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EN, fais-moi peur

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L’année scolaire écoulée, il est temps de dresser un bilan de cette période que l’on peut résumer en un mot : catastrophique. Depuis la rentrée jusqu’à la fin des examens, il ne s’est pas passé une semaine sans que l’actualité ne se fasse l’écho des problèmes et faits divers qui frappent notre Institution, nos collègues et nos élèves.

Régulièrement, que ce soit vis-à-vis du Ministère ou à travers les médias, le SNALC dénonce, prévient, alerte sur ce qui devient de plus en plus inadmissible et insupportable. L’Éducation nationale vit probablement sa plus grande crise ; une crise protéiforme.

Premier aspect : l’École est devenue aujourd’hui une cible et, de l’avis de tous, notre profession devient de plus en plus un métier à risques.

Rappelons, cette année :

  • Le meurtre de notre collègue Dominique Bernard en octobre dernier, véritable tragédie et traumatisme. Ce drame, résonnant avec celui de l’affaire Samuel Paty, nous rappelle ce qu’on a déjà entendu et qu’on ne voudrait croire encore possible : enseigner peut tuer.
  • Les violences (agressions, menaces via les réseaux sociaux, etc.) commises sur les personnels de l’Éducation nationale par des élèves. Impossible ici, vu leur nombre, de toutes les recenser. Néanmoins, parmi les faits médiatiquement et tristement marquants, nous pouvons retenir :
    • En décembre 2023, dans les Yvelines, une professeure empoisonnée au détergent par un élève lors d’un goûter de fin d’année.
    • En février, une enseignante frappée par une élève à cause de son téléphone portable.
    • En mars, le proviseur du lycée Ravel (Paris), menacé de mort pour avoir voulu faire respecter le principe de laïcité dans son établissement.
    • En avril, un professeur de technologie giflé, puis menacé de mort par un collégien.
    • En juin, dans un lycée à Tours, un enseignant agressé, à coups d’extincteur, par deux élèves cagoulés.

À ces faits, il faut également ajouter les violences commises par des parents d’élèves qui, pour certains, en viennent régulièrement aux menaces et aux mains. La situation devient telle qu’on en arrive à des prises de décision extrêmes à l’image des propos d’un maire, affirmant vouloir équiper les professeurs de sa commune de bombes lacrymogènes pour qu’ils puissent se défendre en cas d’intrusion.

Les contestations de l’autorité et des contenus pédagogiques sont de plus en plus fréquentes, comme dans l’affaire très médiatisée du collège d’Issou où des élèves de 6e, à la suite de la projection en classe d’une œuvre du XVIIe siècle « Diane et Actéon », avaient, avec le soutien de leurs parents, accusé leur enseignante de racisme.

Avec une telle pression venant de la part d’élèves et de parents, galvanisés par un sentiment d’impunité, la tentation de ne rien dire ou de ne rien faire nourrit le #PasDeVagues, l’auto-censure est grande. On ne peut que constater une banalisation croissante et inquiétante de la violence. Le sentiment d’insécurité s’est mué en honteuse réalité.

Cette crise n’est pas la seule. D’autres phénomènes viennent aggraver la situation.

Deuxième aspect : la crise d’attractivité et de recrutement.

À l’image du premier, ce deuxième aspect n’est pas nouveau, mais le phénomène s’amplifie. Le SNALC a mis en évidence la paupérisation du métier d’enseignant, mais aussi des autres métiers au sein de notre ministère. À cela s’ajoute une dégradation de nos conditions de travail avec une médecine de prévention bien trop insuffisante, des classes surchargées, des réformes qui, non seulement n’apportent rien aux élèves, mais viennent un peu plus déprofessionnaliser les professionnels que nous sommes. À tel point que l’École est clairement devenue un bien de consommation où les personnels sont au service des parents et des élèves. L’exigence, le respect et le travail deviennent des tabous.

Troisième aspect : les phénomènes de société et la place des parents.

Paradoxalement, même si les médias mettent davantage en lumière les deux aspects évoqués plus haut, le Ministère, comme l’opinion, demandent toujours plus à l’École. Que ce soit sur la question des bases de l’éducation, celle des réseaux sociaux, du téléphone portable ou des écrans, tout est présenté de telle manière qu’on a l’impression que l’École doit se charger de tout.

Que les choses soient claires : pour le SNALC, la première cellule d’apprentissage d’un enfant n’est pas l’École, mais la famille. À ce titre, cette dernière a également un rôle et surtout une responsabilité. Notre mission n’est pas d’élever les enfants qui nous sont confiés. C’est pourquoi, pour le SNALC, plutôt que de charger la barque EN, il faut avant tout responsabiliser les élèves et surtout leurs parents, membres – rappelons-le – de la communauté éducative. Cette appartenance implique certes des droits, mais aussi des responsabilités.

Quelles que soient les épreuves et face à cette dégradation constante de nos conditions de travail, le SNALC ne baisse jamais les bras, vous défend et vous accompagne au quotidien dans l’exercice de votre métier.


Article paru dans la revue Quinzaine universitaire n°1491 du 12 juillet 2024