Courrier intersyndical des organisations représentatives de l'Education nationale : SNALC, FSU, CGT, CFDT, UNSA, SUD
Monsieur Melmoux-Eude
Directeur des ressources humaines
Madame Dubo
Adjointe au Directeur générale des ressources humaines
à Paris, le 23 juin 2023
Objet : demande des organisations syndicales concernant l’arrêté relatif aux recueil et traitement des actes de violence, de discrimination, de harcèlement et d’agissements sexistes dans la fonction publique
Monsieur le Directeur des ressources humaines,
Madame l’adjointe au Directeur générale des ressources humaines,
Les groupes de travail réunis pour élaborer l’arrêté relatif aux recueil et traitement des signalements des actes de violences, discrimination et harcèlement dont les VSS ont fait l’objet d’échanges riches et utiles qui ont permis d’aboutir à un texte important pour nos collègues et dont nous sommes globalement satisfaites. Nous saluons la qualité de nos échanges avec notre administration.
Il reste néanmoins une composante fondamentale des violences faites aux femmes qui reste absente du projet d’arrêté : la question du traitement des conséquences sur le travail des violences conjugales par l’employeur.
En 2022, 147 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur ex-conjoint en France. En moyenne, chaque année, 213 000 femmes âgées de 18 à 75 ans déclarent avoir été victimes de violences physiques ou sexuelles de la part d’un conjoint ou d’un ex-conjoint.
Dès la signature du premier accord égalité professionnelle dans la fonction publique de 2013, la prise en compte et la prévention de toutes les formes de violences dont « les violences familiales détectées sur le lieu de travail » ont été intégrées.
La circulaire du 9 mars 2018 relative à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans la fonction publique le rappelle : « les employeurs publics sont incités à étendre l’application de ces dispositifs aux violences et au harcèlement d’origine extra-professionnelle détectés sur le lieu de travail ».
Les orientations gouvernementales concernant la lutte contre les violences faites aux femmes et pour l’égalité indiquent :
- dans l’axe 1 du plan interministériel pour l’égalité entre hommes et femmes 2023-2027 : l’axe 1 concerne la lutte contre les violences faites aux femmes, il recommande de “mieux traiter les violences conjugales et leurs spécificités”,
- dans l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, axe 5.1 : Action 5.4 au sujet de l’accompagnement des agentes victimes de violences il dispose que “Conformément aux engagements prévus dans le cadre du protocole de 2013, une attention particulière doit également être réservée aux agentes victimes de violences conjugales, notamment dans le cadre de l’action sociale et de la mise à disposition de logements d’urgence ou lors de l’examen des demandes de mobilité.”
Il convient par conséquent de ne pas exclure les victimes de violences conjugales du dispositif d’écoute et traitement que crée le dit arrêté, afin de leur garantir la mise en œuvre de mesures de protections rapides, dont des mesures organisationnelles comme la sécurisation du poste occupé, ou tout autre mesure de nature à prévenir la survenue de violences sur le trajet ou sur le lieu de travail de l’agente victime. Elles doivent être traitées dans le cadre du traitement général des violences sexuelles et sexistes dans la Fonction publique. Les violences conjugales ont des impacts sur le travail : souffrance de l’agente, retards, absences et incapacité à être concentrée sur les tâches et les missions à remplir. Mais surtout, dans un ministère aussi féminisé que celui de l’Éducation nationale, notre employeur doit se montrer exemplaire et pionnier dans la lutte contre les violences faites aux femmes en garantissant aux agentes victimes de violences une véritable écoute et un véritable accompagnement.
Il est temps pour l’Éducation nationale de se mettre en conformité avec l’accord du 30 novembre 2018. Le Ministère de la Culture a déjà intégré les violences conjugales à sa politique de lutte contre les violences faites aux femmes puisque l’arrêté du 13 juin 2022 relatif au dispositif de recueil et de traitement des signalements des actes de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel et des agissements sexistes au ministère de la culture dispose dans son article 3 que les dispositifs de l’arrêté “peuvent également être mobilisés pour le recueil des signalements effectués par :
1° Les personnes victimes ou témoins de violences intra familiales et conjugales détectées sur le lieu de travail ou d’études mais subies hors de la sphère professionnelle ou de l’établissement d’enseignement relevant du ministère de la culture”.
C’est pourquoi, nous vous sollicitons pour intégrer des dispositions spécifiques aux agentes victimes de violences conjugales en application de l’accord du 30 novembre 2018 : “notamment dans le cadre de l’action sociale et de la mise à disposition de logements d’urgence ou lors de l’examen des demandes de mobilité” mais également par la mise à disposition d’un contingent d’ASA permettant de faire les démarches nécessaires et de rencontrer des personnels médico-sociaux.
L’argument justifiant votre réticence consistait à évoquer le lancement du plan interministériel du 8 mars 2023 qui a juste une valeur de cadre commun entre le secteur privé et le secteur public. Lors de nos audiences à la fonction publique il a bien été précisé que d’aucune façon il ne devait retarder la mise en œuvre de ce qui a déjà été engagé – au contraire.
Nous vous demandons solennellement d’étendre le dispositif d’écoute et de traitement aux victimes de violences conjugales dans le projet d’arrêté qui sera présenté lors du CSA du 4 juillet prochain. Nos organisations syndicales en font un sujet primordial.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Directeur des ressources humaines, Madame l’adjointe au Directeur général des ressources humaines, en l’expression de nos salutations respectueuses.