Scène vécue dans un établissement ordinaire : un professeur exclut un élève de son cours et assortit cette punition d’une retenue. Aussitôt, le CPE voire le chef d’établissement invoque le grand principe juridique « non bis in idem » (littéralement « pas deux fois pour la même chose »). Punir deux fois un élève pour le même fait serait-il illégal ? Au-delà du bon sens –une exclusion de cours est-elle vraiment une punition ?-, ce principe s’applique-t-il à la vie scolaire?
Examinons les deux textes qui régissent les procédures disciplinaires soit le décret 2014-522 et la circulaire 2014-059 qui en découle. Certes, cette circulaire adapte à l’École plusieurs principes généraux du droit – contradictoire, proportionnalité, individualisation ou encore ce fameux « non bis in idem ». Mais elle précise très clairement qu’ils s’appliquent uniquement aux sanctions disciplinaires listées à l’article R511-13 du Code de l’éducation : avertissement, blâme, mesure de responsabilisation, exclusion temporaire de la classe ou de l’établissement, exclusion définitive. Ces sanctions décidées par le chef d’établissement assisté ou non du conseil de discipline sont susceptibles d’une contestation en appel et auprès du tribunal administratif. Elles sont donc bien distinctes des punitions qui sanctionnent des manquements mineurs et relèvent de la seule responsabilité professionnelle de l’enseignant. Or, l’exclusion ponctuelle d’un cours (à ne pas confondre avec l’exclusion temporaire de la classe) fait partie de ces mesures dites d’ordre intérieur relevant du régime des punitions. On peut même la considérer comme une simple mesure conservatoire permettant de maintenir les enseignements. Rien n’interdit donc- d’aucuns pourraient même le recommander à titre pédagogique-de compléter une exclusion par une retenue. Autrement dit, le fameux adage latin n’a aucune valeur dans ce cas ; si certains règlements intérieurs l’inscrivaient au chapitre des punitions, il faudrait interroger leur légalité.
Enfin, rappelons un autre adage de droit : De minimis non curat praetor (le juge ne s’occupe pas des détails). Alors, est-il bien raisonnable que le chef d’établissement ergote sur les punitions décidées en toute conscience par les professeurs ?
Article publié dans la revue du SNALC Quinzaine universitaire n°1506 du 31 octobre 2025





