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Du désenchantement à la bouteille à la mer

© g3c75b25b8_pixabay

Le constat est édifiant, difficultés de recrutement et démissions sont les adjectifs à la mode qui symbolisent la profession d’enseignant.

Après enquête auprès des PLP, les chiffres sont éloquents mais le sujet reste tabou. Les démissions de professeurs paraissent relativement peu nombreuses, moins de deux enseignants pour 1 000, mais trois fois plus élevées qu’en 2011.

 Certains enseignants de l’Éducation nationale jettent l’éponge. Après avoir rêvé, pour la plupart, de ce métier de transmission des savoirs, ils sont de plus en plus nombreux à démissionner.

La proportion de stagiaires démissionnaires grimpe également

Le constat en dit long sur la perte d’attractivité du métier. Cela recoupe le nombre de démissions de jeunes professeurs en hausse constante. « Certains ne vont même pas au bout de leur année de stage ». D’autres vont à peine plus loin et « mettent un terme à leur carrière, en moyenne deux à trois ans après l’obtention du concours. Ils se rendent compte que ce n’est pas ce qu’ils attendaient ».

 Les 68 000 PLP représentent près de 15% du corps professoral du secondaire.

Ils travaillent dans un secteur qui a été touché par un bouleversement important, le passage du bac pro de 4 à 3 ans, avec la fin du BEP si nécessaire, s’est accompagné de réformes des formations et de la suppression de très nombreux postes.

Cette désaffection s’explique pour différentes raisons :

Des conditions de travail difficiles 

La principale caractéristique des PLP est que l’enseignement est souvent une seconde carrière : c’est le cas pour 57% des PLP contre 31% des enseignants des lycées généraux et technologiques. Une autre caractéristique forte tient à l’environnement des PLP. ” Le contraste se joue au niveau de l’origine sociale des élèves”. “En effet, seuls 4 % des enseignants de LP exercent dans des lycées où les élèves sont issus d’un milieu social globalement favorisé (contre 41 % dans les LEGT), et à l’inverse 60 % enseignent dans des établissements où les élèves sont d’origine sociale plutôt défavorisée (contre 5 % des enseignants de LEGT). Autrement dit, le public en LP est socialement défavorisé”. Cette situation renvoie aussi au parcours personnel des enseignants moins lisse que dans les lycées généraux.

De plus, les PLP se déclarent davantage victimes de violence psychologique au travail que les autres enseignants (21 contre 16%).

Pour beaucoup, c’est une accumulation d’angoisse, et un manque de soutien de la hiérarchie. (” On nous demande d’être bienveillants envers les élèves, mais on ne l’est pas avec les enseignants ! On n’est pas écouté par la hiérarchie. On est un peu seuls et démunis.”).

De même, on retrouve les conditions indignes faites aux enseignants : 15% jugent leurs locaux en mauvais état (contre 10% en LEGT), 61% ont des possibilités de se détendre insatisfaisantes contre 35% dans les autres lycées. Seulement 52% se sentent en sécurité dans leur établissement (69% en LEGT).

Les PLP sont 67% à déclarer que l’exercice du métier est devenu plus difficile contre 61% dans les LEGT. Les PLP voient des profils d’élèves de plus en plus variés. La pédagogie différenciée si familiére en LP n’est plus suffisante. Le non dédoublement des effectifs ajoute à la difficulté d’enseigner. La réforme de la TVP a aggravé les situations d’enseignement qui sont désormais déficitaires en heures et plus que théorique.    

À cela s’ajoute une charge de travail très importante avec la mixité des publics due à l’apprentissage, service sur plusieurs établissements. L’individualisation des parcours, c’est-à-dire la prise en compte des élèves à besoins particuliers, joue aussi énormément. Ceci est trop chronophage et entraîne beaucoup de réunions sans moyens supplémentaires. Donc c’est plutôt un moins qu’un plus.” Que dire de l’absence totale d’éducation prioritaire dans la voie pro qui devrait être généralisée a tous les LP ?

Toutes ces contraintes et contributions sont imposées pour un salaire indigne et si faiblement revalorisé. Lorsqu’un enseignant, recruté à bac +3, débutait, son salaire correspondait à 1,8 fois le Smic. Désormais, un jeune enseignant bac +5 perçoit l’équivalent de 1,2 Smic. Ce n’est pas la tentative insuffisante de « Rendre le métier d’enseignant plus attractif » qui va atténuer ce constat. Ce coup d’épée dans l’eau de Jean-Michel Blanquer relève plus de la démagogie que de reconnaître enfin la valeur des PLP. 

En attendant, un indicateur en dit long sur la perception du métier : les résultats des concours de l’enseignement qui ont tous (ou presque) été communiqués, et qui, une fois encore, ne « font pas le plein », comme disent les intéressés.

Les candidats reçus aux différents concours de l’éducation ne sont pas assez nombreux par rapport au nombre de postes vacants.

 

 Le SNALC donne l’alerte

L’année 2021 ne fait pas exception : si, Rue de Grenelle, on salue une « tendance à l’amélioration », nous ne cessons de remonter ce mal être des enseignants en LP. La crise du recrutement s’aggrave, et notamment dans des disciplines très spécifiques. La réaction ministérielle, dans le cadre du Grenelle de l’éducation, qui s’est déroulée entre octobre 2020 et mai 2021 le prouve bien. Aucune décision va dans le bon sens.

L’attractivité du métier continue de se dégrader.

« En vingt ans, on a perdu 30 % de candidats. Un tel déclin ne se rattrape pas d’un claquement de doigts… ».  Le SNALC avait pressenti et jugé malveillante la solution des familles de métiers pour réduire les postes et masquer le manque d’enseignants. On remodèle, on se montre imaginatif, mais jusqu’où ?

Bientôt il faudra lancer une bouteille à la mer pour recruter les PLP … Il faut espérer que ce sujet soit un débat avec des propositions adaptées dans les mois à venir !