Orienter les élèves dès la maternelle ? C’est le Borne âge pour commencer !
Interrogée le 7 avril dernier sur LCP au sujet des difficultés que rencontrent nombre de futurs bacheliers pour s’orienter via Parcoursup, la ministre a affirmé que les élèves devraient « se préparer très jeunes, presque depuis la maternelle, à réfléchir à la façon dont on se projette dans une formation et un métier. »
Sachant que la maternelle accueille les bambins à partir de trois ans, cette déclaration n’a pas manqué de faire hochet la tête avec circonspection de plus d’un auditeur. Face au tollé provoqué par ses paroles, la ministre s’est gardée d’en remettre une couche. Sur son compte X, elle a promptement battu en retraite : « Non ! On ne va pas orienter les élèves dès la maternelle ! », mais simplement accompagner leurs choix. Les familiers de la rhétorique institutionnelle savent toutefois qu’accompagner est, dans le jargon, synonyme d’incitation forte.
Il suffit de rappeler l’existant pour s’en convaincre : au stage obligatoire d’observation en entreprise qu’effectuent les élèves de 3e s’est ajoutée en 2023 la découverte des métiers dès la 5e, dispositif conçu pour « développer la connaissance des métiers et les compétences à s’orienter » : ce pis-aller traduit la désorientation de l’EN devant le faible niveau des élèves révélé dans les enquêtes PISA ainsi que sa volonté de pré-professionnaliser ces derniers, tandis que la voie professionnelle, touchée par une réformite à l’aveugle, assiste à son démantèlement programmé. Quant au « choc des savoirs », il est en passe d’être bien amorti, biberonné aux compétences psycho-sociales dans des classes surchargées.
Pour le SNALC, précipiter la « réflexion » des élèves sur l’orientation avant même qu’ils aient pu acquérir de solides connaissances, c’est les vouer d’emblée à l’échec. Dévoyer ainsi la transmission des savoirs, finalité de l’École, n’est-ce pas prendre le risque de renforcer les inégalités sociales ? Comment de tels bricolages pédagogistes pourraient-ils se substituer à une bonne culture générale, véritablement garante de réussite pour les élèves ?
Le SNALC dénonce un maternalisme entêté qui n’a pour seule fin que de les bercer… d’illusions.
Article paru dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1501 du 12 mai 2025