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AESH et élèves en situation de handicap dans l’école inclusive

© Raka C. de Pixabay

Cet article présente les grandes lignes d’un récent rapport de Terra Nova publié en mars 2023.

Ce dernier pourrait inspirer le ministère pour une fin d’année scolaire riche en annonces applicables dès la rentrée prochaine…

Terra Nova est un « think tank » (groupe de réflexion) qui se veut progressiste et indépendant, ayant pour but de produire et de diffuser des solutions politiques innovantes en France et en Europe. Cette association, disposant d’un large auditoire, est financée à 29% par des subventions publiques et à 69% par du mécénat privé (entreprises et particuliers).

L’acte 1 de l’école inclusive correspond au 1er quinquennat du Président Macron (2017 – 2022) et un premier bilan peu glorieux vient d’en être tiré par Terra Nova dans son rapport dont nous vous présentons les conclusions ci-dessous.

En 5 ans, le nombre d’élèves en situation de handicap a augmenté de 24 % (432 000), le nombre d’AESH de 42% (132 000) et le nombre d’ULIS de 20% (10 300).

Cette première période correspond donc à une politique de massification  de l’accompagnement scolaire des ESH1.

L’intégration ne serait qu’administrative ou physique et il n’y aurait pas une inclusion sociale ou pédagogique (80% des ESH n’ont pas le baccalauréat et rencontrent des problèmes d’orientation scolaire ou professionnelle).

Toutefois, cette massification serait à relativiser suite à l’élargissement de la définition du handicap depuis 2005, qui inclut les troubles DYS2, HPI3 et TDA4.

La difficulté pour les ESH est de trouver une place dans l’école mais aussi d’y rester : en 2020, 8 000 d’entre eux sont sans situation de scolarisation.

De plus, leur scolarisation se complexifie au fur et à mesure de leur parcours scolaire.

Ainsi, si 85% des ESH de moins de 6 ans sont placés en école ordinaire, ils ne sont plus que 46% à moins de10 ans, et en majorité en ULIS à partir du collège.

Le dispositif ULIS ne fait pas non plus l’unanimité : comme les ESH sont placés entre pairs, l’interaction avec les élèves et l’école ordinaire est diminuée. Ils sont même parfois exclus par manque d’AESH et certains ESH passent aussi trop peu de temps en classe ordinaire (sans oublier qu’il manque des données).

La réussite d’une inclusion paraît être corrélée au milieu social (le manque d’informations sur les droits et les difficultés d’accès aux médecins spécialisés rendent le diagnostic plus tardif), et au type de handicap. Les ESH issus d’un milieu défavorisé ne sont presque jamais scolarisés en milieu ordinaire au-delà du collège. Les ESH porteurs de troubles cognitifs ou intellectuels sont plus souvent exclus que des ESH ayant un trouble physique. Enfin, les ESH sont plus exposés au harcèlement scolaire et le handicap est le premier motif de discrimination.

Durant ce premier quinquennat, la compensation (aide humaine majoritairement) aurait été, d’après Terra Nova, trop privilégiée au détriment de l’accessibilité.

Or, l’excès de compensation entraverait la qualité de la scolarisation des ESH et l’insertion sociale dans l’école ordinaire. L’AESH dissuaderait aussi l’équipe pédagogique de s’engager dans l’inclusion des ESH et serait également un écran entre l’ESH et son environnement.

Les PIAL, mis en place en 2018, sont un outil de rationalisation de l’accompagnement : mutualisation des heures notifiées (MDPH), mais dégradation des conditions de travail des AESH.

L’attractivité du métier AESH est impactée par la précarité du temps partiel subi sur la base d’un SMIC pour la majorité et le manque de formation sur les divers handicaps et de formations communes aux AESH et enseignants.

Les difficultés juridiques et organisationnelles pour le partage des compétences entre l’Etat et les collectivités territoriales ont été aussi relevées pour les hors temps scolaires.

En conclusion, à ce jour, les ESH doivent s’adapter aux exigences de l’école ordinaire, par manque d’accessibilité, alors que ce devrait être l’inverse.

Ce défaut d’accessibilité s’explique par de nombreux manques : informations sur le droit, formation des enseignants sur la différenciation pédagogique, coopération avec l’AESH, évaluations d’impacts de l’école inclusive sur le niveau scolaire.

Le volet 2 de l’école inclusive qui démarre en avril 2023 a pour ambition de privilégier la qualité de l’accompagnement des ESH.

Pour Terra Nova, une réflexion sur les missions et rôle de l’AESH dans la future école inclusive s’impose urgemment : doit-on prioriser la réussite scolaire ? Ou le bien-être et le développement personnel des élèves ? Ou l’intégration sociale ?

  • Pour privilégier la réussite scolaire, il faut amplifier l’accessibilité, pratiquer la différenciation pédagogique, disposer de matériel adapté, améliorer le contenu et les formations communes AESH, enseignants et médico-social , structurer et centraliser le pilotage des mesures statistiques (de la maternelle à l’université) et en faire des publications régulières, avoir une concertation nationale sur l’accessibilité et la compensation.
  • Si l’on préfère mettre en avant le bien-être de l’élève, qui est aussi un prérequis de la réussite scolaire, il faut améliorer l’articulation médico-social en proposant d’augmenter les scolarités partagées et le nombre de places en SESSAD5 et UEE6, adapter les attendus scolaires selon le niveau scolaire afin d’offrir des objectifs atteignables, renforcer les PAI7 et PPS8, rendre plus accessible la notification MDPH, évaluer les PIAL avec les parents et le personnel concerné, évaluer les moyens de compensation et la réponse apportée aux besoins, respecter les notifications de la CDAPH9, diminuer le nombre d’élèves par classe dès qu’il y a un ESH .
  • Enfin, pour favoriser l’intégration des ESH en société, l’école ordinaire est la première étape du parcours de l’inclusion. Tous les acteurs de l’établissement doivent être formés à l’école inclusive et les AESH doivent être reconnus (rémunération, carrière, temps plein et CDI).

 

Pour Terra Nova, quel que soit l’ordre des priorités retenues, il ne faudrait pas perdre de vue que la scolarité partagée avec une meilleure articulation entre l’Education nationale et le médico-social est à privilégier. Les SESSAD pourraient en permettre le développement et la meilleure articulation. Il faudra clarifier les missions des EMAS pour les rendre plus efficaces. La fermeture des IME et CMP ne peut être envisagée.

Les objectifs et le sens de l’école inclusive doivent être mieux définis et les indicateurs doivent être meilleurs.

Un équilibre entre compensation et accessibilité est également à trouver.

La place de l’AESH resterait à définir en parallèle de la mise en place de l’accessibilité pédagogique et leur revalorisation est à obtenir.

Comme toujours, vous pourrez compter sur la réactivité du SNALC pour vous informer des éventuelles conséquences de ce rapport sur votre environnement professionnel.

  1. élèves en situation de handicap
  2. troubles DYS : préfixe indiquant une anomalie (dyslexie, dysphasie…)
  3. haut potentiel intellectuel
  4. trouble déficitaire d’attention
  5. services médico-sociaux et de soins à domicile
  6. unité d’enseignement externalisée
  7. projet d’accueil individualisé
  8. projet personnel de scolarisation
  9. commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées