RMC-BFMTV – Ashley Chevalier
Bonjour. Maxime Répert, vice-président du SNALC, professeur d’histoire-géographie dans un lycée en Bourgogne. Que pensez-vous de ce nouveau “choc des savoirs”, l’acte 2 ?
SNALC – Maxime Reppert
Avant d’annoncer l’acte 2, il faut déjà faire le bilan de l’acte 1. Ça, c’est le premier point.
Le deuxième, c’est que, quelque part, ces annonces, qui sont d’ordre pédagogique, à nos yeux, n’apparaissent pas prioritaires. Malheureusement, il y a des problèmes plus graves qui touchent actuellement l’Éducation nationale, notamment la problématique du recrutement.
Déjà, avant d’annoncer de nouvelles choses, il faut faire en sorte qu’il y ait un enseignant devant chaque élève. Ce qui n’est pas le cas actuellement. Les élèves le voient bien, et les parents aussi, naturellement. Donc, il faut remédier à cela.
Il faut aussi, quelque part, améliorer les conditions de travail, notamment en diminuant les effectifs par classe. Pourquoi ? Parce que si vous avez des classes moins chargées, cela permettra un apprentissage plus efficace pour les élèves, quel que soit leur niveau. Et puis, d’autre part, cela améliorera le climat de vie scolaire. Ce climat scolaire est indispensable quand on voit la banalisation de la violence qui frappe actuellement notre institution.
Donc, au-delà de ça, nous pensons que la plupart de ces annonces, si vous voulez, font un peu “usine à gaz”.
Je vais vous donner un exemple très simple. On parlait du brevet en 2027, qui deviendrait obligatoire. Bon, sur le papier, effectivement, il faut donner plus d’importance au brevet. Ça, c’est une évidence. Maintenant, pragmatiquement parlant, comment va-t-on pouvoir affecter 137 000 élèves au mois de juillet, c’est-à-dire après les résultats du brevet ?
Comment va-t-on pouvoir logistiquement, matériellement, humainement affecter, en très peu de temps, ces 137 000 élèves ? Nous vous interrogeons.
RMC-BFMTV – Ashley Chevalier
Est-ce que vous constatez cette baisse de niveau dont on parlait à l’instant, notamment en mathématiques et pour les filles ?
SNALC – Maxime Reppert
Cette baisse de niveau, je veux dire, voilà, on ne peut pas la contester à l’heure actuelle. Effectivement, il y a des éléments qui peuvent expliquer en partie cela, notamment la crise du Covid, qui a perturbé l’enseignement prodigué aux élèves.
Ça, c’est une chose. Maintenant, est-ce qu’en faisant ce type d’annonces, on va vraiment changer les choses ? Je rappelle quand même que la plupart des annonces, y compris au niveau pédagogique, c’est généralement de la poudre aux yeux. C’est-à-dire qu’on annonce des choses, mais on ne met pas les moyens derrière pour les réaliser correctement.
À tel point que, par exemple, pour les groupes de niveau aujourd’hui, le SNALC, donc mon syndicat, a lancé une vaste enquête auprès des professeurs de collège. Les premiers résultats, qui nous sont parvenus, sont assez inquiétants.
Par rapport à l’organisation de ces groupes de besoin en 6e et en 5e, le problème, c’est que l’Éducation nationale, le ministère, ne cherche pas à faire le bilan de ce qui se passe actuellement et se projette déjà pour faire de nouvelles annonces.
RMC-BFMTV – Ashley Chevalier
Vous parlez du manque d’effectifs, du manque de personnel. Il y a une crise des vocations dans votre métier. Comment faire renaître ces vocations ?
SNALC – Maxime Reppert
Il faut déjà, je le disais tout à l’heure, donner de meilleures conditions de travail aux collègues.
Il faut aussi que le métier soit plus attractif. C’est-à-dire qu’à un moment donné, il va falloir arrêter de sous-payer les profs.
Tout simplement parce qu’un enseignant aujourd’hui, c’est un fonctionnaire de catégorie A. Et ce fonctionnaire de catégorie A touche en moyenne 1 000 euros de moins par mois qu’un fonctionnaire de catégorie A dans une autre fonction publique, quand on fait la comparaison. C’est un petit peu moins vrai — moins de 1 000 euros actuellement — parce qu’il y a eu différentes mesures prises. Mais l’écart reste extrêmement important.
Et puis, au-delà de ça, vous le voyez sur votre antenne au quotidien, il y a une banalisation de la violence au sein de l’Éducation nationale, ce qui fait que le métier d’enseignant devient de plus en plus un métier à risque, où l’on risque sa vie.
On l’a malheureusement vu avec Samuel Paty et Dominique Bernard.
Mais, de façon moins exceptionnelle, toutes les violences que l’on peut recevoir de la part d’élèves ou de parents — des violences physiques ou psychologiques — montrent bien que, voilà, à un moment donné, il faut se mettre autour d’une table et vraiment lancer des mesures fortes, plutôt que des mesurettes, du saupoudrage ou du bricolage.
Parce que, je le dis souvent, l’Éducation nationale est la première enseigne de bricolage en France.
RMC-BFMTV – Ashley Chevalier
Merci, Maxime Répert, d’avoir répondu à nos questions.