Rappelons qu’après la fin de son indexation sur l’inflation en 1982, puis son décrochage par rapport à l’inflation au moment du passage à l’euro au début des années 2000, le point d’indice a pour finir été gelé à partir de 2010. Depuis, il n’a été dégelé que ponctuellement à quatre reprises, et son augmentation est restée bien en deçà de celle de l’inflation, notamment ces dernières années, tandis que le SMIC continuait à y être indexé.
Les quelques mesures de revalorisation des enseignants, toutes « historiques » qu’elles aient été selon la communication ministérielle, n’ont évidemment pas compensé la perte de pouvoir d’achat induite par la hausse insuffisante du point d’indice au regard de l’inflation. Rappelons d’ailleurs que ces mesures ont été appliquées sans distinction entre les différents corps, ce qui a mécaniquement provoqué une dégradation plus nette pour les professeurs agrégés.
Voici quelques preuves en graphiques sur plus de quarante ans. La comparaison avec le SMIC, qui a suivi l’inflation, permet de constater la perte de pouvoir d’achat.
Tout d’abord, intéressons-nous aux agrégés en début de carrière.
Si l’application du PPCR avait augmenté leur pouvoir d’achat de 1,2 smic à presque 1,4 smic, 7 ans après, cette augmentation a été divisée par plus de deux. À ce rythme, nous pouvons estimer que les professeurs agrégés commenceront leur carrière au SMIC dans les années 2030.
Quant aux professeurs agrégés parvenus au dernier échelon de la classe normale, leur pouvoir d’achat est actuellement le même que celui d’un professeur agrégé débutant à l’échelon 2 dans les années 80. Et ils devraient eux aussi être rémunérés au niveau du SMIC au début des années 2050 si aucune mesure n’est prise.
Quant à la mise en œuvre du nouveau grade de la classe exceptionnelle, sept années ont suffi à annuler ses effets.
En fin de compte, voici l’évolution des traitements bruts maximum et minimum des professeurs agrégés par rapport au SMIC depuis 1972 : tout en se rapprochant fortement du SMIC, les carrières ont également fortement perdu en amplitude.
Ce déclassement progressif aboutit peu à peu au rapprochement des carrières des professeurs agrégés par rapport aux autres enseignants titulaires, eux-mêmes fort mal rémunérés, et, à bas bruit, au corps unique souhaité par nos décideurs.
Seul l’accès des professeurs agrégés à la hors échelle HeBbis permettrait de maintenir la spécificité du corps des agrégés et l’intérêt d’y accéder. Actuellement, l’année d’étude supplémentaire réalisée par beaucoup d’agrégés conduit à des pensions similaires.
La suppression pure et simple du corps des agrégés pourrait alors devenir la dernière étape, « logique » et « naturelle », du processus engagé depuis bientôt cinquante ans. Gageons que l’attractivité du métier d’enseignant ne s’en trouvera pas améliorée, et que nos gouvernements successifs continueront à s’interroger sur les mystères d’une crise du recrutement aux motifs pourtant transparents.