L’édito du président
Jean-Rémi GIRARD
Edito de la revue Quinzaine universitaire n°1505 du 3 octobre 2025
L’école de la confiance était, on s’en souvient, la formule de com’ trouvée par Jean-Michel Blanquer pour exprimer sa défiance réelle envers les personnels de l’Éducation nationale et leurs représentants. Rarement, dans notre histoire, on aura vu une aussi belle antiphrase.
Le SNALC le rappelait le mois dernier aux députés de la commission éducation : ce n’est pas parce que Blanquer est parti que la confiance, elle, est revenue. Bien au contraire : ministre après ministre, on a pu constater que les personnels de l’Éducation nationale étaient toujours soupçonnés d’incompétence. Les professeurs, agents de catégorie A, sont traités comme s’ils étaient à la fois de parfaits incapables et des empêcheurs de tourner en rond. Dernier exemple en date : Élisabeth Borne a voulu apprendre aux collègues de lycée général et technologique comment évaluer afin de moins stresser les élèves. Elle a donc fait publier une note de service pour nous expliquer consciencieusement la distinction entre évaluation diagnostique, formative et sommative, et nous indiquer comment coefficienter nos différentes notes afin d’arrêter, visiblement, de faire n’importe quoi. Les collègues de collège ne sont pas mieux traités : entre injonction aux compétences et aux classes sans notes, puis retour récent des notes pour le brevet, il y a de quoi devenir schizophrène. N’oublions pas l’IA à 20 millions d’euros qui doit nous aider à préparer nos cours…
Et que dire de l’école inclusive ? Professeurs et AESH sont logés à la même enseigne. Non seulement on ne leur reconnaît aucune compétence, mais de surcroît on ne leur permet pas d’y voir plus clair, la formation continue étant aujourd’hui en voie de disparition.
L’analyse du SNALC est tout autre que celle de notre employeur : les personnels font un travail remarquable dans des conditions abominables. Si le système ne s’est pas encore effondré, c’est grâce à la compétence et à la bonne volonté des gens de terrain, qui réalisent des miracles quotidiens. En vérité, ceux envers lesquels il n’y a aucune confiance à avoir, ce sont le ministère et sa technostructure. Ce fascinant mélange de « pas de vagues », de mépris, d’absence d’écoute et de gestion inhumaine de ressources pourtant humaines est, nous l’espérons, unique en son genre. Le SNALC, pourtant, a toujours partagé ses analyses avec les dirigeants. Nous avions prévu les difficultés logistiques du bac Blanquer, l’impossibilité de faire fonctionner correctement les groupes en 6e/5e, le bazar causé par les PIAL puis par les PAS, ou encore l’absentéisme qu’allait causer le « Y » dans la énième réforme de la voie professionnelle. Mais notre ministère, toujours sûr de lui, poursuit sa fuite en avant.
Quel bilan de l’action politique dans l’Éducation nationale ? Après plusieurs centaines de réformes, de dispositifs, de vade-mecum, d’états-généraux, le niveau des élèves est au plus bas et le moral des personnels aussi. La majorité des professeurs envisage de changer de métier, et la taille des classes est, contrairement au salaire, une des plus élevées en Europe. Quel échec ! Oui, mais cet échec n’est pas celui des collègues. Les collègues sont même les principales victimes. Des victimes qui ne peuvent même plus choisir leur complémentaire santé, puisque le fabuleux appel d’offre du ministère a reçu en tout et pour tout une seule candidature. Là aussi, la promesse du ministère que l’adhésion obligatoire irait de pair avec un contrat bien plus favorable et mieux négocié a fait long feu. Rappelons que le SNALC a toujours milité en la matière pour le libre-choix. Une fois de plus, nous avions raison.
Ainsi, dans cet univers de défiance et de méfiance qu’est devenue notre École, le SNALC vous fait confiance, et vous pouvez faire confiance au SNALC. Car le SNALC fait preuve d’une confiance sans bornes envers ce qu’est et doit être l’École de la République. La transmission des savoirs ne peut s’effectuer que dans un cadre professionnel favorable, avec des métiers bien rémunérés, exercés par des personnels qui savent qu’ils seront défendus. En attendant d’être un jour défendu par votre employeur, sachez que vous serez toujours et partout défendu par le SNALC.