reppert, vice-président du Syndicat des personnels de l’Éducation nationale (SNALC). Avant de souffler : «Il n’y a pas d’échanges sur des cas concrets, c’est du saupoudrage». «Le dialogue nécessiterait d’être approfondi», ajoute IsabelleDelesse, professeure intégrée dans le programme pHARe de son collège. Mais si les formations sont insuffisantes, les échanges internes entre référents permettent «de régler de nombreux problèmes rapidement», insiste-t-elle. «D’après les retours de huit académies en 2021-2022, le taux de résolution des situations de harcèlement grâce à cette méthode est supérieur à 80%», se défend le ministère de l’Éducation nationale auprès du Figaro.
Problème du cyberharcèlement
Le dispositif repose également sur la volonté d’«élèves ambassadeurs». Ils ont pourmission principale de repérer et signaler toute situation de harcèlement. «Faire que les élèves puissent être acteurs de la lutte contre le harcèlement, pourquoi pas, mais c’est le premier maillage. On ne peut pas attendre d’importants résultats», poursuit Maxime Reppert qui voit plutôt dans l’augmentation des moyens humains et financiers une solution. Car si 91% des collèges sont inscrits à ce programme, nombre d’établissements n’ont pas encore développé tous ces modules de sensibilisation. Pour Maxime Reppert, «les personnels d’éducation deviennent de véritables couteaux suisses ce qui empêche leur efficacité ou leur implication», argue-t-il.
La grande faille du programme concerne enfin les réseaux sociaux. «La plus grande difficulté aujourd’hui, c’est le cyber harcèlement», confesse Isabelle Delesse en ajoutant que seule la prévention peut aider. D’après un rapport sénatorial de 2021,«25% des collégiens déclarent avoir connu au moins une atteinte via les nouvelles technologies, et 14% des lycéens disent avoir fait l’objet d’une attaque sur internet».
Pap Ndiaye a déjà annoncé plusieurs nouvelles mesures le 1er juin dernier. L’exécutif souhaite augmenter les subventions allouées aux associations gérant les plateformes d’écoute (3018 et 3020). Par ailleurs, le ministre de l’Éducation «convoquera prochainement les réseaux sociaux avec les ministres de l’Intérieur, de la Justice et de la Transition numérique» pour évoquer cette épineuse question, précise le ministère.